Le secteur privé reste tenu à l’écart des débats parlementaires. La décision est actée par la Cour constitutionnelle, qui a annulé l’article 130 du règlement intérieur de la Chambre des représentants. Celui-ci autorisait ses commissions à auditionner des représentants du monde économique. Une pratique désormais jugée contraire à la Constitution, indique le quotidien Les Inspirations Eco dans son édition du 31 juillet.
Dans une analyse fouillée, le Moroccan Institute for Policy Analysis (MIPA) décrypte les conséquences de cette «censure» et met en lumière les angles morts d’un cadre juridique qui peine à articuler la participation de toutes les composantes de la société.
Officiellement, lit-on, la Cour rappelle que «toute extension des compétences parlementaires doit s’appuyer sur une base constitutionnelle explicite». Or, pour elle, ni les articles 102 ni 130 de la Constitution ne prévoient l’intégration formelle du secteur privé aux auditions législatives. Un verrou juridique qui contraste pourtant avec l’esprit de la Constitution de 2011, qui érige la démocratie participative en pilier de l’action publique, note le quotidien.
En pratique, les représentants d’intérêts économiques ne sont pas absents du Parlement. Mais ces interactions se déroulent dans l’informel, sans règles ni cadre transparent. «Résultat: une porte ouverte aux suspicions de favoritisme et un accès inégal aux instances législatives». Pour le MIPA, ce statu quo alimente la méfiance, mine l’efficacité des débats et freine la concertation sur des questions stratégiques comme la fiscalité ou les réformes budgétaires.
Ailleurs dans le monde, la question est depuis longtemps encadrée. L’Union européenne, les États-Unis, le Canada ou encore l’Australie ont instauré des dispositifs pour réglementer le lobbying: registres officiels, obligations de déclaration, codes de conduite… Loin de bannir le lobbying, ces outils visent à le rendre transparent et équitable, lit-on encore.
Le Maroc, lui, reste encore à la croisée des chemins. Pour le MIPA, «il serait temps de rompre avec une approche frileuse: au lieu d’écarter le secteur privé, mieux vaudrait lui offrir un cadre légal clair. Reconnaître le lobbying comme une pratique encadrée, et non comme une zone grise, permettrait d’ouvrir les portes de la concertation tout en posant des garde-fous contre les dérives».
À défaut, la démocratie participative risque de demeurer incomplète. «La prudence excessive de la Cour constitutionnelle freine l’évolution du processus législatif», conclut le MIPA. En excluant de fait un acteur clé du développement économique, le Parlement se prive d’une expertise souvent décisive pour enrichir et équilibrer les lois. À condition, bien sûr, que ces échanges restent consultatifs et strictement régulés.








