Le Maroc aura beau lancé des stratégies de développement de ses exportations ou conclure des accords commerciaux, il n’en demeure pas moins que l’impact de ces initiatives reste en deça des attentes. Du moins, c’est la conclusion que l’on peut tirer en analysant les échanges extérieurs avec certains pays dont les économies passent par une conjoncture difficile, mais qui parviennent tout de même à améliorer le solde de leurs balances commerciales avec le Maroc.
L’exemple le plus frappant est celui de la Tunisie. Il témoigne non seulement des opportunités qui se présentent au Maroc sans être saisies, mais également des défaillances de l’accord d’Agadir (dit aussi accord quadra) dont la Tunisie est signataire et où le Maroc se retrouve particulièrement perdant.
Alors que l’économie tunisienne subit toujours les conséquences du soulèvement populaire de 2011, ainsi que du contexte sécuritaire actuel, elle parvient néanmoins à maintenir un rythme important des exportations vers le Maroc. En même temps, les exportations marocaines vers la Tunisie n’arrivent toujours pas à atteindre un niveau qui permet l’équilibre dans les échanges entre les deux pays.
Un déficit qui se maintientSelon les données qu’a pu récolter Le360 auprès de sources tunisiennes (les statistiques au Maroc n’étant toujours pas prêtes!), l’année 2015 n’a fait que confirmer le dessus pris par l’économie tunisienne sur son homologue marocaine.
Ainsi, au terme de l’exercice, les opérateurs tunisiens ont pu exporter vers le Maroc plus de 353 millions de dinars tunisiens, soit l’équivalent de 1,76 milliards de dirhams, au moment où le Maroc ne les a fournis qu’en 248 millions de dinars de marchandises, soit l’équivalent de 1,24 milliards de dirhams. Ceci laisse donc logiquement apparaître un déficit commercial de plus de 520 millions de dirhams
Le hic dans l’histoire c’est que sur les quatre derniers exercices, le Maroc n’a pu réduire ce déficit que très légèrement alors qu’en parallèle, l’économie tunisienne traversait l’une des plus mauvaises passe de son histoire. Pour expliquer cette tendance, il faut revenir au détail des marchandises que la Tunisie a l’habitude de commercialiser au Maroc.
Les dattes en ligne d'attaqueBénéficiant d’un climat agricole favorable, la Tunisie a pu augmenter significativement ses exportations agricoles et agroalimentaires vers le Maroc ces deux dernières années. Ces produits, qui représentaient à peine 450 MDH des achats du Maroc en 2013, ont augmenté de près de 50% en deux ans pour atteindre désormais environ 680 MDH. Cette tendance n’est d’ailleurs pas prête de s’estomper puisque, selon nos informations, de plus en plus de distributeurs de produits agricoles et agroalimentaires, particulièrement ceux consommés pendant le mois de Ramadan, sont tentés de s’approvisionner en Tunisie.
Il y a quelques jours, selon nos informations, les responsables d’achats d'Atacadao, l'une des enseignes phares du secteur de la grande distribution, étaient même en déplacement en Tunisie pour prospecter auprès de fournisseurs de dattes et de concentrés de tomates et ce, dans le cadre des préparatifs au prochain Ramadan. Et ce n'est là qu’un exemple parmi tant d’autres.
La Tunisie affiche, par ailleurs, des augmentations de ses exportations vers le Maroc sur toutes les catégories principales de produits. Outre les produits agricoles, on notera ainsi sur l’exercice 2015 des améliorations au niveau des produits mécaniques et des produits électriques.
Des opportunités non saisiesEn revanche, du côté du Maroc, seuls les produits mécaniques et les autres produits manufacturés affichent de bonnes performances à l’export vers la Tunisie en 2015. Les produits agricoles et agroalimentaires, avec tout le potentiel des opérateurs marocains, ont généré moins de 200 MDH de chiffre d’affaires en Tunisie, confirmant ainsi un trend baissier observé depuis 2012. Il en est de même pour les produits du textile et de l’habillement qui, après une légère amélioration en 2014, commencent à chuter une nouvelle fois (180 MDH environ en 2015, en baisse de 1,4%).
Certes, le niveau des échanges commerciaux entre les deux pays ne représente qu’une infime part dans les relations commerciales internationales du Maroc. Néanmoins, dans un contexte où les opérateurs marocains aspirent à de nouveaux débouchés, notamment en Afrique, le solde commercial qui ressort avec les pays maghrébins a de quoi inquiéter. N’est-il pas temps d’en analyser les véritables raisons afin de corriger ce qu’il doit l’etre et pouvoir ainsi saisir pleinement les opportunités qui se présentent dans d’autres marchés ?