Lors de cette réunion, le conseil de Bank Al-Maghrib a analysé l’évolution récente de la conjoncture économique internationale et a relevé que celle-ci reste marquée par l’enlisement du conflit en Ukraine, la fragmentation géopolitique et économique et les séquelles de la pandémie de Covid-19. Malgré des signes d'atténuation dans certains pays, l’inflation demeure globalement très élevée, ce qui amène les banques centrales à poursuivre le resserrement, largement synchronisé, de leurs politiques monétaires. En conséquence, les perspectives de l’économie mondiale continuent de se détériorer avec une forte décélération de la croissance attendue en 2023.
Au niveau national, cet environnement pèse sur l’activité économique et sur l’évolution de l’inflation. Cette dernière devrait continuer à enregistrer des taux élevés pour une période bien plus longue que prévu en septembre, impactée notamment par les pressions externes qui se diffusent aux biens et services non échangeables et par la mise en œuvre de la réforme du système de compensation à partir de 2024.
En effet, tenant compte des données les plus récentes, l’inflation devrait ressortir à 6,6% en 2022, après 1,4% en 2021, tirée essentiellement par l’accélération de la hausse des prix des produits alimentaires et des carburants et lubrifiants. Elle se situerait par la suite à 3,9% en moyenne en 2023, avant d’enregistrer un nouveau rebond en 2024 à 4,2%, en lien avec la décompensation programmée des prix des produits subventionnés.
Au regard de ces évolutions, et pour prévenir tout désancrage des anticipations d’inflation et favoriser le retour de l’inflation à des taux en ligne avec l’objectif de stabilité des prix, le Conseil a décidé de relever le taux directeur de 50 points de base à 2,50%. Il continuera également de suivre de près la conjoncture économique et les pressions inflationnistes, tant au niveau national qu’international.
Au niveau national, après le rebond de 7,9% enregistré en 2021, la croissance économique marquerait, selon les projections actualisées de Bank Al-Maghrib, un net ralentissement cette année à 1,1%, résultat d’un recul de 15% de la valeur ajoutée agricole et d’une décélération à 3,4% du rythme des activités non agricoles. En 2023, elle s’accélérerait à 3%, portée par la hausse de 7% de la valeur ajoutée agricole, sous l’hypothèse d’un retour à une production céréalière moyenne, alors que la croissance des activités non agricoles décélèrerait à 2,4%, pâtissant en particulier de la détérioration de l’environnement externe. En 2024, la croissance se situerait à 3,2%, recouvrant des accroissements de 1,8% de la valeur ajoutée agricole, sous l’hypothèse d’une production agricole moyenne, et de 3,5% de celle des activités non agricoles.
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Sur le plan des comptes extérieurs, l’année 2022 est marquée par une forte dynamique des échanges et une augmentation notable des recettes voyages et des transferts des MRE. Les exportations ressortiraient ainsi en amélioration de 32,3%, tirées essentiellement par les ventes des phosphates et dérivés, à la faveur de la hausse des cours, et de celles du secteur de l’automobile. Leur progression décélèrerait à 2,7% en 2023, avec des baisses pour les phosphates et dérivés et les produits agricoles et agro-alimentaires, avant une quasi-stagnation en 2024.
En parallèle, les importations augmenteraient de 38,4% en 2022, recouvrant essentiellement un alourdissement de 102,1% de la facture énergétique à 153,2 milliards de dirhams, un accroissement des achats des demi-produits et un rebond de 89,9% à 27,2 milliards de dirhams des approvisionnements en blé. Elles devraient se replier de 3% en 2023, avec notamment des diminutions de 13% de la facture énergétique et de 41,2% des approvisionnements en blé, puis progresser de 1,1% en 2024. S’agissant des recettes voyages, elles termineraient l’année avec un bond record à 88,8 milliards de dirhams après 34,3 milliards en 2021, et connaîtraient une quasi-stagnation en 2023 puis une amélioration de 5,5% à 94,1 milliards en 2024.
Pour leur part, les transferts des MRE ressortiraient en augmentation de 12,9% à 105,8 milliards de dirhams en 2022, reculeraient de 4% à 101,5 milliards en 2023, en raison notamment de la détérioration des conditions économiques dans les pays d’accueil, puis s’inscriraient en hausse en 2024, atteignant près de 104 milliards de dirhams. Dans ces conditions, le déficit du compte courant se creuserait de 2,3% du PIB en 2021 à 3,3% en 2022 avant de s’atténuer à 2,1% en 2023 puis à 1,9% en 2024.
Concernant les IDE, les recettes avoisineraient l’équivalent de 3% du PIB cette année et 3,2% du PIB annuellement sur les deux prochaines années. Au total, et sous l’hypothèse notamment de la concrétisation des financements extérieurs prévisionnels du Trésor, les avoirs officiels de réserves s’établiraient à 341,7 milliards de dirhams en 2022 avant de s’élever à 362,9 milliards de dirhams à fin 2023 puis à 371 milliards de dirhams en 2024. Ils représenteraient ainsi l’équivalent de 5 mois et 18 jours d’importation de biens et services en 2022 et près de 6 mois au terme de 2023 et de 2024.
Pour ce qui est des conditions monétaires, la forte appréciation du dollar vis-à-vis de l’euro se reflète sur le taux de change effectif nominal du dirham qui devrait ressortir en dépréciation de 1,7% en 2022, avant d’enregistrer une appréciation de 2% en 2023, et se stabiliser en 2024.
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Tenant compte des différentiels d’inflation entre le Maroc et ses principaux partenaires et concurrents, ce taux se déprécierait en termes réels de 3,2% en 2022, puis s’apprécierait graduellement de 0,3% en 2023 et de 1,9% en 2024. Sur le même registre, les évaluations trimestrielles réalisées par Bank Al-Maghrib continuent de montrer l’absence de signes de désalignement du dirham par rapport aux fondamentaux de l’économie nationale.
Quant aux taux débiteurs, ils ont connu une légère baisse de 5 points de base au troisième trimestre, recouvrant un recul de 46 points de base pour les prêts à l’équipement, des augmentations de 9 points de base pour les facilités de trésorerie et de 7 points de base pour les prêts à la consommation, ainsi qu’une stabilité de ceux des crédits à l’habitat.
Concernant le crédit bancaire au secteur non financier, tiré par la hausse des concours de trésorerie aux entreprises privées, il a enregistré une accélération graduelle avec un accroissement de 6,3% en octobre et devrait terminer l’année avec une progression de 5,1%, un rythme qui décélérerait à 3,3% en 2023 puis s’accélérerait de nouveau à 5,5% en 2024. S’agissant du besoin de liquidité des banques, il avoisinerait les 90 milliards de dirhams au terme de cette année et de 2023, avant de se creuser à plus de 100 milliards de dirhams à fin 2024.
Au niveau des finances publiques, l’exécution budgétaire au terme des onze premiers mois de l’année fait ressortir une amélioration de 25,6% des recettes ordinaires, portée principalement par l’augmentation notable des rentrées fiscales et la forte progression des recettes des mécanismes de financement spécifiques. En parallèle, les dépenses globales se sont alourdies de 15,9%, reflétant en particulier la hausse de la charge de compensation.
Tenant compte notamment de ces réalisations, des données de la loi de finances 2023 et de la programmation budgétaire pluriannuelle (2023-2025), le déficit budgétaire devrait, selon les projections de Bank Al-Maghrib, s’atténuer graduellement, revenant de 5,9% du PIB en 2021 à 5,3% en 2022, avant de diminuer à 4,6% en 2023 et à 4% en 2024.