Les connexions internet au Maroc sont portées à hauteur de 94% par le mobile. Les connexions ADSL représentent moins de 7%. Le constat est fait par la Cour des comptes dans son dernier rapport sur les services en ligne. Les équipes de Driss Jettou n’hésitent pas à pointer du doigt directement le monopole exercé par l’opérateur historique sur le marché de l’ADSL.Ce dernier, comptant 1,23 millions d’abonnés, est détenu à hauteur de 99,98% par Itissalat Al-Maghrib (IAM).
Pour les juges de la Cour des comptes, cela signifie que les technologies, autres que le mobile, ne profitent pas du même niveau d’évolution, de concurrence et de promotion.
«Malgré leur introduction depuis 2005, la mise en œuvre de certains leviers de régulation, comme le dégroupage, la co-localisation et le partage des infrastructures, connaissent toujours des problèmes opérationnels et tardent à produire les effets escomptés sur le secteur», poursuit la même source.
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Mieux, afin de relancer le secteur et améliorer le cadre législatif et réglementaire le régissant, un projet de loi n°121-12 modifiant et complétant la loi n°24-96 précitée a été élaboré.Toutefois, observe la Cour des comptes, malgré son caractère urgent et important pour le secteur, l’adoption de ce projet de loi a pris beaucoup de retard et sa publication n’a eu lieu qu’en février 2019, alors que son approbation par le conseil des ministres remonte à 2014.
Les constats relevés par les équipes de Driss Jettou sont corroborés par les indices internationaux relatifs à l’infrastructure des télécommunications. En effet, les indices EGDI, NRI et IDI montrent que les réseaux fixe et fixe large bande sont relativement faibles et n’ont pas évolué sur les cinq dernières années, et ce contrairement au mobile.
Ces indicateurs montrent également que les flux internet sont plus portés par le mobile que par le fixe. Le tableau suivant appuie ce constat à partir de l’indice IDI de l’Union Internationale des Télécommunications (UIT).
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S’agissant des prix, l’indice IPB70 (Panier des prix des TIC) du Maroc s’est amélioré entre 2012 et 2015, passant de 5,1% à 4%. Toutefois, le Maroc a régressé de huit places dans le classement, signifiant que d’autres pays ont réalisé plus d’efforts en matière de baisse des prix des communications et en particulier des «données».
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En 2016 et 2017, l’IUT n’a pas fourni un indice IPB, mais les classements du Maroc en 2017 sur quatre sous-indices des prix (99ème sur le fixe large bande, 132ème sur le téléphone mobile, 110ème sur le mobile large bande 500 Mo prépayé et 101ème sur le mobile large bande 1 Go post payé) indiquent qu’il ne réalise pas de bonnes performances, estime la Cour des comptes. Le tableau suivant donne une comparaison entre le Maroc, la Tunisie, la Jordanie et le Liban sur les quatre sous-indices de l’IPB:
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Dans son rapport du 4ème trimestre de 2016, l’ANRT indique que la facture mensuelle moyenne d’un abonné internet mobile est de 17 dirhams contre un prix de 97 dirhams (hors frais de la ligne fixe qui avoisinent 100 DH par mois), ce qui confirme la cherté de l’internet fixe par rapport au mobile, soulèvent les juges de Jettou.
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Autre constat frappant, le rapport de la Cour des comptes attire l’attention sur le fait que les rapports de l’ANRT ne mesurent la qualité de service que pour les réseaux mobiles. «La qualité de la connexion à internet via le réseau fixe (ADSL, liaison louée, etc.) ne fait l’objet d’un contrôle qu’en en cas de réclamation du client», s’étonne-t-on du côté de la Cour des comptes.
Après ce constat implacable de la Cour des comptes, Abdeslman Ahizoune, le patron de Maroc Telecom, va-t-il persister dans son obstination à refuser de partager avec les autres opérateurs le réseau cuivre, hérité de l’Etat marocain ?
En tout cas, le rapport de la Cour des comptes établit sans ambages que le monopole de Maroc Telecom freine la croissance d’un secteur vital pour le développement du Maroc. Pendant que le Maroc régresse dans le classement du développement TIC, l’ANRT continue de regarder ailleurs.