Salé, splendeurs et promesses. Tel est le titre du luxueux et très édifiant livre qui vient d’être édité par Axions communication, sous la direction de deux éminents chercheurs, Mohamed Lotfi M’Rini et Saâd Hossini, eux-mêmes natifs de Salé, avec l’apport d’une vingtaine d’auteurs, de différentes disciplines.
Invitation au voyage à travers le temps et les dédales de cette cité-forteresse, l’une des plus anciennes de l’Occident musulman, cet ouvrage de référence nous fait découvrir la gloire d’antan de cette cité-musée, qui a su résister à l’épreuve des conquêtes de l’Occident chrétien et à l’usure du temps pour préserver jalousement son cachet authentique.
Avec une préface signée Jamal El Moâtassim, président du Conseil de la ville de Salé, et un avant-propos serti avec la patine d’un orfèvre par Mohamed Lotfi M’rini, sous le titre: Salé, florilège de noms, le livre comporte onze chapitres respectivement intitulés: «La ville fortifiée»; «La ville mystique»; «La ville résistante»; «La ville des lettrés»; «La ville urbaine»; «La vie associative»; «Urbanisme»; «Art et création»; «Sport, nature et tourisme»; «Industrie, services et formation» et, enfin, «Avenir de Salé».
«Salé, ville prospère du Maroc au XIIIe Siècle, connaîtra le martyre en 1260. Les chrétiens castillans vont envahir la cité le lendemain de l’Aïd el-Fitr, massacrer ses gens, la piller, la brûler et conduiront en captivité à Séville trois mille de ses habitants», rappelle l’ouvrage. «Le 10 septembre 1260, qui coïncidait avec le 2 Chawwal, un jour de fête, les troupes, dont le nombre dépasse celui des habitants selon Ibn Khaldoun, débarquent par surprise dans la ville ouverte et sans fortifications défensives des côtés maritime et fluvial. Elles défont quelques résistances où se serait distingué, rapporte la légende, Ahmed Ben Achir, futur sait patron de la ville, et agressent une population sans armes», relate l’ouvrage.
A toute chose malheur est bon. Cette agression n’est pas restée sans riposte, le roi mérinide, Yacoub Ben Abd al-Haq (1258-1286), dans un élan de guerre sainte, étant parti «à quatre reprises en Andalousie pour croiser le fer avec les infidèles». «Concomitamment, il améliora les fortifications dans son royaume (…) Pour Salé, il fit venir l’ingénieur andalou Mohamed ben Ali al-Ichbili, et le chargea, entre autres, de construire la porte Bab el-Mrissa, appelée aussi Bab Lamrissa», souligne l’ouvrage.
Ce fut le point de départ d’un vaste chantier destiné à doter la ville de Salé de fortifications imprenables, restées intactes au jour d'aujourd’hui. «Suivant un tracé presque linéaire et flanquée de cinquante-quatre tours barlongues de tradition hispano-mauresque, la muraille (de Salé) est percée de huit portes qui continuent d’assurer la liaison entre la médina et l’extérieur: Bab Maalqa, Bab Jdid, Bab Bouhaja et Baba Dar As-Sanaâ du côté sud; Bab el-Mrissa et Bab Fès du côté est; Bab Sebta et Bab Chaafa côté nord».
Au-delà de cette oeuvre architecturale majestueuse, la ville de Salé se prévaut d’être le point de repère de grands saints patrons qui ont fait la légende de vie mystique du royaume. «Ces hommes et femmes de foi, érudits ou simples croyants, ascètes, parfois moudjahidin et médecins -Sidi Ahmed Ben Achir, Omar Ben Ghayat, dit Sidi Moghit- ont élu domicile à Salé, en provenance d’Andalousie (Sidi Ahmed Ben Achir et Sidi Ahmed Hajji), de Turquie (Sidi Tourqui) ou d’autres régions du Maroc (Sidi Abdellah Ben Hassoun, Sidi Moussa Doukkali…) ou sont de paisibles Slaouis dotés de la baraka, comme notre contemporaine, la femme sainte, dite la Saliha», souligne l’ouvrage.
Témoignage de la valeur mystique de la ville de Salé, cette tradition millénaire de la procession des cierges. «Depuis plus de cinq siècles, la ville de Salé célèbre la naissance du prophète, Sidna Muhammad, au cours de l’Aïd al-Mawlid Annabaoui, fête instaurée par les Mérinides au XIIIe siècle. En outre, elle organise, la veille de cette célébration, soit le 11 de Rabia al wal, une manifestation religieuse riche en couleurs: la procession des cierges, Dour chmae».
Côté lettres et sciences humaines, la ville de Salé a donné naissance à une pléiade d'écrivains-chercheurs: Mohamed Zniber (historien militant), Mohamed Hajji (encyclopédiste), Abdellah Chaqroun (journaliste-écrivain)...
Forte de son histoire et de ses hommes, la ville de Salé est également porteuse d'une belle promesse d'avenir. «Le projet Bouregreg, une chance historique pour Salé», fait valoir l'ouvrage, qui passe en revue les chantiers prometteurs initiés par le roi des deux côtés de la rive de l'estuaire (Marina, grand théâtre, plus grande tour d'Afrique, Technopolis, etc.). Un beau destin en perspective...