Thomas Dutronc, fils de Françoise Hardy, a annoncé son décès mardi soir sur ses réseaux sociaux. «Maman est partie», a-t-il mis en ligne, avec une photo de lui enfant, auprès de sa mère. L’auteure et chanteuse française, icône des sixties, est morte des suites d’un cancer à l’âge de 80 ans.
Dans le classement des 200 meilleurs chanteurs de tous les temps du magazine américain Rolling Stone en 2023, Françoise Hardy était l’unique représentante de la France. Quels souvenirs resteront? Son tube «Tous les garçons et les filles», sa voix délicate, le couple people intriguant qu’elle forma avec le chanteur Jacques Dutronc. Mais pas seulement. C’était aussi l’ambassadrice d’une élégance française et pop à l’international, un «idéal féminin» pour Mick Jagger, figure fantasmée pour Bob Dylan ou David Bowie.
Tout commence donc en 1962 avec ce hit instantané -plus de 2 millions d’exemplaires vendus - «Tous les garçons et les filles», qu’elle a écrit et composé, fait rare à l’époque. Elle a 18 ans, c’est son premier disque. Françoise Hardy, toute en contradictions, est là: elle perce en pleine vague yéyé mais ne correspond pas vraiment à cette étiquette.
Dans cette période insouciante, sa mélancolie tranche. Son physique androgyne et sa retenue sont également loin des formes et de l’exubérance d’une Brigitte Bardot. Elle fait rapidement la Une des magazines, photographiée en France par son petit ami de l’époque, Jean-Marie Périer, et à l’international par le célèbre William Klein. Elle a les cheveux longs, une frange -qu’elle gardera plus tard avec sa coupe à la garçonne et porte à merveille les robes à lamelles, futuristes, signées Paco Rabanne.
Sa grande histoire d’amour s’appelle donc Dutronc, qui vient lui aussi de secouer les charts avec «Et moi, et moi, et moi» (1966). Ils auront un enfant, Thomas, lui même devenu chanteur. Mais leur relation est source de désillusions entre les infidélités de l’auteur des «Playboys» et la distance qu’il impose à celle qui devient sa femme. Dans leur immeuble parisien, avant la séparation (sans divorce) ils vivent ainsi dans deux étages distincts…
Cette vie conjugale douce-amère imprègnera toute son oeuvre, de «Message personnel», immense succès de 1973, à «Personne d’autre», titre du dernier album éponyme en 2018. Parmi les autres pépites, on peut, entre autres, citer «Mon amie la rose» (1964) ou «Comment te dire adieu» écrit par Serge Gainsbourg (1968).
L’album «La question», ovni réalisé avec la Brésilienne Tuca, est un des disques de chevet du chanteur Etienne Daho, admirateur devenu ami de la chanteuse aux cheveux couleur neige, l’âge venu. «Le temps de l’amour» résonne dans le film «Moonrise Kingdom» de Wes Anderson et Morrissey, ex-leader de The Smiths ne passe pas une interview sans la citer.
«Épreuve considérable»
Pas mal pour une jeune Parisienne -élevée avec sa soeur par une mère seule- qui n’a eu sa première guitare qu’à 16 ans et a poussé la première fois la porte d’une maison de disques après une petite annonce lue dans la presse. «Toute ma vie, j’ai été à l’affût des belles mélodies. En écouter me met au septième ciel, confie-t-elle en 2018 à l’AFP. Les plus beaux thèmes mélodiques sont toujours mélancoliques ou romantiques».
Elle disait aussi que chanter ne lui était pas naturel et a rapidement abandonné la scène. Cette férue d’astrologie parlait sans détour de son cancer. Et de l’idée de la fin. «La mort n’est que celle du corps, lequel est d’essence matérielle. En mourant, le corps libère l’âme qui est d’essence spirituelle. Mais il n’en reste pas moins que la mort du corps est une épreuve considérable et je l’appréhende autant que tout le monde», exposait-elle à l’AFP.