Installé à la Fabrique culturelle des anciens abattoirs depuis un an, le Théâtre nomade a attiré beaucoup de monde ce week-end lors du Tremplin du L’Boulevard. Il fallait pousser des coudes pour avoir accès à ce spectacle qui est le résultat d’ateliers menés par les S’toon Zoo.
Installés sur un ring, les comédiens se sont illustrés par leur improvisation et leurs joutes verbales. La salle du chapiteau n’a pas désempli et le public s'y est engouffré en vagues successives.
Pour ceux qui ne connaissent pas encore la troupe, disons qu'il s’agit d’un collectif d’artistes spécialisé dans les arts de la rue et qui s’installe souvent dans les quartiers dits difficiles. C’est une école sous chapiteau avec des profs cools et de la bonne humeur ! On y prend conscience de son corps, on utilise autrement ses mains, on affute son regard et on apprend à poser sa voix, à donner vie à un masque…
Une équipe pluridisciplinaire dotée d’un grand chapiteau, un bibliobus, trois caravanes, quelques habitations démontables, un atelier de fabrication, un camion et un semi-remorque... Et le tour est joué.
Ainsi va la vie de ce théâtre qui se déplace en explorant de nouveaux horizons et des territoires inconnus, allant à la rencontre des couches populaires les plus défavorisées pour leur apporter la magie du spectacle vivant. Une dizaine d’ateliers gratuits sont programmés : danse, théâtre, machinois, tissus, jonglage, trampoline, acrobatie, masques, fabrication de marionnettes et bien d’autres disciplines... Autant de matières sont déployées pour former et créer des spectacles et autant d’outils pour forger les sens, révéler les émotions, nourrir le regard et les corps, …
Le Théâtre nomade n’est pas arrivé là par hasard. Depuis 2007, il sillonne les quartiers pour semer la joie et élargir les horizons. Pour la petite histoire, ce théâtre est né 2007. Il est dirigé par Si Mohamed Al Hassouni qui a formé son équipe au fur et à mesure des résidences où il s’est établi. Son objectif : travailler dans les quartiers où il n’y a pas d’offre culturelle.
La saison dernière, ils étaient à Sidi Moumen. C’est une grande décharge publique qui les a « accueillis ». C’est aussi là-bas, face à l’école Tacharouk -affectueusement appelée Titanic- qu’ils ont récupéré des gamins qui faisaient les murs d’un établissement scolaire en plein… naufrage. « A Sidi Moumen, nous avons eu 921 inscrits Nous ne savions plus où donner de la tête et nous priions pour qu’ils n’arrivent pas tous en même temps », se souvient avec émotion Si Mohamed.
Aujourd’hui, ils on quitté la triste banlieue en laissant derrière eux un chapiteau pour « créer un lien entre Hay Mohamadi et Sidi Moumen. Entre les jeunes que nous formons dans les deux quartiers», se réjouit l’initiateur du projet.
Aux anciens abattoirs, le Théâtre nomade semble déjà avoir trouvé ses marques
Dans cette grande famille qui voyage tout le temps, les liens semblent très forts. L’entraide est indispensable et le système D est le maître-mot.
Pour fabriquer ses masques, Soumia a trouvé un espace de travail dans les anciens ateliers d’extraction de tripes et de boyaux… Aussi le café a-t-il été nettoyé remis au goût du jour pour recevoir ses hôtes de passage. Chacun a déjà trouvé sa place : Hassan a repris ses costumes, Zakaria à la régie générale, au son et lumière, conduit à ses heures perdues, Bomby le machinois nous fait tourner la tête. Et à l’unisson, le Théâtre nomade déplace les lignes et abolit les frontières.