Il a plu, mais ça ne plaît pas à tout le monde

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ChroniqueJe suis sûr que vous l’avez déjà remarqué, mais quand la pluie se fait un peu désirer, nos politiques font beaucoup moins les malins, surtout ceux qui sont aux commandes.

Le 16/02/2016 à 12h17

Elle est tombée. Enfin ! Il faut dire qu’elle s’est vraiment fait attendre. J’aurais pu dire même qu’elle s’est fait prier, mais je ne le dirai pas car ça ferait un peu impie, ce que je suis quand même un peu. Bref, la pluie est tombée, avec un peu de retard, beaucoup de retard, trop de retard, peut-être, mais, elle a fini par tomber, et c’est l’essentiel.

Bien sûr, les spécialistes et tous les défaitistes vous diront que le mal est déjà fait et que nous allons avoir une récolte beaucoup moins bonne que l’année dernière. Traduction: une année pas terrible. D’ailleurs, je n’ai jamais bien compris pourquoi on donne autant d’importance à cette histoire de pluie qui tombe ou bien qui ne tombe pas, alors qu’on n’arrête pas, je devrais dire «les économistes n’arrêtent pas», de nous répéter que parce que le Maroc, qui ne serait pas un pays à vocation foncièrement agricole, notamment parce qu’il serait un pays semi-aride – quel bel euphémisme ! - l’agriculture n’aurait qu’un impact mineur sur la croissance économique. Si je me souviens bien, je crois qu’elle n’interviendrait que pour moins de 20 % du PNB ou du PIB, ne sachant pas trop la différence entre les deux.

Autrement dit, même s’il ne tombe pas une goutte, ce qui, Dieu merci, n’arrive jamais dans notre pays béni, le pire qui pourrait nous arriver, toujours selon ces économistes plutôt optimistes, c’est que nous devenions 20 % moins riches, ou bien, puisque c’est selon, 20 % plus pauvres que l’année d’avant. Donc, pas de quoi fouetter un chat, alors que le pauvre chat n’y est pour rien dans cette affaire.

Tout ça, c’est bien intéressant, mais les citoyens, et en particulier nos concitoyens qui vivent à (et de) la campagne, eux, ne l’entendent pas du tout de cette oreille. Eux, quand il ne pleut pas, du moins à temps, non seulement, ils n’ont plus rien à bouffer, mais les animaux qu’ils élèvent pour pouvoir bouffer, non plus, et même parfois ceux qui leur tiennent juste compagnie. En fin de compte, ça fait beaucoup de monde à nourrir. Et quand il ne pleut plus, une partie de ces pauvres animaux n’en peuvent plus et finissent très vite par mourir. Et là, je peux vous dire que plus personne n’a plus envie de rire.

Alors, les petits 20 % de plus ou de moins, les gens de la campagne, ils n’en ont rien à cirer. Eux, c’est la pluie, sinon rien. Et rien, c’est quand ils n’ont plus rien à gagner et donc n’ont plus rien à perdre. Et alors, c’est simple : tout s’arrête et tout le monde descend. En ville. Et oui ! C'est presque automatique. L’exode rural, ça vous dit quelque chose? Et là, mes chers amis, vous pouvez dire à vos économistes et compagnie, qu’il n’y a pas que les ruraux qui ne se sentent plus bien, mais même nous, les citadins qui ne voyons la campagne que le week-end et les jours fériés, et encore, juste à travers les vitres fermées et fumées de nos 4x4, de nos berlines ou de nos limousines – cochez la catégorie qui vous concerne – et bien, même nous, «la crise agricole», on la voit venir. Du coup, on déprime, et quand on déprime, on décroît. De 20 % ou de plus, mais ça se sent.

Je ne sais pas si c’est une réalité ou juste une impression, mais notre poche et/ou notre compte en banque se réduisent en peau de chagrin. Et le chagrin, le vrai, suit tout de suite après. Et c’est là, j’y arrive, la politique vient s’en mêler. Je suis sûr que vous l’avez déjà remarqué, mais quand la pluie se fait un peu désirer, nos politiques font beaucoup moins les malins, surtout ceux qui sont aux commandes ou, si vous préférez, ceux qui sont au gouvernement. Et comme je les comprends ! Ce qui fait généralement vachement ricaner leurs copains d’en face, ou ce qu’on appelle exagérément l’opposition. Et comme je ne les comprends pas ! D’ailleurs, dès qu’il pleut, même juste un petit peu, les deux protagonistes souvent antagonistes se mettent à pavoiser, chacun de son côté, comme s’ils y étaient pour quelque chose.

Et à propos de gouvernement, personne n’a compris le pourquoi de la récente et soudaine sortie belliqueuse d’un des leaders de la majorité contre son propre chef et contre son parti, pourtant ses propres alliés au sein du gouvernement. En vérité, c’est vrai que cette histoire n’est pas très claire, mais moi, je sais pourquoi, mais je ne vous le dirai pas. J’en connais qui sont bien contents, et là, non plus, je ne vous dirai pas qui. Vous n’avez qu’à chercher. En tout cas, la pluie est là, et ce n’est ni la majorité récemment fissurée, ni l’opposition prochainement configurée qui vont nous empêcher d’en profiter jusqu’à la dernière goutte. En attendant, je vous dis vivement plus de clarté et vivement mardi prochain.

Par Mohamed Laroussi
Le 16/02/2016 à 12h17