C’est le dernier coup d’éclat du sieur Benchemsi, aujourd’hui directeur de la communication pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient de l’ONG américaine Human Rights Watch: la création, le 5 février dernier, sur le site de cette association de défense des droits humains, d’un «répertoire» où, photographies à l’appui, il exhibe une liste de ce qu’il présente comme étant des «détenus d’opinion» au Maroc, son pays natal.
Grandement aidé en cela par la turbulente Association marocaine des droits de l’homme, l’AMDH, fondée par quelques refuzniks d’extrême-gauche, Ahmed Reda Benchemsi en a répertorié onze. Onze hommes, condamnés par différents tribunaux du royaume pour des crimes commis sur les réseaux sociaux, relevant aujourd’hui du droit pénal: cela va de propos diffamatoires, voire insultants envers le roi, incarnant l’institution monarchique, pourtant socle de la cohésion de la nation, ou encore de l’outrage au drapeau du Maroc, qui nous rassemble et nous unit, autour d’un destin commun.
Ces crimes, car c’est bien de cela dont il s’agit, l’ex-fondateur et directeur de TelQuel les présente comme relevant de la liberté d’expression. Mieux encore, il brandit le Pacte international des droits civils et politiques, ratifié par le Maroc en 1979, comme preuve irréfutable de ses dires. Suivre le raisonnement d’Ahmed Reda Benchemsi, revient à entériner l’idée qu’insulter le roi, piétiner les valeurs qui fondent la nation, dont son drapeau, c’est exprimer «pacifiquement» son opinion.
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Peu importe, après tout, si cette «expression pacifique» entraîne, dans une réaction en chaîne d’esprits échauffés, et surtout très peu éduqués aux valeurs élémentaires du civisme, de l’égalitarisme et du respect de l’autre, des troubles sociaux, nous mène vers un scénario catastrophe dont aucune personne dotée de simple bon sens ne voudrait pour son pays. L’«expression pacifique» de ce que Benchemsi présente comme des «opinions» est un leurre, qui peut mener à tous les dangers.
C’est que berner son monde, leurrer tout le monde, Ahmed Reda Benchemsi est maître en la matière. Cet homme a vécu, en 2007, un drame personnel: sa mère s’est suicidée, dernier acte tragique de la vie heurtée d’une femme qui n’avait pu surmonter un troisième divorce, et qui devait faire face à des créanciers qui la pourchassaient, réclamant leur dû avec insistance. La dette n’était pas si énorme, ses proches, dont son propre fils aîné, auraient pu l’aider, mesurer son désespoir, mais ce ne fut malheureusement pas le cas.
Fatiha Boucetta, notaire de son métier, avait dû fermer son étude, en l’absence de clients. Elle vivotait, grâce à la publication de petites chroniques judiciaires dans un quotidien casablancais, spécialisé dans l’économie. Son fils, alors au faîte de sa «gloire», solidement installé à la tête d’un TelQuel atteignant des records de ventes, n’avait décidément pas de temps à consacrer au désespoir de sa mère. C’est bien cette indifférence qui avait eu raison de Me Fatiha Boucetta, qui s’était finalement résolue à se jeter du haut d’un petit promontoire rocheux de la côte casablancaise, à bord de son véhicule tout-terrain, dont elle ne pouvait d’ailleurs plus honorer les traites, qui devaient mensuellement être débitées par une société de leasing sur son compte en banque. Un suicide spectaculaire, pour punir l’indifférence de tous face à son incurable désespoir.
Pourquoi raconter tout cela? Pourquoi donc remuer les faits avérés de cette tragédie? Avant tout, pour révéler la duplicité d’un homme, son fils, aujourd’hui soi-disant pourfendeur des atteintes aux droits humains au Maroc. Ahmed Reda Benchemsi avait en effet réagi d’une bien curieuse manière au déchaînement de fausses informations de la presse sensationnaliste, presque exclusivement arabophone, qui avait fait ses choux gras de ce triste fait divers. Hurlant de rage au téléphone, il avait appelé plusieurs journalistes, les abreuvant d’insultes, allant même jusqu’à assurer l’un d’entre eux que si celui-ci s’était trouvé face à lui, il l’aurait tué de ses propres mains. Un comportement inqualifiable, que l’ex-journaliste, devenu militant des droits humains, a imputé à «l’émotion», à la «rage» qu’il a ressentie en lisant ces lignes diffamant la mémoire de sa mère, qu’il n’avait pourtant pas appelée depuis des mois, mais dont il avait suivi le cercueil en faisant semblant de réprimer des sanglots.
Cet homme, en fait, ne ressent rien. N’aime rien, pas même lui-même. Ce qui l’anime, c’est une pulsion destructrice, une rage froide, et cette force de frappe, nourrie par de la haine, il l’a mise au service d’une association américaine de défense des droits humains, l’ONG Human Rights Watch, non pas, en ce qui concerne le Maroc, pour le bien-être de ses habitants, leur devenir, la construction de leur avenir, leur permettre un futur des possibles. Ce qu’il cherche, au fond, c’est la destruction.
Pour cela, Ahmed Reda Benchemsi use et abuse d’une valeur immense, celle de la liberté, qu’il n’hésite pas à dévoyer pour nourrir ses sombres desseins et son ambition personnelle. Quitte, au nom d’un concept qu’il a détourné de sa lettre, l’«expression pacifique de la liberté d’expression», à trouver normal de fouler aux pieds le drapeau sous lequel il est né, à prendre la défense de ceux qui bafouent son roi, garant de la cohésion de la nation dans laquelle il a grandi.
Cet homme, qui avait fini par s’exiler Outre-Atlantique, est désormais revenu installer son quartier général au Maroc. Un immeuble chic de Casablanca abrite femme et enfants, et quant à lui, il s’y pose de temps en temps, et poursuit son travail d’agitateur, toujours entre deux avions, accordant de temps à autre une interview. Revenir s’installer en Afrique du Nord, c’était là une condition sine qua non à la signature de son contrat avec l’ONG qui l’emploie. Mais cette clause n’arrangeait vraiment pas les petites affaires du sieur Benchemsi, installé aux Etats-Unis, certes, mais depuis peu, pas suffisamment, en tout cas, pour pouvoir prétendre à devenir un citoyen américain à part entière. Il faut en effet cinq années de vie effective sur le sol de ce pays, pour pouvoir prétendre à sa nationalité.
Louvoyant, allant jusqu’à enfanter sur le sol américain pour s’y maintenir vaille que vaille, il aura tenu cinq années, et peut désormais exhiber ce fameux passeport qui fait de lui un citoyen des Etats-Unis d’Amérique. «Fort» de sa nouvelle nationalité acquise, il se permet désormais de mépriser les valeurs de celle qui l’a vu naître. Jean-Louis Servan-Schreiber, son protecteur, qui avait embauché Ahmed Reda Benchemsi à la fin du règne de feu Hassan II, quand ce patron de presse parisien avait repris l’hebdomadaire La Vie Economique, sait-il tout cela, lui qui a usé de son entregent pour faciliter ses contacts avec la direction opérationnelle de Human Rights Watch?
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Oui, si Ahmed Reda Benchemsi peut continuer, aujourd’hui encore, à user de ses capacités de nuire à son pays, à ses valeurs, c’est bien grâce à ce patron de presse, qui se trouve être un membre émérite de l’équipe dirigeante de cette ONG américaine. Jean-Louis Servan Schreiber, par l’entremise de Perla Danan, son épouse marocaine, a d’ailleurs longtemps été l’un des plus importants actionnaires de TelQuel, la législation, au Maroc, ne permettant pas à un étranger de détenir des parts dans une société d’édition de titres de presse. Et tiens, justement, Henry Danan, frère de Perla, et réputé proche de l’une des cours princières de ce pays, sait-il toute la duplicité du protégé de son beau-frère et de sa sœur?
En calculant soigneusement ses petits coups, exclusivement dédiés à servir son ambition personnelle, particulièrement démesurée, et dépourvue du moindre grain d’humanité, c’est ainsi que Ahmed Reda Benchemsi mène sa vie. Quitte à tenter, coûte que coûte, de mettre en danger la cohésion du pays qui l’a vu naître et de défendre des hors-la-loi.