En même temps qu’apparaissait le coronavirus en Asie, des gouvernements de ces pays menaient une lutte contre leurs minorités musulmanes. On dirait qu’ils se sont donné le mot. «Chasse aux musulmans!».
Cela a commencé par la loi du 19 décembre 2019, lorsque le Premier ministre indien, Narendra Modi, propose au parlement de voter un texte remanié sur la citoyenneté. Le texte permet aux immigrés d’être naturalisés en fonction de leur appartenance religieuse. Tous les cultes sont admis sauf celui des musulmans. Ainsi, des Afghans, des Pakistanais, des Bengalais immigrés en Inde pouvaient accéder à la nationalité indienne, sauf s’ils sont musulmans. Ces derniers n’ont plus aucun droit; ils deviennent de fait des étrangers, des personnes non désirées, vouées à la misère et à la mort.
Modi veut un Etat Hindou. Pour lui, les musulmans ne peuvent avoir les mêmes droits que les autres. C’est ainsi. C’est une discrimination «légalisée» par une loi. Le principe d’une Inde laïque a été trahi et du coup a volé en éclats. Qu’importe! La lutte contre les musulmans se faisait discrètement dans un immense pays qui avait réussi jusqu’à présent à être démocratique et tolérant. Mais la haine des musulmans est ancienne. Modi l’a érigée en loi. Son racisme n’a d’égale que sa volonté populiste.
En même temps, la Birmanie dont la dirigeante, Aung San Suu Kyi, qui a souffert d’absence de liberté et de répression dans son propre pays, s’attaque aux musulmans Rohingyas. En début de cette année, 800 000 persécutés ont fui ce pays pour se réfugier où ils pouvaient. Ils étaient victimes de violences gratuites, de viols, de déplacements forcés. Selon les Nations Unies, «les 600 000 Rohingyas restés en Birmanie, sont menacés de génocide».
En Chine, à l’Ouest du pays, dans la région Xinjimg, les Organisations non gouvernementales estiment à 1,5 million le nombre de musulmans Ouighours, placés dans des camps de prisonniers; des goulags où on les oublie.
Au Sri Lanka, les musulmans sont persécutés de différentes manières. On fait circuler la rumeur que les musulmans fabriquent des sous-vêtements aux femmes bouddhistes qui les rendent fertiles. Une façon de les dénoncer et de les poursuivre.
Que ce soit en Inde, en Chine, en Birmanie ou au Sri Lanka, il n’est pas bon d’être musulman. La violence d’Etat s’exerce publiquement contre toute résistance culturelle. Et tout cela dans le silence et l’indifférence.
C’est une guerre menée conjointement en Asie contre l’islam et les musulmans. Et personne ne vient à leur secours. Certes, il y eut quelques articles dans la presse française pour révéler la brutalité de cette répression qui, apparemment ne gêne aucun Etat des pays du Golfe qui ont des intérêts économiques énormes avec la Chine et l’Inde.
Il est révolu le temps où le respect des valeurs, des droits de l’homme, de l’intégrité physique et morale, le respect de la culture et de la religion prévalaient dans des pays dits civilisés.
L’arrivée sur la scène internationale d’un Donald Trump a libéré et même légitimé une forme de racisme et de violence un peu partout dans le monde.
L’arrivée du coronavirus, qui n’a épargné aucun pays et qui n’a fait aucune différence entre les religions, entre la couleur de la peau, entre la puissance et la misère, fait réfléchir à ce monde brutalisé par des dirigeants qui ont perdu toute notion de valeur humaine. Peut-être, et je reste prudent, peut-être qu’après cette pandémie, l’homme prendra le temps de corriger ses erreurs, de tout faire pour éviter des désastres et de renouer avec une solidarité minimale qui fait que nous sommes tous sur le même bateau. Je cite la dernière phrase du livre de Jean-Paul Sartre, «Les Mots» : «Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui».