Alain Pierret est un ancien élève de l'Ecole de la France d'outremer. Il a été sous-préfet au Sahara puis diplomate, notamment ambassadeur à Niamey, à Tel-Aviv, à Bruxelles et au Vatican. Nous l'avons rencontré récemment en Provence où il mène une très active retraite, publiant articles et livres*. Nous savions qu'en 1934, quand l'armée française atteignit l'oasis de Tindouf, plus d'un siècle après son débarquement en Algérie, elle constata que la prière musulmane y était dite pour le sultan du Maroc, ce qui n'empêcha pas ladite armée d'annexer purement et simplement cette région saharienne d'obédience marocaine; en revanche nous ignorions, et Alain Pierret nous l'apprend, qu'en 1961, à près de 1000 km à l'est de Tindouf, au Sahara central, la prière était dite pour Sa Majesté chérifienne…
Voici quelques-unes des réflexions de M.Pierret:
UN FAIT COLONIAL FRANCAIS ...
" Reconnaître et soutenir résolument la " république sahraouie", comme le fait Alger depuis 40 ans c'est avaliser l'annexion par le colonisateur français** de territoires sahariens historiquement marocains. Situation paradoxale... "
Rappelons que le gouvernement provisoire algérien, durant la guerre d'indépendance (1954-1962) et alors qu'il recevait une aide consistante de Rabat, avait promis au Maroc de revoir ces annexions françaises une fois l'indépendance algérienne acquise. Cette promesse fut allègrement "oubliée" par Alger après 1962...
UN GUERRIER ESPAGNOL AU SERVICE DU MAROC ...
" Peut-on parler d'"annexion" du Sahara occidental pour le Maroc au jour du retrait, en 1975, de l'administration coloniale espagnole? La réponse est simple: pendant plus de trois siècles ce Sahara fut incontestablement marocain. Le confirment les expéditions de Djouder-Pacha *** jusqu'au Niger en 1591, pour le compte du sultan saâdien Ahmed El Mansour, et l'itinéraire de l'explorateur français René Caillé, durant la décennie 1820, de Tombouctou à la côte atlantique via le Tafilalelt "
LA PRIÈRE POUR LE SULTAN...
In-Salah, est aujourd'hui un chef-lieu d'arrondissement (daïra) du département de Tamanrasset, au Sahara algérien, un arrondissement peuplé d'environ 35 000 âmes. En 1961, avant-dernière année de l'Algérie française, In-Salah était une préfecture du département des Oasis. Voici ce que nous en dit Alain Pierret:
" Au lendemain du putsch d'Alger, en avril 1961, je fus nommé par Paris sous-préfet d'In-Salah. Le district comportait à Aoulef, escale aérienne pour la traversée du désert, un important quartier des Chorfas, où le vendredi, à la mosquée, les fidèles priaient pour le roi du Maroc. Il est permis de douter que cette pratique ait pu se maintenir après l'indépendance de l'Algérie, en juillet 1962... Rappelons que cette oasis est 950 km à l'est de Tindouf ! "
LA STUPEUR DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L'ONU
" Le Péruvien Javier Perez de Cuellar , secrétaire général de l'ONU de 1982 à 1991, et hispanophone de langue maternelle, rencontra en 1985 à Addis-Abeba le chef du Polisario, Mohamed Abdelaziz. Il s'adressa naturellement à lui en espagnol, langue dispensée dans les écoles de la Saguia-el-Hamra et du Rio-de-Oro durant la colonisation de ces territoires par Madrid, et il constata que M.Abdelaziz ne comprenait pas cette langue... "
M.Perez de Cuellar ignorait que Mohamed Abdelaziz est né le 17 août 1947 à Marrakech, sous le règne de Mohamed-V et sous le protectorat français et a été étudiant à l'Université Mohamed-V. Le secrétaire général de l'ONU ne savait pas non plus que presque toute la famille de Mohamed Abdelaziz vivait ( et vit toujours en 2016 ) au Maroc non-saharien, à Kasba-Tadla, Casablanca, Agadir, etc.
Retraité des Forces armées royales, le père du chimérique président du Polisario a d'ailleurs, à notre époque, été décoré par le roi Mohammed VI...
(*) Notamment " De la case africaine à la villa romaine", L'Harmattan, Paris, 2010
(**)Une France coloniale par ailleurs inlassablement vilipendée par l'Algérie officielle, un demi-siècle après l'indépendance... (***) Génial aventurier espagnol devenu général des armées marocaines qu'il conduisit jusqu'au fleuve Niger. Il mourut en 1606.