Le Maroc rêve toujours de Coupe du monde. Ne riez pas, ce n’est pas une utopie, même si le royaume a tenté sa chance cinq fois. Cinq essais, cinq échecs, les champions de la loose.
Nous sommes comme ce candidat au bac qui échoue, échoue, mais ne renonce jamais. Et il a raison puisqu’il finit par décrocher la lune, alors qu’il est déjà au soir de sa vie. Et alors, la lune n’en sera que plus belle!
Le Maroc est un peu comme cet éternel candidat au rêve. Il remet toujours ça. C’est une forme d’optimisme. Avec suffisamment de naïveté et de bonne foi pour y croire encore et s’accrocher.
Dès qu’il a appris son échec pour l’organisation de la Coupe du monde 2026, le Maroc a donc annoncé sa candidature pour 2030, indifférent aux regards moqueurs ou compatissants du reste du monde.
Je répète, il a raison!
Mais en 2030, le monde sera différent. La coupe du monde aussi, qui sera passée à 48 équipes, au lieu de 32 actuellement. Un seul pays, aussi puissant soit-il, n’y arrivera pas. Il lui faudra de l’aide. En 2022, les Etats-Unis ne vont pas y aller seuls mais accompagnés du Canada et du Mexique.
Pour 2030, le Maroc sait qu’il lui faudra s’associer à d’autres pays. Mais lesquels? C’est là que l’histoire devient plus intéressante.
Dans l’absolu, nous avons deux formes d’associations possibles : horizontale avec le Maghreb, verticale avec l’Europe. Chacune de ces possibilités possède des avantages et des inconvénients. Nous allons examiner tout cela rapidement.
En allant vers nos «frères» algériens et peut-être aussi tunisiens, nous faisons un choix de cohérence culturelle et humaine. Politiquement, nous jouons la carte d’un Maghreb uni. Ce qui passe, bien entendu, par le règlement tant et tant de fois repoussé du dossier Sahara. Entre autres. Parce qu’il faut aussi inclure l’ouverture des frontières, la suppression des visas, peut-être aussi la recherche d’une monnaie unique ou de grands accords financiers entre les trois pays.
Fermez les yeux et imaginez alors ce rêve de Maghreb United. Une terre enfin unie. Et par la grâce du football et de la coupe du monde qui, au-delà de l’aspect logistique, et des manigances financières et politiques, reste d’abord un extraordinaire élan de jeunesse, de fraicheur, de partage, et de vie.
En donnant la coupe du monde à ce Maghreb-là, le monde aura alors fait un geste de paix et de gratitude magnifique. Le fera-t-il ? Peut-être que oui, pour les raisons que l’on vient de voir. Et peut-être que non parce que cet ensemble-là, aussi sympathique soit-il, ne pèsera pas bien lourd, économiquement surtout, devant la concurrence qui se présente (l’ensemble britannique).
Maintenant, le Maroc peut très bien choisir d’aller voir plus haut, vers le nord, pour s’associer à l’Espagne et pourquoi pas au Portugal. Pour la symbolique, c’est fort, très fort. Deux continents, deux civilisations, deux religions, deux cultures, bref deux mondes enfin réunis, réconciliés. Ce Football Club Europe ressemblerait un peu au rêve de Hassan II, qui avait tant et tant essayé d’arrimer le Maroc à l’ensemble économique européen…
Unifier le Maghreb ou jeter un pont avec l’Europe, voilà les deux choix qui s’offrent au Maroc. Vous l’avez compris, cela va au-delà du football et du sport. Ces choix, surtout s’ils sont gagnants, modifieront la géostratégie régionale et donnerait des idées à d’autres ensembles du globe, qui ont tant à gagner en unissant leurs rangs.
Bref, la sixième candidature du Maroc a du sens. Surtout si elle aboutit à un succès. Mais avant, il faudra faire le bon choix. Avec qui y aller ? Avec qui se «marier», le temps d’une (longue) campagne de candidature commune?
Il y a le choix du cœur (Maghreb) et celui de la raison (Europe). Les deux nous tendent d’ailleurs aujourd’hui la main. Ce n’est pas seulement une question d’intérêts communs et de chances de gagner. Ces questions existent bien sûr mais, derrière, il y a presqu’un choix philosophique et existentiel à faire.
Ce choix pourrait préfigurer le destin futur du royaume. Qui ira davantage vers le Maghreb auquel il appartient, ou vers l’Europe de laquelle il est (géographiquement au moins) si proche…