Un juge convoqué pour un mail adressé à la presse

Arrivée décontractée de Mustapha Ramid au meeting des magistrats du PJD

Arrivée décontractée de Mustapha Ramid au meeting des magistrats du PJD . Brahim Taougar - Le360

Revue de presseKiosque360. Un magistrat a été convoqué, le week-end, pour avoir invité la presse à couvrir l'affaire d'un juge poursuivi pour corruption.

Le 19/01/2014 à 22h02

"L'adjoint au procureur du roi auprès du tribunal d'Azilal a été convoqué par l'inspection générale du ministère de la Justice suite à un mail adressé à la presse", rapporte à sa Une Al Massae daté du lundi 20 janvier. On apprend que le juge Anas Saadoune aurait invité par mail plusieurs journalistes pour couvrir la prochaine audience du juge Najib Bakkach. Pour rappel, ce magistrat de Tanger avait été accusé, en mai 2012, de corruption suite à une plainte déposée par un homme d'affaires tunisien. Bien que Bakkach ait été libéré après un court passage en prison, son affaire est toujours entre les mains de la justice.

En tant que membre du comité de défense du juge, Saadoune, adjoint au procureur et chargé de la communication du Club des juges du Maroc, a pris l'initiative de convier la presse à assister cette audience, l'occasion "de prendre le point de vue de la défense", précise le journal. La réaction du ministère de tutelle ne s'est pas faite attendre. "Saadoune a été interrogé vendredi par l'inspection du ministère de la Justice", précise Al Akhbar.

Bras de fer

Pour Yassine Moukhli, président du Club des magistrats, "c'est une première dans les annales de la justice marocaine, voire même mondiale, qu'un magistrat soit interrogé pour avoir eu un échange de mails avec la presse". S'indignant d'une telle "manipulation de la justice", indique Al Akhbar, le Club des juges accuse le ministère de "tenter d'exercer une pression sur la défense de Bakkach". Or, pour Saadoune, il s'agit là d'un principe constitutionnel relevant du droit d'accès à l'information. Dans une déclaration au quotidien, le juge conclura que "le contact avec la presse ne va pas à l'encontre de la déontologie". Sur les colonnes d'Annass, Saadoune dénonce sa convocation par l'inspection générale du ministère de la Justice. A en juger par ses propos, il n'a pas eu l'occasion de connaître le motif de sa convocation. Ce qui, selon le juge, est une atteinte flagrante au droit de la défense.

En attendant le verdict du ministère de la Justice dans cette affaire, force est de constater que la guéguerre entre le département de Mustapha Ramid et les magistrats n'est pas prête de se calmer. Après que ces derniers ont, une fois de plus, menacé d'observer une grève, et malgré l'augmentation des salaires annoncée par le ministère de la Justice, voilà qu'une nouvelle grogne se prépare. L'affaire du juge Bakkach ne date pas d'hier et la presse a déjà eu l'occasion de suivre l'évolution du dossier. Comment concilier la liberté d'informer et le respect du secret professionnel ? La question mérite sérieusement d'être posée, surtout à l'aube d'une réforme de la justice qui risque de traîner si ministère de la Justice et magistrats ne trouvent pas un terrain d'entente.

Par Sophia Akhmisse
Le 19/01/2014 à 22h02