Quota réservé aux familles défavorisées: les écoles privées font la sourde oreille

Un projet de décret en cours d’examen prévoit d’imposer aux établissements scolaires privés de réserver 15% de leur capacité d’accueil à des élèves issus de familles défavorisées, en situation de handicap ou sociale particulière, à partir de la rentrée 2025-2026. DR

Revue de presseUn projet de décret en cours d’examen prévoit d’imposer aux établissements scolaires privés de réserver 15% de leur capacité d’accueil à des élèves issus de familles défavorisées, en situation de handicap ou sociale particulière, à partir de la rentrée 2025-2026. Une mesure qui suscite l’ire du secteur. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Al Ahdath Al Maghribia.

Le 09/07/2025 à 19h30

C’est une mesure qui suscite remous et levée de boucliers dans un secteur habitué à naviguer hors des eaux troubles de l’équité sociale. Le projet de décret gouvernemental, qui impose aux établissements scolaires privés de garantir 15% de gratuité en faveur des élèves issus de milieux défavorisés, en situation de handicap ou sociale particulière, ne passe pas. Réunies récemment à Casablanca, les principales associations professionnelles du secteur ont fait part de leur «inquiétude» et de leur «refus catégorique», dénonçant une initiative «prise sans concertation», indique le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans son édition du jeudi 10 juillet.

Pourtant, la réforme s’inscrit dans l’esprit de la loi-cadre 51-17, censée instaurer une école inclusive et accessible à tous. Dès la rentrée scolaire 2025-2026, les écoles privées devront réserver une part de leur capacité d’accueil à ces publics fragiles: 30% pour les familles précaires, 30% pour les élèves en situation de handicap, et 40% pour d’autres cas sociaux spécifiques, avec une marge d’ajustement en fonction des demandes.

Ce que le ministère présente comme une mesure de justice sociale est perçue par les représentants du privé comme un «coup de force». Ceux-ci dénoncent une concertation «oubliée», accusant le ministère de contourner la commission mixte créée en 2023, pourtant censée être l’espace de dialogue privilégié entre les deux parties. «Le ton est monté au point de pousser ces associations à créer une cellule de crise pour suivre l’évolution du dossier, appelant à une suspension de toute réaction en attendant le sort du texte au niveau du Secrétariat général du gouvernement», écrit Al Ahdath Al Maghribia.

Mais derrière ce discours corporatiste, une réalité dérangeante affleure. Le secteur privé, qui s’est largement épanoui sous l’effet d’une classe moyenne en quête d’alternatives à l’école publique, peine à assumer un minimum de responsabilité sociale. Alors que ces établissements tirent profit d’un marché éducatif en pleine expansion, certains semblent refuser l’idée même de contribuer, ne serait-ce que modestement, à l’effort de solidarité nationale.

Avec plus d’un million d’élèves scolarisés dans le privé et des frais de scolarité souvent inaccessibles pour les familles à faibles revenus, le modèle économique du secteur repose sur une logique de rentabilité, souvent déconnectée des missions d’intérêt général. Le refus d’accueillir gratuitement 15% d’élèves en difficulté, ce qui reviendrait à un élève sur sept, en dit long sur les priorités de certaines écoles.

Le ministère, pour sa part, entend aller jusqu’au bout. Le projet de décret, qui exclut les établissements n’exploitant pas plus de 50% de leur capacité, prévoit également une transmission annuelle des listes des bénéficiaires, selon des critères définis par arrêté. De plus, la contribution à la gratuité devra désormais figurer dans l’autorisation d’ouverture des établissements scolaires.

Par La rédaction
Le 09/07/2025 à 19h30