Tenu désormais à huis clos, le procès du très médiatique Taoufik Bouachrine, le directeur d’Akhbar Al Yaoum accusé entre autres de viols, de violences et de traite d’êtres humains, se poursuit. Le caractère secret des auditions -la chambre criminelle de la Cour d'appel de Casablanca ayant décidé la semaine dernière que le public n’avait plus le droit d'accès à la salle d’audience- fait que le procès prend des allures d’alcôve. Et à chaque audience, de nouvelles révélations ajoutent du grain à moudre à un feuilleton qui s'annonce bien long. Les dernières en date ont été livrées lundi 14 mai. A leurs lueurs, le procès sur fond d’agressions sexuelles filmées par l’accusé devient un véritable roman d’espionnage avec force détails sexuels.
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Le plus marquant des témoignages d'hier reste celui de Widad Melhaf, victime présumée de Taoufik Bouachrine. Si cette journaliste d’Akhbar Al Yaoum et ancienne militante au sein du mouvement du 20 février avait déjà révélé avoir été agressée sexuellement par le concerné, et ce, dès janvier 2015, hier lundi, elle a révélé que le sexe était aussi un moyen de chantage qu’utilisait Bouachrine contre elle. C’est ainsi, d’après ses dires devant le juge, que Bouachrine exerçait une pression sur elle, lui confiant des missions aussi difficiles que glissantes. A commencer par des enquêtes sur l’entourage du roi Mohammed VI et, en particulier, sur ses conseillers.
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Plus que des pressions relevant du domaine professionnel, et toujours selon la plaignante, Taoufik Bouachrine «utilisait» sa victime pour se rapprocher de certaines sphères et personnalités. Réputé proche du Parti justice et développement (PJD), Taoufik Bouachrine n’a jamais caché ses affinités avec le mouvement des Frères musulmans égyptien et ses ramifications ici et là. Et c’est à ce titre qu’il a suggéré à la journaliste de se marier avec le directeur du site Al Arabi Al Jadid, basé à Londres et appartenant au puissant groupe média éponyme… avec simple lecture de la Fatiha. Aussi bien le support en question que son directeur sont connus pour être proches des Frères musulmans et d’entretenir des liens étroits avec eux dans les pays où ils exercent une influence, à commencer par la Turquie et le Qatar.
De cette audience, on retiendra également les tentatives menées par la défense de Bouachrine de prendre en défaut les plaignantes par des questions qui laissent entendre qu’elles étaient consentantes ou ont éprouvé du plaisir dans leurs relations qui ont eu pour théâtre le bureau de Bouachrine. Les détails les plus intimes leur ont ainsi été demandés pour chercher à les déstabiliser et faire croire à un complot. Une idée difficilement admissible compte tenu de la position de force de l’accusé au moment des faits.