Elle figure parmi les présumées victimes de Taoufiq Bouachrine, le directeur d’Akhbar Al Yaoum et principal accusé dans le scandale de viols et violences à répétition contre ses collaboratrices, le tout étant documenté par 50 vidéos à caractère pornographique. Si auparavant elle affirmait être bel et bien une victime, depuis peu, Amal Houari se rétracte et nie avoir eu une quelconque relation avec l’accusé.
Relativement discrète jusque-là, elle vient ce vendredi 13 avril de jeter un véritable pavé dans la mare en publiant sur sa page Facebook une lettre qu’elle dit avoir adressé au roi Mohammed VI et transmis à cette fin au cabinet royal. Au sérieux souci que pose la manière s’ajoute celui, bien plus sérieux, le fond et la nature de la demande d’Amal Houari.
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Amal Houari a publié sa lettre ne sachant même pas si celle-ci a atterri chez le souverain. Comment peut-on rendre publique, et de la manière la plus large possible, à savoir à travers les réseaux sociaux, une lettre au caractère privé, et donc confidentielle? Comment peut-on déposer une lettre au cabinet royal dans l'après-midi et la rendre publique une heure plus tard? Que cache cette manœuvre inhabituelle consistant à s’adresser sur un ton personnel au chef de l’Etat et d’afficher le contenu des doléances 60 mn plus tard sur Facebook? A qui s’adresse cette lettre? Au roi du Maroc? Aux réseaux sociaux? Aux avocats de Bouachrine? En tout cas, celui à qui elle est en apparence adressée n’est pas son destinataire, dans la mesure où Amal Houari n’a même attendu qu’il la reçoive pour la poster sur Facebook, avec les tambours battants du journal et du site d’information de Bouachrine.
Amal Houari et son conseil ne devraient pas prendre les gens pour des crédules. Quand on adresse une lettre au roi, on attend la suite qu’il va lui donner. On ne s’empresse pas de la rendre publique dans la foulée. Cela s’appelle une manœuvre. Quel en est l’objet? Fournir à la défense de Bouachrine un argument supplémentaire pour fragiliser la voix des autres plaignantes et porter l’opinion publique à croire que le procès de Bouachrine est d’ordre politique. Ceci, tout en jouant la carte de l’émotion par un cri de détresse à l’adresse non pas du souverain mais de l’opinion publique. Un cri dans lequel on n’hésite pas à utiliser ses enfants, et Amal Houari les cite dans sa lettre.
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Dans le fond, ce que demande Houari au roi, c’est d’intervenir dans le cours de la Justice en la dispensant de comparaître devant le juge. Motif? Ce n’est pas elle qui a accusé Bouachrine de quoi que ce soit, c’est la BNPJ qui l’a poussé à le dénoncer et à cause du scandale né depuis, sa vie et celle de ses proches est un enfer. Mais les faits sont têtus. Oui, Amal Houari ne s’est pas rendu de son plein gré à la BNPJ et n’a pas délibérément porté plainte contre Bouachrine. Elle a effectivement été convoquée à la BNPJ, mais ce qu’elle oublie ou omet de dire, c’est que sa convocation entre dans le cadre d’une enquête relative à des enregistrements vidéos perquisitionnés dans le bureau de l’accusé. Deux de ces vidéos la mettent en cause. Il est par conséquent normal qu’elle soit interrogée sur les conditions dans lesquelles elle a été filmée à son insu, le 10 octobre 2016, dans le bureau du directeur de la publication de Akhbar Al Yaoum.
Si Amal Houari est aujourd’hui à la barre, c’est pour répondre de ces deux enregistrements vidéo compromettants.
D’habitude, quand on sollicite le roi, c’est pour réparer une injustice ou venir en aide à personnes se trouvant dans le besoin. De là à ce que le souverain agisse contre le déroulement d’un procès en cours et d’une Justice que l’on veut indépendante? Amal Houari demande au roi de la dispenser de se présenter au tribunal. On se frotte presque les yeux pour le croire. Mais l’intéressée peut très bien s’adresser au tribunal ou charger son avocat de cette requête. Pourquoi veut-elle assigner la charge d’un secrétaire greffier au chef de l’Etat ? Pourquoi le roi du Maroc devrait s’immiscer dans une affaire de justice qui suit son cours et où l’accusé a droit à la présomption d’innocence!
Dans sa lettre, Amal Houari dit être victime d’une salve de critiques et autres insultes de la part d’une presse malveillante, des réseaux sociaux et d’avocats féroces. Ce qu’elle ne sait pas, c’est que la Justice existe aussi pour réparer les torts qu’elle peut subir et qu’elle peut la saisir pour dénoncer et punir ses calomniateurs. Cela s’appelle lancer des poursuites. Sa démarche pose donc plus d’une question et au chapelet de maladresses que sa lettre contient s'ajoute une manœuvre qui vise à discréditer les autres plaignantes et à fournir à la défense de Bouachrine un motif pour crier au procès politique.