9h du matin, Place de la Victoire à Casablanca. Les manifestants affluent de tous les côtés pour rejoindre cette place dont le nom (Anasr) a une symbolique très forte pour une marche qui se veut nationale. "La marche nationale de protestation pour la défense du pouvoir d’achat, de la dignité, de la liberté et de la justice sociale", organisée par trois syndicats (FDT, CDT, UMT), ne semble pas prête pourtant à démarrer. L’ambiance à première vue est bon enfant aux allures d’un festival syndical. Cela chante des slogans, on bat des tambours et on rigole. Les leaders des trois centrales syndicales brillent dans un premier temps par leur absence, la marche prendra du retard au risque de tout remettre en cause.
Avant même le départ, la marche part dans tous les sens. Plusieurs groupuscules se forment, diluant le message commun en faveur de plusieurs slogans. "Arrêtez le Tcharmil politique !", "Ne touchez pas aux retraites !", "A bas le gouvernement, l’Istiqlal et El Himma !" … De jeunes militants seront même embarassés par nos questions. Ils seront dans l’incapacité de justifier leur présence. Au cours de la discussion, ils se feront même censurer par l’un des membres qui orchestrent la marche.
Vers le coup de 10h30, Miloudi Moukharik, SG de l’UMT, fait son apparition, donnant ainsi le coup d'envoi de la marche. Au même moment, à un jet de pierre, Noubir Amaoui allait tout abandonner à cause de son état de santé, entouré de sa garde rapprochée, prête à toutes les violences pour garder la foule à bonne distance. Les masses ayant répondu à l’appel des centrales syndicales, entameront dès lors leur marche, encadrées par des boucliers policiers hors normes. Toutefois, c’est la cacophonie qui règne. La marche devient presque une promenade dominicale. Les motivations personnelles prennent le dessus. Des groupes de marcheurs avancent, d’autres s’arrêtent au niveau de la place Mohammed V.
Réussite ou échec ? Difficile de trancher. L’appel à la marche a réussi certes à brasser du monde: 300.000, selon un communiqué conjoint des trois centrales syndicales, mais après ? Un vent de discorde soufflait au sein même de l’organisation qui a perdu le contrôle de sa marche et de ses revendications. Reste à suivre la réaction du gouvernement. Pour rappel, Abdelilah Benkirane a convoqué les trois centrales syndicales pour une réunion le 15 avril.