Il était rare qu’une femme veuve ou divorcée se remarie et garde ses enfants. Divorcée, elle est récupérée par ses parents ou un frère. Sinon, l’oncle maternel. D’où l’adage adressé aux maris: «Si tu la chasses, pas besoin de lui indiquer la maison de ses oncles maternels».
Pour des raisons économiques, souvent la divorcée revenait dans sa famille en laissant les enfants à leur père. Que de femmes subissaient le calvaire avec l’époux et sa famille, car elles savaient que leur propre famille n’accepterait pas leurs enfants!
Une femme divorcée ou veuve devait être remariée: c’est une bouche à nourrir et, n’étant plus vierge, elle menace l’honneur de sa famille.
Femme de deuxième main, elle se contentait d’un veuf ou divorcé, affaibli par l’âge ou la maladie, avec enfants à charge.
L’homme impose ses enfants à une nouvelle épouse, mais pas la femme, car il refuse de nourrir les enfants d’un autre homme.
Les familles recomposées étaient donc rares, plus fréquentes en milieu rural car les enfants des épouses représentaient une main-d’œuvre précieuse.
Aujourd’hui, divorcées ou veuves avec enfants, les femmes ne trouvent pas d’époux célibataires. Même si des hommes le veulent, leurs familles s’y opposent.
Reste des veufs ou divorcés ayant des enfants à charge.
Beaucoup d’hommes évitent d’épouser des célibataires parce qu’ils refusent d’avoir d’autres enfants.
Pour eux, une maman peut avoir une meilleure relation avec les enfants d’un autre. Les épouses y trouvent également leur compte. Rim: «Mon mariage est réussi car mon mari accepte mes filles. Je m’occupe bien de ses enfants et il me le rend bien. Il pense que s’il se comporte mal avec mes enfants, je maltraiterais les siens.»
La cohabitation est harmonieuse si les règles sont tracées clairement dès le départ et que le couple est soudé. Zaina: «Au début, nous avions convenu que les décisions concernant les enfants doivent être les mêmes. Aucun de nous ne doit céder à ses propres enfants. Quand les enfants comprennent que le couple constitue un bloc, ils font attention.»
Les problèmes se posent lorsque l’épouse ou l’époux favorise ses enfants.
Les enfants sont rusés. Amal: «Quand tout va, ils sont corrects. Si tu sévis, ils pleurnichent en disant que leur maman ne leur aurait jamais fait ça.»
Certains enfants jouent sur cette situation pour amadouer le père ou la mère: «Quand mon mari gronde mes enfants, ils me disent qu’ils veulent vivre chez leur père. Dès le début, ils sont compris que pareille stratégie ne marcherait pas. Si j’avais cédé, j’aurais brisé mon couple.»
La relation entre les enfants des époux est délicate. Le couple classique unit 2 familles: celle de l’époux et celle de l’épouse. La famille recomposée unit 4 familles: celle de l’époux, celle de l’épouse, celle de l’ex-épouse et celle de l’ex-mari. Toutes s’impliquent dans l’éducation des enfants. Rim: «Vous instaurez des règles. Mais quand les enfants reviennent d’un séjour chez leur père ou leur mère, ils sont métamorphosés.» Surtout quand l’ex-conjoint est en conflit avec son ex. Il ou elle remonte les enfants, leur fait douter de l’affection du beau-père ou de la belle-mère.
Le couple se choisit, mais les enfants sont étrangers au choix et doivent gérer leur relation avec le beau-père ou la belle-mère et des enfants étrangers.
Le dialogue semble réduire les conflits: «J’ai bien préparé ma fille avant mon mariage et mon mari en a fait de même avec son fils.»
Il faut de la patience et de l’habileté pour créer l’harmonie entre les enfants: «Son fils me traque: si je suis douce avec ma fille, il devient agressif. Il boude et se plaint à son père. Je reste vigilante. Je lui donne beaucoup d’affection et de l’écoute, ce qui l’a sécurisé.»
La jalousie des enfants est un obstacle au bonheur du couple: «Ils surveillent la relation de leur père avec mes enfants et lui reprochent de ne pas les aimer.»
La naissance d’un enfant du couple peut être problématique et susciter la jalousie des autres enfants qui voit leur père ou leur mère accorder plus d’attention au nouvel enfant.
Selon les femmes, la réussite de ces unions dépend surtout d’elles car elles passent plus de temps avec les enfants et se chargent de leur éducation. Ce qui se complique si le père refuse que son épouse sévisse avec ses enfants à lui. Une mère: «Je ne fais pas de différence entre mes enfants et ceux de mon mari. Mais il n’apprécie pas que je les punisse. Pourtant je punis les miens.»
Si le père ou la mère défend abusivement ses enfants, le couple se fissure: «Pour ménager ses enfants, je sévissais avec les miens, mais pas avec eux. Nous avons divorcé parce que je n’arrivais plus à gérer ses enfants.»
Malgré toute la vigilance, certains enfants peuvent ne pas s’entendre et provoquer la rupture. Il s’agit surtout de couples s’étant constitués alors que leurs enfants sont adolescents. Plus les enfants sont jeunes, plus la cohabitation semble sereine.
Certaines mères nous confient: «Depuis 4 ans, nous vivons avec mes deux filles et ses deux fils qui sont aujourd’hui adolescents. Ma hantise? Ils vivent comme frères et sœurs, mais sans interdit sexuel! Je reste vigilante.»
La même angoisse est vécue par des mères de garçons.
Une famille recomposée peut vivre dans l’harmonie, avec de la patience, de la tolérance, de l’organisation, de l’équité entre les enfants. Des familles de plus en plus nombreuses puisque le taux de divorce augmente.