Tahar Ben Jelloun est un auteur fracophone dont la langue maternelle est l' arabe. Tour à tour écrivain, poète et peintre, il a reçu en 1987 le prix Goncourt pour “La nuit sacrée”. En 2008, il devient membre de l’Académie Goncourt. Son secret: le choix de sujets qui touchent la vie quotidienne et les maux dont souffre la société.
Respecter une femme, c'est pouvoir envisager l'amitié avec elle ; ce qui n'exclut pas le jeu de la séduction, et même, dans certains cas, le désir et l'amour. Éloge de l'amitié
C'est formidable les gens qui ont des certitudes, qui ne doutent jamais. Ce sont des gens en béton. Mais il faut se méfier du béton. La moindre fêlure dans le mur peut entrainer la chute de toute la maison. L'auberge des pauvres
C'est très important le rire, il brise le mur de la peur, de l'intolérance et du fanatisme. La Nuit sacrée
Je n’ai pas l’air d’aimer les couleurs parce que mes enfants m’ont souvent reproché de m’habiller toujours en gris. Mais au fond j’adore les couleurs du printemps, les couleurs naturelles, je n’ai pas besoin de les porter sur mon dos, les couleurs sont dans ma tête, elles font de la musique quand ma tête est fatiguée, elles ne sortent pas de moi, c’est pour cela qu’on dit que je suis triste. Etre triste, c’est être contrarié, rien n’arrive comme je l’avais espéré. Alors comme je n’y peux rien, je garde le visage fermé, et regarde le monde s’agiter comme s’il était pris par une frénésie ou une fièvre impossible à soigner. Au pays
Le premier amour est toujours le dernier. Et le dernier est toujours rêvé. Le premier amour est toujours le dernier
Il n'y a pas de choc des civilisations, il n'y a que le choc des ignorances. Le Bonheur conjugal
Etre femme est une infirmité naturelle dont tout le monde s'accommode. Etre un homme est une illusion et une violence que tout justifie et privilégie. Etre tout simplement est un défi. Je suis las et lasse. S'il n'y avait ce corps à raccommoder, cette étoffe usée à rapiécer, cette voix déjà grave et enrouée, cette poitrine éteinte et ce regard blessé, s'il n'y avait ces âmes bornées, ce livre sacré, cette parole dite dans la grotte et cette araignée qui fait barrage et protège, s'il n'y avait l’asthme qui fatigue le cœur et ce kif qui m'éloigne de cette pièce, s'il n'y avait cette tristesse profonde qui me poursuit ... J'ouvrirais ces fenêtres et escaladerais les murailles les plus hautes pour atteindre les cimes de la solitude, ma seule demeure, mon refuge, mon miroir et le chemin de mes songes… L’enfant de sable
L'absence est une ride du souvenir. C'est la douceur d'une caresse, un petit poème oublié sur la table. Moha le fou, Moha le sage
Quand une amitié est bafouée, rien ne peut la reconstituer. Tandis que les blessures d'amour - du désir, de la sexualité - peuvent se cicatriser, celles de l'amitié sont éternelles, définitives. Eloge de l'amitié
Les livres sont des amis, rarement encombrants, toujours là, bien sages, sans réticence, sans faire de bruit ; je tends la main et un des livres s'ouvre, il m'emmène loin, je lis et je rêve, je lis et je voyage. Je ne conçois pas une maison sans livres. Même en prison, je sais qu'il y a des livres. Alors, les livres c'est comme ma respiration. Quand un livre a été mal fagoté, mal écrit ou écrit sans passion, bref un livre inutile, il faut le mettre hors de la maison, dans la cave par exemple, mais j'ai du mal à m'en débarrasser. Vive les livres, et surtout ceux qui nous apportent la poésie dont nous avons besoin pour vivre et ne pas totalement désespérer. Entretien