On reproche souvent aux journalistes de ne parler que de ce qui va mal, de ne s’intéresser qu’aux famines, aux catastrophes et aux crimes alors que le quotidien des hommes est, en général, plutôt paisible. A ce reproche les journalistes ont beau jeu de répondre : « Les trains qui arrivent à l’heure, ça n’intéresse personne. »
Je me souviens à ce propos d’une histoire amusante qui s’est passée il y a quelques années. J’habitais alors en Angleterre. Le prince Charles venait de se plaindre publiquement, lui aussi, de la tendance qu’a la presse de ne s’intéresser qu’à ce qui ne va pas. En réaction, les rédacteurs en chef des principaux quotidiens du pays avaient confectionné un numéro spécial, unique, destiné au prince, et dans lequel ils faisaient la liste des trains qui étaient arrivés à l’heure ce jour-là, la statistique des Anglais qui n’avaient eu aucun accident, la météo des coins les plus tranquilles du pays, bref : un collector’s item, mais qui était du coup le journal le plus ennuyeux de l’Histoire…
On n’est pas obligé d’aller jusque-là. Mais je tiens quand même cette semaine à envoyer quelque chose de positif de Hollande. Voici : le musée des Tropiques ou Tropenmuseum (qui se trouve à un jet de pierre de chez moi) vient d’ouvrir une exposition, samedi dernier, entièrement consacrée au Maroc. Sous le nom de ZieZo Marokko, ce voyage dans l’Empire chérifien a une première particularité : il va durer jusqu’au printemps 2018 ! Elles sont rares, les expos qui durent deux ans… L’idée est que, pendant tout ce temps-là, des écoliers viennent de tous les coins des Pays-Bas pour faire un tour virtuel dans ce pays qui a plus d’importance qu’ils ne le croient dans leur vie quotidienne (à Amsterdam, un habitant sur dix est d’origine marocaine…).
Le voyage se fait en compagnie de Asmaa, Fatima, Nasredin et Youssef, des personnages qui accompagnent les visiteurs dans leur exploration, chacun représentant une route possible. Tous les sens sont émoustillés : comme disait le poète, « les parfums, les couleurs et les sons se répondent ». On peut inventer soi-même sa mosaïque, calligraphier des graffitis sur un mur, prendre part à un jeu où il faut identifier des odeurs d’épices marocaines, ouvrir sa propre boutique de caftans, etc. Le maître-mot de l’expo est celui-ci : la di-ver-si-té du Maroc ! C’est peut-être sa richesse principale…
Cerise sur le gâteau : cette exposition a été spécialement montée pour fêter les 40 ans du Tropenmuseum « Junior », c’est-à-dire de l’aile consacrée aux enfants et à l’éducation. On pouvait choisir entre deux cents pays, c’est le Maroc qui a été choisi. Quand je vous disais qu’il y a parfois de bonnes nouvelles…
Reste à souhaiter que le leader de l’extrême-droite néerlandaise, Geert Wilders, qui ne cesse de répéter qu’il y a trop de Marocains aux Pays-Bas, vienne faire un tour dans l’expo.
Reste aussi à souhaiter que notre ministère des Affaires étrangères, à Rabat, s’inspire de ce projet pour en susciter d’autres dans le monde. En Suède, par exemple ?