Les rumeurs selon lesquelles la commune de Casablanca aurait refusé de réceptionner le chantier de la Corniche de Aïn Sebaâ ont suscité une vive polémique sur les réseaux sociaux. Alimentée par une série de visuels, cette polémique met en évidence l’absence de concordance entre la maquette de l’architecte Tarik Oualalou et la réalité des travaux confiés à l’entreprise Benlhou Frères. Le montant du projet dépasse les 70 millions de dirhams.
«Les travaux ne sont pas achevés. Nous n’avons jamais demandé la réception du chantier», assure une source à Casa Aménagement, ajoutant que la livraison du projet était prévue initialement pour fin septembre 2025.
Interrogé sur la maquette du projet, riche en espaces verts alors que le site actuel n’est encore qu’un vaste terrain aride, notre interlocuteur tient à préciser qu’il s’agit d’une vision à long terme. Sa réalisation, explique-t-il, dépend notamment de l’expropriation par le Conseil de la ville de l’ensemble du foncier situé entre la promenade maritime et la route régionale 322, empruntée par les poids lourds en provenance ou à destination du port de Casablanca.

«La première phase du projet prévoit une promenade aménagée avec l’équipement minimum requis pour les estivants qui fréquentent les plages de Aïn Sebaâ et Sidi Bernoussi (sanitaires, kiosques, aires de jeux pour enfants, agrès de sport, etc.)», ajoute la même source.
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Dans son Plan d’action communal 2023-2028, la mairie avait d’ailleurs programmé un budget conséquent pour financer les opérations d’expropriation et entamer la deuxième phase d’aménagement de la corniche. «Rien n’a encore été fait et, bizarrement, aucun élu n’en parle», s’étonne-t-on du côté de Casa Aménagement, soupçonnant dans cette attaque visant la SDL une «manipulation politique à des fins purement électoralistes». Au lieu de reconnaitre sa responsabilité dans le retard, la mairie pointe un bouc émissaire: Casa Aménagement.


Visiblement déçus par l’état actuel du projet, les habitants des quartiers avoisinants n’hésitent pas à établir des comparaisons — souvent peu flatteuses — avec d’autres corniches, comme celle de Aïn Diab. «La corniche de Aïn Diab prend également la forme d’un baladoir, mais elle s’ouvre directement sur la voie, avec une vue dégagée sur l’océan. À Aïn Sebaâ, en revanche, la promenade est encerclée par des terrains privés qui obstruent la vue sur mer depuis la route côtière menant vers la cité de Zenata», déplore une source locale.
Elle poursuit: «Lorsque l’étude d’avant-projet a été lancée, le maître d’ouvrage avait demandé à l’architecte d’adopter une vision globale afin de créer un véritable espace récréatif pour la zone Est de Casablanca. L’architecte a vu large et a intégré, dans sa proposition, des terrains relevant du domaine privé. Aujourd’hui, deux options se présentent: soit les propriétaires de ces parcelles s’impliquent en développant des projets cohérents avec l’aménagement de la corniche, soit la ville engage une procédure d’expropriation afin de libérer l’espace entre la route côtière et l’océan et concrétiser sa vision d’un front maritime ouvert et accessible.»

Autre facteur ayant contribué au retard du chantier: les constructions occupées situées entre le début du tracé de la promenade et le point de jonction avec la route maritime réservée aux poids lourds, connectée directement au port de Casablanca, face au carrefour giratoire de la place Mimosas. «La ville a mis près de trois ans et demi à procéder aux expropriations nécessaires», explique notre source. «Initialement, une trémie devait être aménagée entre la route maritime et la route côtière. Mais en raison des retards cumulés, cette option a été abandonnée au profit d’une voie de surface.»
«Quand la ville a procédé à l’expropriation, au mois de mai 2024, le projet avait à peine démarré. Ce n’est qu’à partir de ce moment que nous avons pu installer les quatre kiosques de la place Mimosas, ainsi que la passerelle métallique qui traverse la voie des poids lourds», souligne-t-on du côté de Casa Aménagement.
Panneau de signalisation interdisant la circulation à moto ou à vélo dans la promenade. (A.Gadrouz/Le360)
Par ailleurs, le projet était confronté à un autre problème, lié cette fois-ci à l’existence d’une décharge sauvage à ciel ouvert, remplie de déblais de construction, sur le tracé de la promenade, dans la zone relevant du territoire de la commune de Sidi Bernoussi. Rappelons que la promenade s’étend sur une longueur de 3,4 kilomètres, dont le tiers relève de la commune de Aïn Sebaâ, les deux tiers restants dépendent du territoire de la commune voisine de Sidi Bernoussi.
«L’évacuation de ces déblais nécessitait à elle seule environ 20 millions de dirhams. Nous avons demandé à la ville de faire le nécessaire. Mais la ville n’est jamais là quand il le faut. Par conséquent, pour finir le projet, nous avons été obligés de percer un chemin au milieu des déblais», précise la même source.
Notre interlocuteur persiste et signe: le projet ne connait aucun retard. Le délai de 18 mois fixé par le maître d’ouvrage sera respecté. En principe, l’entreprise Benlhou Frères a jusqu’à fin septembre pour livrer le chantier. «Mais comme nous sommes en été, l’entreprise a reçu des ordres d’arrêt pour laisser place aux estivants. Les travaux reprendront fin août jusqu’à la fin de l’année», poursuit notre source.
Entre-temps, les terrains de beach-volley, de beach-soccer, ainsi que les agrès de sport sont déjà accessibles au grand public. Idem pour les douches et les sanitaires installés le long de la promenade. Leur gestion a été confiée temporairement aux arrondissements de Sidi Bernoussi et de Aïn Sebaâ, après que la mairie a refusé d’endosser les charges d’exploitation nécessaires pour subvenir aux besoins de première nécessité des estivants.



















