Conseil de la concurrence: les Marocains jettent 30 millions de pains par jour

Chaque jour au Maroc, près de trente millions de pains sont jetés.

Revue de presseChaque jour au Maroc, l’équivalent de trente millions de pains finit à la poubelle. Derrière ce chiffre vertigineux se cache une réalité économique alarmante, un détournement des subventions de l’État et un lourd tribut écologique, révélant une chaîne de gaspillage qui s’étend du champ à l’assiette. Cet article est une revue de presse tirée d’Assabah.

Le 09/12/2025 à 19h52

Au Maroc, le pain, symbole de subsistance et de partage, devient paradoxalement l’emblème d’un gaspillage massif. Selon les données recueillies par le Conseil de la concurrence auprès de la Fédération marocaine des boulangeries et pâtisseries (FMBP), ce sont trente millions d’unités qui sont jetées quotidiennement, un flux incessant qui s’élève à près de onze milliards par an. Rapportée à la valeur minimale de 1,20 dirham l’unité, cette négligence collective représente une perte sèche de 13,2 milliards de dirhams annuels.

«Ce phénomène ne se cantonne pas à la seule sphère domestique», rapporte Assabah dans son édition de mercredi 10 décembre. Le Conseil de la concurrence souligne qu’il parasite l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, de la production agricole à la distribution finale. Il est alimenté par des habitudes de consommation souvent excessives, une méconnaissance des méthodes de gestion des denrées, ainsi que par des traditions sociales et familiales qui, lors des fêtes, privilégient l’abondance au détriment de la raison.

Les conséquences de ce gaspillage sont profondément structurelles. Une part substantielle des subventions publiques destinées au blé tendre, visant à garantir un pain accessible aux familles les plus modestes, est ainsi détournée de son objectif social. Ces ressources, littéralement perdues, alourdissent inutilement le fardeau du système de compensation et en sapent l’efficacité.

Les pertes débutent dès les champs, où le taux de rebut frôle les 20%, imputable aux aléas climatiques, à des infrastructures de stockage vétustes et à des pratiques agricoles parfois traditionnelles. Le stockage, qu’il soit dans les dépôts de collecte (5 à 7% de pertes) ou dans les silos enterrés traditionnels (Matmoura), peut voir près de 20% de la récolte compromise par l’humidité et les nuisibles. La chaîne de distribution n’est pas épargnée, avec encore 5% de déperdition.

«Au-delà du coût financier exorbitant, ce gaspillage porte une lourde facture écologique», note Assabah. Il induit une exploitation superflue de ressources naturelles précieuses. La production d’un seul kilogramme de blé exige des centaines de litres d’eau; une énergie et une ressource vitales perdues en vain lorsque le pain qu’il devient n’est finalement pas consommé.

Par Hassan Benadad
Le 09/12/2025 à 19h52