Janvier 2009. Un communiqué du cabinet royal annonce que le roi Mohammed VI ne participera pas au sommet arabe extraordinaire prévu le même mois au Qatar, pas plus qu’il ne participera au sommet économique de la Ligue arabe, prévu immédiatement après au Koweït. Le communiqué ajoute que cette décision royale s’explique par le fait que «ces réunions tendent à mettre en avant les personnes et à reléguer au second plan les vrais problèmes», alors que la situation dans le monde arabe est «affligeante et a atteint un stade de dégradation sans précédent dans l’histoire de l’action arabe commune».
Février 2016. Sur instructions royales, le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Salaheddine Mezouar, informe le secrétaire général de la Ligue arabe que le Maroc se désiste de l’organisation du sommet arabe, prévu auparavant à Marrakech les 6 et 7 avril 2016. Un communiqué du MAEC précisera que «les conditions objectives pour garantir le succès d'un sommet arabe ne sont pas réunies» et que «le Maroc ne veut pas que ce sommet se tienne sur son sol sans apporter, pour autant, une valeur ajoutée dans le sillage de la défense de la première cause des Arabes et des musulmans, à savoir la question palestinienne…».
Fidèle à son refus constant de contribuer à l’inefficacité de la prétendue action commune arabe, le Maroc n’est plus représenté au plus haut niveau aux sommets de la Ligue arabe depuis plusieurs années. Comme l’explique l’éditorial du quotidien Al Akhbar, dans son édition de ce mardi 2 avril, le roi Mohammed VI avait parfaitement raison de bouder le 30e sommet arabe réuni à Tunis le week-end dernier, sommet qui n’a pas dérogé à la règle d’un véritable «dialogue des sourds».
En effet, ce sommet a été une nouvelle fois marqué par le même rituel des discours soporifiques, dans un «festival politique», où l’action concrète, l’efficacité et l’unité des rangs, prônées par Mohammed VI, sont le dernier souci de ses pairs arabes.
Tous les sommets arabes qui se sont succédé ne sont en fait qu’un chapelet d’échecs à répétition, écrit Al Akhbar. Echec dans la recherche d’une solution durable et définitive à la cause palestinienne. Echec dans la résolution de conflits interarabes plus récents au Yémen, en Syrie, en Libye, au Golfe. Echec dans la construction d’un marché commun arabe. Echec dans la mise en œuvre d’une stratégie arabe unique de lutte contre le terrorisme. Echec dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des Etats membres de la Ligue arabe… Et ce ne sont pas les communiqués finaux de ces sommets, qui ressassent la même terminologie en tentant de cacher les fortes divisions internes, qui diront le contraire.
Al Akhbar rappelle que le roi Mohammed VI a même réitéré sa colère contre ce genre de sommets inutiles, lors du discours lu en son nom devant le sommet arabe de Nouakchott en juillet 2016, en les comparant à la froideur du «feu d’Abraham, qui ne brûle pas». Et de conclure que Mohammed VI reste fidèle à lui-même, à sa méthode de gouvernance, à sa conception des relations internationales en refusant d’assister à ces sommets, «dominés par les sourires jaunes de ceux-là mêmes qui y sont venus pour poignarder leurs frères dans le dos».