Pourquoi le Conseil de sécurité n’a-t-il pas émis de «Déclaration» comme annoncé préalablement, au sujet de la crise entre le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, et les autorités marocaines? Cette instance décisive de l’ONU s’est limitée à émettre seulement des «Eléments à la presse», à l’issue d’une séance houleuse tenue, hier jeudi 24 mars, au siège du Conseil de sécurité.
Que s’est-il alors passé pour que le CS renonce à un "projet de Déclaration" susceptible de comporter des éléments contraignants et opte pour une formule (Eléments à la presse) qui, dans la terminologie utilisée par le CS, est d’une force moindre que la Recommandation (décision), le Communiqué, ou encore la «Déclaration»?
Il faut bien rappeler que des sources diplomatiques à l’ONU, citées par la presse accréditée auprès de cette organisation, indiquaient en début de semaine qu’un «projet de Déclaration» était en cours d’élaboration par les Etats-Unis et qu’il sera soumis à l’approbation des quinze membres du Conseil de sécurité, lors de la réunion tenue à huis clos, hier jeudi 24 mars, au siège du même Conseil.
Les connaisseurs des rouages du Conseil de sécurité savent pertinemment que les formules choisies par cette instance décisive de l’ONU constituent à elles seules un message et, dans le cas échéant, il faut bien noter que les «Eléments à la presse» émis, hier jeudi, au sujet de la crise suscitée par le SG de l’ONU avec les autorités marocaines se résument à un souhait de voir la «MINURSO reprendre son fonctionnement normal».
Quand on réalise que cette réunion s’est tenue sur insistance de Ban Ki-moon, pour ne pas parler de ses proches collaborateurs, vrais architectes de la crise avec les autorités marocaines, dont le SG adjoint aux Affaires politiques, Jeffrey Feltman (vrai patron de l’ONU), l’on peut aisément imaginer la déception du SG de l’ONU.
La France a-t-elle menacé d’opposer un veto ?Que le projet soumis à l’approbation du Conseil de sécurité, hier jeudi 24 mars, soit minoré à de simples «Eléments à la presse», au lieu du «projet de Déclaration», cela n'est pas le fruit du hasard, à l'évidence. Contactée par Le360, une source bien informée a tout d’abord fait état de «divisions» au sein du Conseil de sécurité au sujet de la formule à adopter.
Toujours selon cette source, qui a souhaité ne pas être citée, la France, épaulée par les pays représentants de l’Afrique (Sénégal) et de la Ligue arabe (Egypte), a pesé de tout son poids pour amener les autres membres du CS à renoncer audit «Projet de Déclaration» qui aurait été élaboré par les Etats-Unis.
Selon les dernières indiscrétions, la France aurait même menacé de recourir à son «droit de veto» en tant que membre permanent du Conseil de sécurité pour empêcher le Conseil d’opter pour la formule du «Projet de Déclaration». Mieux encore, il y a dans la formule adoptée, in fine, à l’unanimité des quinze membres du CS, -«Eléments à la presse»-, une critique à fleuret moucheté à l’encontre du SG de l’ONU, Ban Ki-moon.
Et ce n’est surtout pas cet appel à l’ouverture d’un dialogue serein entre le SG de l’ONU et les autorités marocaines pour déterminer les circonstances de la crise qui nous contredira. Dans ses «Eléments à la presse», la présidence mensuelle du Conseil de sécurité, assurée par l’ambassadeur angolais, Ismaël Gaspar Martins, a bel et bien souligné «l’importance de regarder d’une façon constructive, compréhensive et coopérative les circonstances qui ont mené à la situation actuelle, afin que la MINURSO puisse reprendre sa pleine capacité d’accomplir son mandat tel que fixé par les résolutions du Conseil de sécurité».
Vous avez bien lu : «Les circonstances qui ont mené à la situation actuelle», c’est-à-dire les propos tenus par le SG de l’ONU, lors de son voyage le 5 mars à Tindouf, qualifiant d’ «occupation» le recouvrement par le Maroc de son intégrité territoriale. Une critique sans équivoque du dérapage commis par le SG de l’ONU, accusé à juste titre par le Maroc d’avoir manqué à son devoir de neutralité en reprenant à son compte les allégations de la partie adverse.
La normalisation des relations entre le SG de l’ONU et les autorités marocaines passe ainsi nécessairement par sa reconnaissance de cette ineptie juridique et cette bévue politique gravissime.