Yossi Beilin est ancien ministre de la Justice et l’un des architectes des accords d’Oslo, puis de Genève avec les Palestiniens.
Dans une tribune publiée récemment sur le Haaretz après la mort de Shimon Peres, il se souvient de l’une des visites secrètes effectuées par l’ancien président et ex-premier ministre au Maroc.
Cela se passe en janvier 1981, Shimon Peres et Yossi Beilin arrivent à Marrakech sous de fausses identités.
Au Palais royal, tard dans la soirée, ils attendent le défunt monarque dans une somptueuse salle où ils découvrent un grand téléviseur. Pour contrer l’ennui, ils allument le poste, mais trouvent juste un vieil homme psalmodiant du Coran. Ils éteignent le téléviseur et demandent à l’un des collaborateurs de Hassan II s’ils pouvaient partir quelque part écouter de la musique.
La réponse est catégorique: il n’en est pas question! Il y avait risque qu’ils soient reconnus et ce serait embarrassant pour leur hôte, se souvient Yossi Beilin.
Mais juste quelques minutes plus tard, ils sont conviés dans une autre somptueuse salle où avaient été réunis une vingtaine d’artistes entre chanteurs, danseurs et musiciens.
Yossi Beilin n’en revient toujours pas, 35 ans plus tard, d’avoir été, avec Shimon Peres, la seule audience de tout un spectacle.
L’ancien président israélien, à l’époque chef de l’opposition, appréciait le spectacle, suivait le rythme avec sa tête et applaudissait énergiquement. Yossi Beilin était sous le choc, mais ne devait pas trop le montrer. «Cela ne se faisait pas quand un monarque met à votre disposition son avion privé et vous invite dans son palais», explique-t-il.
«Shimon Peres aimait la vie, il aimait la vie politique et savait apprécier les deux», conclut Yossi Beilin.
Quelque temps plus tard, le spectacle a été interrompu et les deux hommes ont compris que l’heure de rencontrer le roi a sonné. Hassan II les attendait dans une autre salle, mais Yossi Beilin ne dit pas un mot sur ce qui s’était dit lors de cette rencontre à trois.