La majorité est de nouveau dans tous ses états. Elle est, pour ainsi dire, littéralement divisée à cause de la langue amazighe. Ce qui n’est pas nouveau d’ailleurs. Mais cette fois, et sans vraiment le vouloir, c’est le PAM qui vient de semer la zizanie au sein de la coalition gouvernementale. Un amendement à l’article 57 du projet de loi 47.17 portant statut de Bank Al-Maghrib, proposé par ce parti et adopté à la Chambre des conseillers, est à l’origine de cette nouvelle divergence de positions à l’intérieur de la majorité.
L’amendement en question, qui prévoit l’introduction de la langue amazighe sur les billets de banque et sur les pièces de monnaie, a été rejeté en commission à la première Chambre à l’occasion de l’examen de ce projet de loi en deuxième lecture. En effet, sur instigation du PJD, les groupes de la majorité, en plus de l’Istiqlal, ont tous voté contre cet amendement, rappelle le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans sa livraison du week-end des 25 et 26 mai. Sauf qu’après coup, le RNI décide de se rétracter. Son président, Aziz Akhannouch, est intervenu personnellement pour rectifier le tir, faisant exploser une nouvelle crise au sein de la majorité.
Quant au PJD et à l’Istiqlal, ils ont maintenu leur position, affirme le quotidien. Ils considèrent que le changement des billets de banque est un choix stratégique et qu’il faut attendre l’adoption du projet de loi organique relatif à la mise en œuvre du caractère officiel de la langue amazighe, actuellement bloqué en commission, pour prendre pareille décision. Le RNI, lui, ne l’entend pas de cette oreille. Le groupe parlementaire RNI-UC estime que le blocage du projet de loi organique ne devrait pas empêcher une initiative qui pourrait favoriser l’amazigh et œuvrer pour la concrétisation dans les faits de son officialisation, souligne Al Ahdath Al Maghribia, citant un communiqué du groupe.
Ce faisant, le groupe formé de deux partis, le RNI et l’UC, ne mentionne cependant pas de quelconque intervention de la direction du parti dans ce changement de position, précise le journal. Il laisse ainsi entendre que sa décision de recourir aux articles 192 et 197 du règlement intérieur de la Chambre a été prise en tenant compte des orientations politiques générales des deux partis. Concrètement, en faisait appel à ces deux articles, le groupe RNI-UC demande le reversement du projet de loi en commission, la commission des finances dans ce cas, pour un nouvel examen, suivi du vote de l’article 57 et donc de l’amendement proposé par le PAM et validé par la deuxième Chambre. Pour faire aboutir cette procédure, le RNI-UC a fait appel aux autres groupes de la majorité pour le soutenir.
Notons que l’USFP, dont le groupe parlementaire avait voté en faveur de cet amendement à la Chambre des conseillers avant que ses représentants à la première Chambre ne l’invalident, aurait déjà répondu présent. Pour ce qui est du PPS, relève Al Ahdath Al Maghribia, il a diffusé un communiqué affirmant que son unique représentant au sein de la commission n’était même pas présent au moment du vote. Pour ce qui est de l’Istiqlal, souligne le journal, le chef de son groupe parlementaire, Noureddine Moudiane, a soutenu qu’il refusait de réduire l’amazigh à ce qu’il considère comme «quelques lettres que 98% des Marocains n’arrivent même pas à déchiffrer, notamment sur les panneaux de signalisation, les devantures des administrations publiques et des établissements scolaires».
De son côté, le chef du groupe parlementaire du MP a relevé que son parti n’est pas contre l’introduction de l’amazigh sur les billets de banque, mais que pour ce faire, il serait judicieux d’attendre l’adoption de la loi organique relative à la mise en œuvre de son caractère officiel.