Vendredi 20 novembre. Nous sommes à Ouled Tayma. Plus exactement, au quartier Annahda (Renaissance). Le soleil est sur le point de se coucher et «Hay l’villat» (quartier des villas) baigne dans une lourde quiétude.
Composé de plusieurs villas appartenant presque toutes à des MRE (Marocains résidents à l’étranger), ce quartier compte aussi la maison où logent plusieurs membres de la famille Abaaoud dont est issue la présumée tête pensante des attentats de Paris avec le triste et macabre bilan que l’on sait.
Dans ce quartier chic où les habitants ne vivent pas cloîtrés chez eux comme le veut la tradition des Amazighs du Souss, les gens rasent les murs. Comme s’ils portaient un pesant secret. Abdelhamid Abaaoud? «On ne sait pas de qui vous parlez», répondent d’abord les personnes que nous avons rencontrées. Il faut bien insister pour que certaines langues commencent à se délier.
Et, comme lors d’une catharsis, les gens se lâchent pour donner libre cours à leurs sentiments et raconter leur étonnement d’apprendre que celui qu’ils ont vu jouer et croquer la vie à pleines dents est le principal protagoniste des attentats du 13 novembre en France.
Les anciens copains de Abdelhamid Abaaoud se souviennent d’un garnement qui venait en famille de Belgique pour passer les vacances d’été au bled. Abdelhamid Abaaoud aimait rouler des mécaniques à Ouled Tayma et région. Il se pavanait en quad et, depuis la fin des années 1990, il se promenait chaque été dans une nouvelle moto pour impressionner la galerie. En plus de la moto, c’était un inconditionnel des jeux vidéo et il ne se séparait jamais de sa «Play» comme disent ses anciens copains dans ce quartier de MRE.
Au nom du père et du grand-père!
Le «rouijel» (le mec), comme le qualifie un ami d’adolescence, aurait mal tourné, ainsi que ses frères. Ils prenaient la voie de la délinquance. Pour les ramener sur le droit chemin, leur père, Omar, aurait décidé de les envoyer en Egypte pour des études en théologie. Une thèse difficile à vérifier puisque les sources belges et marocaines ne confirment pas l’éventualité d’un voyage des Abaaoud juniors dans ce pays.
L’équipe de Le360 est même parvenue à retrouver la trace du grand-père de Abdelhamid. Homme nonagénaire, il habite dans un immeuble non loin de la maison qu’occupe son fils, Omar Abaaoud. Mais il ne nous a été pas possible de lui parler.
Quant au père, Omar Abaaoud, qui se trouve actuellement au Maroc, il préfère se boucher les oreilles et fermer les yeux. Il ne veut rien dire. Selon nos informations, il a fui la maison de Ouled Tayma et préfère sillonner le Maroc en voiture. Comme s’il cherchait à fuir les actes d’un fils qu’il avait pourtant déjà renié avant sa mort.(Caméra et Montage: Abderrahim Ettahiry pour Le360)