La rumeur courait depuis quelques jours. Elle est confirmée. Selon Assabah, daté de ce vendredi 3 octobre, l’ancien dirigeant socialiste, Mohamed El Yazghi, a tenu, lundi 29 septembre, à Rabat, une réunion préparatoire à la refondation de l’Union nationale des forces populaires (UNFP), parti politique de gauche créé le 6 novembre 1959 d’une scission du parti de l’Istiqlal. "El Yazghi derrière l’idée de résurrection du plus grand parti opposé au défunt roi Hassan II", titre le quotidien, dans son édition de ce vendredi. Ce parti, qui n’a enregistré aucune activité depuis la mort en 2005 de son chef historique, Abdellah Ibrahim, "premier" Premier ministre sous le règne du défunt roi Hassan II, retrouve bel et bien grâce aux yeux des Ittihadis qui sont de plus en plus inquiets quant à la gestion "autocratique" de Driss Lachgar, accusé de vouloir faire de l’USFP un parti électoraliste animé par les fameux notables. Ce sont justement ces mécontents qui se sont retrouvés, toujours d’après Assabah, chez Mohamed El Yazghi, dont Ahmed Zaïdi, qui s’était présenté contre Driss Lachgar dans la course au poste de premier secrétaire, lors du 9e congrès de l’USFP organisé en décembre 2012 au Complexe Moulay Rachid, à Bouznika. L’ex-ministre socialiste Réda Chami, co-fondateur avec Zaïdi du courant "Démocratie et ouverture", et le dirigeant ittihadi à Marrakech Abdelali Doumou, y étaient également présents. Fait curieux, l’idée de remettre au goût du jour un parti de la première heure du Maroc-post-Indépendance, en l’occurrence l’UNFP, a rallumé les espoirs et promet d’attirer le plus grand nombre de militantes et de militants ittihadis.
Pourquoi aujourd’hui l’UNFP ?
Cette soudaine reprise d’espoir est-elle à mettre sur le compte de la nostalgie de la belle époque d’Abdellah Ibrahim, Mehdi Ben Barka et Abderrahim Bouabid dont l’épopée est glorieusement célébrée par El Yazghi dans son premier livre autobiographique, "Mémoire d’un militant"? La présence chez El Yazghi de Zaïdi, Chami et Doumou ne sous-tend-elle pas plutôt une volonté de faire pression sur "le bulldozer" Lachgar ? Assabah, qui dit se baser sur des sources bien informées, fait la part des deux versions. 54 ans après sa fondation, l’UNFP est restée indéfectiblement attachée à ses valeurs de gauche, ce qui veut dire que sa résurrection, à l’état actuel de l’USFP, n’est qu’un retour aux sources. Un retour précipité par la crise au sommet que connaît l’USFP depuis 2007, année à laquelle il a subi sa pire défaite électorale, mais qui s’est nettement aggravée à l’arrivée, en 2012, du très controversé Lachgar.
Lachgar face à lui-même Pour avoir challengé Lachgar, lors du fracassant congrès de 2012, Ahmed Zaïdi, alors donné favori pour succéder à Abdelouahed Radi à la tête de l’USFP, en a sans doute pris pour ses galons. Un an et quelques poussières après, il sera mis en demeure de renoncer à son poste de Chef du groupe socialiste à la Chambre des représentants. Première dans l’histoire partisane du Maroc, c’est le premier secrétaire de l’USFP qui s’improvise chef de groupe parlementaire! Un précédent qui a suscité une véritable levée de boucliers chez des députés ittihadis plutôt acquis à Ahmed Zaïdi, dont Réda Chami qui finit par claquer la porte et démissionner en 2013 du bureau politique de l’USFP, après Mohamed Achaâri, Larbi Ajoul et Ali Bouabid. La vague de défections ne s’arrêtera pas à ce stade, puisque même la FDT, bras syndical de l’USFP, en connaîtra le même sort. Après le départ de Taïb Mounchid, ancien membre dirigeant à la CDT, la FDT est actuellement dirigée de manière bicéphale. D’un côté, un SG élu légitimement, Abderrahman Azzouzi, et un autre imposé par Lachgar lui-même, Abdelhamid Fatihi. "Lachgar veut mettre au pas les militants de la FDT et transformer notre syndicat en annexe de l’USFP", s’insurge Azzouzi, dans une interview fleuve à paraître ce vendredi 3 octobre dans le quotidien Al Massae. Cette phrase explique parfaitement la grogne qui enfle à l’USFP, ou ce qu’il en reste. L’initiative de Mohamed El Yazghi, victime en 2007 d’un "putsch" organisé par son ex-disciple Lachgar, tient là. On ne la fait pas au maître El Yazghi.