La participation du Maroc, depuis une semaine, à la guerre anti-rebelles chiites Houtis, comme à celle livrée depuis l’été 2014 contre le présumé «Etat islamique» en Irak et en Syrie, fait couler beaucoup d’encre et remet sur le tapis cette question inévitable : mais pourquoi le royaume du Maroc s’engage-t-il de plus en plus militairement hors territoire national ? Assabah, dans un dossier de deux pages paru dans son édition de ce jeudi 2 avril, tente une explication à ce que l’on peut qualifier, à juste titre, de véritable projection de force du royaume. «Vigilance à l’intérieur et fermeté à l’extérieur», titre le quotidien, en livrant quelques clefs indispensables à l’intelligence du pourquoi de cette projection. Remarquant en passant que la sortie d’Assabah intervient une semaine, jour pour jour, après le lancement de l’opération «Tempête de Fermeté», menée par une coalition arabe de neuf pays placée sous commandement de l’Arabie Saoudite contre les rebelles Houtis pro-République islamique d’Iran. Elle intervient également quelques jours après que des voix se sont élevées, ici et ailleurs, pour s’interroger sur les enjeux stratégiques de l’engagement marocain hors frontières.
«Rétablissement de la légitimité au Yémen», est-elle, comme le souligne Assabah, la seule explication à l’engagement des redoutables F16 marocains dans cette campagne de bombardements contre les positions de rebelles chiites dont les accointances avec les Mollahs ne sont un mystère pour personne ? Le communiqué, diffusé par le MAEC (ministère des Affaires étrangères et de la coopération), au lendemain du lancement de cette «Tempête» de bombardements, était d’autant plus laconique qu’il ne saurait dévoiler les véritables enjeux de cette guerre dont l’objectif ne peut en aucune manière se réduire à la simple volonté de déloger des rebelles tentés par le pouvoir et «rétablir la légitimité» d'un président yéménite élu, se trouvant aujourd'hui hors de son pays en raison du chaos sécuritaire minant le Yémen.
Récapitulons : rétablissement de la légitimité du président élu, de l’ordre sécuritaire au Yémen … Voilà des raisons que les faits ne sauraient démentir.
Enjeux stratégiquesMais voilà, il y a bien d’autres raisons, souvent mises sous le boisseau, mais qui constituent, comme le souligne Assabah, le principal mobile de cette équipée militaire arabe au Yémen, comme en Irak et en Syrie, sans oublier évidemment le Liban : la poussée du «croissant chiite». Houtis, Hezbollah, Bachar Al Assad, ou hier encore, Nour al-Maliki, ne sont que les instruments de cette guerre menée par procuration au profit du régime des Mollahs d'Iran. Le danger que ce régime présente est tel qu’il s'échine à placer ses pions Houtis au pouvoir au Yémen mais aussi -et c’est dangereux- à la frontière d’un pays allié du royaume du Maroc, en l’occurrence l’Arabie saoudite, voire au-delà. Il apparaît que la sécurité de tout le Golfe arabique (et non persique, comme les Mollahs d’Iran tentent de le faire croire) se trouve en danger. D’où l’intervention du Maroc, ou encore l’Egypte, la sécurité des alliés du Golfe étant aussi la leur. Le projet de création d’une Force arabe de Défense commune, -une sorte d’OTAN arabe-, lors du 26ème Sommet arabe, se veut ainsi une riposte développée aux visées «perses» sur le monde arabe.A l’heure où les cartes géostratégiques se redistribuent, où la notion de "frontières conventionnelles" est en train de s’effacer au profit des alliances stratégiques, - en témoigne le dernier appel des pays du Conseil de coopération du Golfe pour que le Maroc se joigne à ce bloc-, il est insensé que le royaume reste indifférent.