Grandes puissances, organismes internationaux, pays voisins, proches ou lointains…Tous sont unanimes quant à la pertinence de l’appel fait par le roi Mohammed VI pour un dialogue direct et franc entre le Maroc et l’Algérie, ainsi que la création, à cette fin, d’un mécanisme politique commun pour faire se dissiper les malentendus, et avancer sur la voie de la coopération et de l’édification de l’Union du Maghreb. Aux abois, le Polisario ne sait plus sur quel pied danser.
Dernière réaction en date, et elle vaut son pesant d’or, celle de la Mauritanie, pays voisin concerné par la question du Sahara et partie prenante aux pourparlers prévus les 5 et 6 décembre prochains à Genève, au même titre que le Maroc, l’Algérie et le front séparatiste.
«Nous accueillons favorablement toute initiative et nous lui souhaitons plein succès», a déclaré le porte-parole du gouvernement mauritanien, Sidi Mohamed Ould Maham lors d’une conférence de presse tenue à l’issue de la réunion hebdomadaire du Conseil de gouvernement. «La Mauritanie encourage et souhaite plein succès à toute initiative de nature à garantir la stabilité et la sécurité de la région, ainsi que le bon voisinage», a encore souligné le porte-parole du gouvernement.
Rappelons que le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, a remis le 2 novembre dernier à Nouakchott un message du souverain à l’adresse du président mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz, précisément au sujet du Sahara.
S’il a observé le silence par rapport aux précédentes réactions, le Polisario, de son côté, est monté au créneau pour critiquer la position de la Mauritanie. Ce pays est accusé par le front d’être sorti de sa neutralité positive et de s’être exprimé prématurément, l’Algérie, soit le principal concerné, n’ayant toujours pas réagi à la proposition du roi Mohammed VI.
Si officiellement, Alger est toujours muette, la presse du voisin de l’est commence déjà à distiller quelques messages. Le principal de ceux-ci étant celui du scepticisme, et le Maroc est accusé de vouloir "bilatéraliser" la question du Sahara.
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Pour de nombreux analystes, le silence radio des officiels algériens traduit l'embarras dans lequel s'est retrouvée la classe politique dirigeante de ce pays. «Cette classe ne s'attendait pas du tout à ce que le roi du Maroc fasse une telle initiative en ce moment précis. Le timing a secoué Alger et le palais de la Mouradia», explique ainsi le politologue Mustapha Sehimi.
L'embarras d'Alger pourrait être motivé par le fait que l'appel du Maroc intervient à quelques semaines seulement de la table ronde qui va réunir, le 5 décembre prochain, à Genève, le Maroc et l'Algérie avec la participation des séparatistes, de la Mauritanie et de Horst Köhler, l'envoyé personnel du SG de l'ONU. «La main tendue du souverain a surpris par sa force, son sens et son timing», estime Mustapha Sehimi. «Alger attend et ne sait quoi faire pour le moment, sachant que la première préoccupation des officiels est actuellement liée à la question autour d'un cinquième mandat d'Abdelaziz Bouteflika à la tête de l’Etat», souligne pour sa part le politologue Moussaoui Ajlaoui.
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Des caciques du régime ont clairement affirmé, comme c'est le cas d'Abdelaziz Rahabi, ex-ministre de la Communication et diplomate, que l'Algérie officielle «ne réagira pas (pour le moment) à l'offre marocaine». Ils motivent ce silence algérien par le fait que la main tendue par le roi fait endosser, à leurs yeux, la responsabilité d'Alger à un double niveau, celui du conflit du Sahara et celui du gel des structures du Maghreb.
En attendant, les plus grands de ce monde et de nombreux pays ont applaudi la main tendue par le roi Mohammed VI. Le secrétaire général des Nations Unies est favorable à un "dialogue renforcé" entre le Maroc et l’Algérie, a affirmé mercredi dernier, à New York son porte-parole, Stéphane Dujarric. Idem pour la France, qui "a toujours appelé de ses voeux le renforcement des liens entre le Maroc et l'Algérie, qui sont des partenaires majeurs auxquels nous unissent des liens d'une densité exceptionnelle", comme l'a déclaré hier, jeudi, la porte-parole du Quai d'Orsay, Agnès von der Mühll, dans un communiqué. Elle a donc pris "connaissance avec un grand intérêt de la proposition faite par le Roi du Maroc d'un dialogue renouvelé avec l'Algérie", a-t-elle ajouté.
Un des premiers pays à réagir, l’Espagne, a quant à lui qualifié la proposition marocaine de "grande nouvelle", comme l’a souligné ce même jeudi le ministre espagnol des Affaires étrangères, de l’Union européenne et de la Coopération, Josep Borrell, sur son compte Twitter. Cette offre, a-t-il ajouté, est de nature à "renforcer la relation et l’intégration régionale entre deux pays aussi importants qui sont voisins, amis et partenaires stratégiques de l’Espagne".
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Même son de cloche auprès de nombreux pays arabes et africains. Le Qatar considère "l'ouverture des voies de dialogue entre les deux pays frères" comme la fin du conflit, soulignant la confiance de Doha dans la sagesse des deux dirigeants et leur volonté à résoudre les différends de longue date et à défendre les intérêts de leurs peuples. Le secrétaire général de la Ligue des Etats arabes, Ahmed Abou El-Gheit, s'est également félicité de l’initiative du roi Mohammed VI «pour transcender les différends entre les deux pays arabes frères et examiner les relations bilatérales».
Le discours du roi Mohammed VI, une «main tendue» à l'Algérie, est un acte de haute portée politique qui porte la marque des grands chefs d’Etat, a indiqué, jeudi à Abidjan, le ministre de l'Intégration africaine et des Ivoiriens de l'extérieur, Ally Coulibaly. «Le président Alassane Ouattara salue et se félicite de ce geste qui renseigne sur la hauteur de vue de Sa Majesté le Roi et montre l’attachement du Souverain à la paix et au dialogue», a ajouté le ministre ivoirien. En appelant à un dialogue franc et direct avec l’Algérie, le roi a «donné l’exemple à tous les leaders du monde, notamment africains», a pour sa part estimé le Médiateur de la République du Sénégal et ancien ministre des Affaires étrangères, Alioune Badara Cissé.