Au fil des 25 dernières années, le Maroc a réalisé des avancées notables concernant le Sahara marocain, sous la direction du roi Mohammed VI. Des événements diplomatiques clés, tels que la reconnaissance par les États-Unis de la marocanité du Sahara, ont redéfini les équilibres géopolitiques dans la région en faveur du Maroc. Jérôme Besnard, essayiste français («La droite imaginaire», éd. du Cerf, 2018) et enseignant en droit constitutionnel à l’Université de Paris, analyse les développements les plus marquants de cette période et leur impact sur la position internationale du Royaume.
Le360: Au cours des 25 dernières années, le Maroc a accompli de grands progrès sur la question du Sahara marocain. Quels sont, selon vous, les développements les plus marquants sous le règne du roi Mohammed VI dans ce dossier?
Jérôme Besnard: Pour SM Mohammed VI, comme pour son père, la centralité de la question des provinces du Sud est essentielle. Il y a donc eu tout d’abord la présentation du plan d’autonomie du Sahara marocain à l’ONU, en 2007, puis évidemment la reconnaissance de la marocanité du Sahara par l’administration Trump en décembre 2020. Soulignons également l’évolution positive de la position de l’Espagne dans ce dossier.
«La décision américaine obligera, tôt ou tard, l’Union européenne, pays après pays, à se positionner en faveur de la reconnaissance de la marocanité du Sahara.»
— Jérôme Besnard, essayiste français et enseignant en droit constitutionnel à l’Université de Paris.
La reconnaissance par les États-Unis et Israël de la marocanité du Sahara a marqué un tournant diplomatique majeur. En quoi ces événements ont-ils renforcé la position du Maroc?
Le monde est devenu multipolaire, mais du fait des capacités militaires et de sa puissance économique, les États-Unis ont toujours un grande influence au niveau mondial. Bien entendu, il y a l’émergence des BRICS, mais la décision américaine va obliger, tôt ou tard, l’Union européenne, pays après pays, à se positionner en faveur de la reconnaissance de la marocanité du Sahara. Quant à Israël, nul ne peut ignorer sa puissance technologique dans certains secteurs et son influence diplomatique demeure, malgré la situation actuelle à Gaza.
La France, allié et partenaire historique du Maroc, est appelée à reconnaître explicitement la souveraineté du royaume sur ses provinces du Sud. Quelle analyse faites-vous à cet effet?
Sans trahir de secrets, je suis persuadé qu’à court terme, la France va reconnaître la marocanité du Sahara. Cela dépend constitutionnellement du Président de la République, mais il se dégage un accord de la droite et du centre, du RN au parti du Président, en passant par les LR, pour que cela soit enfin le cas.
«La question du Sahara doit être envisagée au prisme des haines cultivées par le pouvoir d’Alger.»
— Jérôme Besnard, essayiste français et enseignant en droit constitutionnel à l’Université de Paris.
Le régime algérien a depuis toujours soutenu le Polisario contre le Maroc. Selon vous, pourquoi continue-t-il sur cette voie, malgré son échec?
La question du Sahara doit être envisagée à travers le prisme des haines cultivées par le pouvoir d’Alger, notamment pour mobiliser le peuple algérien qui ne profite en rien de la manne des hydrocarbures. Ces détestations sont au nombre de quatre: la France, le Maroc, Israël et l’identité kabyle, qui, elle, est reconnue au Maroc. Ajoutez-y l’intérêt géopolitique du Sahara marocain et vous comprendrez pourquoi Alger ne veut pas se dédire.
Comment voyez-vous l’évolution future des relations entre le Maroc et la France, notamment dans le contexte des récentes dynamiques géopolitiques régionales?
La France est demandeur d’une coopération plus étroite avec le Maroc sur plusieurs points: le contrôle de l’immigration, la régulation du commerce agricole et halieutique, ou encore la lutte contre le trafic de drogue. Le Maroc est un État clé pour la sécurité européenne de demain. Mais n’oublions pas la culture, à commencer par la francophonie. Je citerai aussi le poids pris par les étudiants marocains au sein d’institutions prestigieuses comme notre École polytechnique. Le Maroc se doit d’avoir une politique anglo-saxonne, mais dans un monde multipolaire, il ne doit pas oublier ce que peut encore lui apporter la France, ou l’Espagne d’ailleurs.