Vidéo. Voici ce qui fait courir le frère du président algérien, Saïd Bouteflika

AFP

Resté longtemps dans l'ombre du président de la république, dont il est le conseiller personnel et néanmoins le frère, Saïd Bouteflika non seulement sort de sa réserve due à la nature de sa mission mais occupe de plus en plus l'espace public algérien. Décryptage.

Le 29/08/2017 à 14h30

Saïd Bouteflika n'en rate pas une pour se mettre en avant et faire parler de lui. Après sa participation le 3 juin au sit-in de solidarité avec l'écrivain Rachid Boujedra, humilié par "Ennahar.TV", réputée pourtant proche du clan présidentiel, son apparition aux funérailles du résistant Réda Malek, le 30 juillet dernier, au cimetière El Alia, à Alger, où il s'est affiché publiquement aux côtés d'Ali Haddad, patron du Forum des chefs d'entreprises (FCE), envers et contre Abdelmajid Tebboune, débarqué suite à un litige avec ce dernier, revoilà Saïd Bouteflika qui fait parler de lui à travers un "hommage intrigant" qui lui a été récemment rendu par une association oranaise, en présence des autorités de cette wilaya algérienne. "Cet hommage, dont des images et vidéos ont largement fait le tour des réseaux sociaux, est d'autant plus intrigant qu'il s'est fait en présence des autorités locales, à commencer par le wali d'Oran", pointe "Algérie Focus". "Le wali s'est même laissé aller au jeu des photos et vidéos. Il a posé avec des "diplômes d'honneur" portant l'effigie du conseiller à la présidence de la République", s'exclame notre confrère algérien.

"Même si des sources de l'association (La Radieuse, pour ne pas la nommer), habituée à rendre hommage à tous les représentants du pouvoir, expliquent qu'il s'agit "d'un hommage innocent", il y a lieu de s'interroger sur le timing d'une telle initiative. S'agit-il du top départ de la campagne pour imposer le frère du chef de l'Etat comme successeur de son frère? Ou s'agit-il juste d'un coup de brosse d'une association qui est entièrement acquise à la cause des Bouteflika?", s'interroge encore notre confrère.

Une interrogation qui en appellerait une autre: pourquoi Saïd Bouteflika se fait très visible au moment où son frère, président de la république, disparaît complètement des écrans radar? Des apparitions ubuesques qui interrogent la fonction même de conseiller de la présidence, tenu naturellement à l'obligation de réserve et de discrétion.

Il en ressort que ces apparitions non seulement violent cette obligation que le conseiller personnel de la présidence faisait sienne, même s'il était de notoriété publique qu'il était, sinon le véritable détenteur du pouvoir décisionnaire, du moins la courroie de transmission desdites décisions censées être prises par le chef de l'Etat.

Les indicateurs provenant du palais El Mouradia, troqué par le président contre une résidence médicalisée à Zéralda, en banlieue algéroise, convergent vers ce troublant constat: c'est Saïd Bouteflika qui est aux leviers de commandes depuis 2013, année à laquelle le chef de l'Etat algérien a subi un accident vasculaire cérébral (AVC), diagnostiqué à l'hôpital militaire Val-de-Grâce, à Paris. L'indicateur le plus récent, est celui de la prise de position par le "frangin" Saïd en faveur du patron des patrons algériens, Ali Haddad, dans le bras de fer qui l'a opposé dernièrement à Abdelmajid Tebboune, débarqué quatre-vingt jours après sa nomination en tant que premier ministre par le président de la république. Une décision signée Abdelaziz Bouteflika mais dont l'instigateur n'était autre que son frère cadet, Saïd. Une décision qui a été prise sur la base de la règle qui a toujours présidé au choix des hommes sous le règne des Bouteflika: "les copains, d'abord"!

Ces indicateurs ont poussé nombre d'observateurs, à Alger comme ailleurs, à s'interroger sur la capacité du président Bouteflika à diriger (encore) l'Algérie. Une incapacité que met en évidence la disparition du chef de l'Etat de toute activité publique, à la faveur d'un vide institutionnel sidérant. C'est ce qui a incité des partis de l'opposition aussi, notamment "Jil Jadid" de Soufiane Jilali, à appeler à l'application de l'article 102 de la Constitution algérienne stipulant la destituion du président en raison de son incapacité à exercer ses fonctions présidentielles.

Aux leviers de commandes, abandonnés par le frère Abdelaziz, Saïd Bouteflika non seulement sort de sa réserve mais occupe de plus en plus l'espace médiatique et public algérien. Une attitude qui trahit clairement ses velléités présidentielles, d'autant plus que la présidentielle algérienne se profile à l'horizon 2019.

Vous avez bien lu: la présidentielle algérienne se profile à l'horizon 2019. Saïd Bouteflika en est conscient et se positionne déjà en tant que successeur de son frère. Une ambition qui s'éclaircit de jour en jour et qui prend désormais les allures d'une pré-campagne électorale. Les effigies de Saïd inscrites sur les T-shirt distribués à l'occasion de "l'hommage innocent" qui lui a été rendu par l'association oranaise l'illustrent parfaitement. 

Reste que le frère Saïd a un rival de poids qui l'attend au détour. Le général Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense, a aussi des visées sur le très convoité palais présidentiel. A qui appartiendra la conquête de la citadelle El Mouradia? Seul le temps nous le dira.

Par M'Hamed Hamrouch
Le 29/08/2017 à 14h30