Recouvert du drapeau russe tricolore et accompagné d'une garde d'honneur, le cercueil dans lequel repose la dépouille d'Andreï Karlov a été inhumé dans un cimetière dans le nord de la capitale russe.
Dans la matinée, une cérémonie d'hommage a été organisée au ministère russe des Affaires étrangères, en présence du président Vladimir Poutine, du Premier ministre Dmitri Medvedev, du chef de la diplomatie Sergueï Lavrov et de l'ensemble de l'élite politique, ministres et parlementaires, qui se sont succédé pour déposer des fleurs au pied du cercueil, sur fond de musique funèbre.
Ambassadeur en Turquie depuis 2013, Andreï Karlov, 62 ans, "a été la victime d'un acte terroriste lâche et ignoble" alors qu'il exerçait son devoir professionnel, a déclaré M. Lavrov.
Vladimir Poutine, qui a déposé des roses rouges, n'a pas pris la parole, mais a discuté avec la veuve et le fils de l'ambassadeur assassiné et leur a présenté "ses condoléances sincères", selon un communiqué du Kremlin.
Mercredi, il a décerné le titre de héros de la Russie à Andreï Karlov, à titre posthume pour son "courage" et sa "grande contribution" à la politique étrangère russe.
Après l'hommage au ministère, un office religieux a été célébré par le patriarche de Moscou et de toutes les Russies, Kirill, dans la cathédrale du Christ-Sauveur. Andreï Karlov "restera toujours un héros dans l'histoire du peuple russe", a souligné le patriarche.
L'assassinat du diplomate par un policier turc lors d'une exposition dans une galerie d'art d'Ankara est survenu en plein réchauffement des relations entre la Russie et la Turquie, parrains de la trêve ayant permis d'entamer l'évacuation de la partie est d'Alep tenue par les rebelles.
Les deux pays ont dénoncé une "provocation" visant à saboter leur coopération.
Sous l'objectif des caméras, Mevlüt Mert Altintas, un policier turc âgé de 22 ans, a tué lundi de neuf balles l'ambassadeur Andreï Karlov, avant d'être lui-même abattu, après avoir lancé "Allah Akbar" et affirmé vouloir venger les habitants d'Alep.
Malgré ces déclarations qui semblent lier le meurtre à la situation en Syrie, où la Russie soutient militairement le pouvoir du président Bachar al-Assad, les enquêteurs turcs suivent, selon les médias, la piste du réseau de Fethullah Gülen, bête noire du président Recep Tayyip Erdogan qui l'accuse d'avoir ourdi le putsch manqué de juillet dernier.
"C'est un membre de l'organisation terroriste FETO, il n'y a pas besoin de dissimuler cela", a déclaré mercredi M. Erdogan lors d'une conférence de presse à Ankara, utilisant l'acronyme qui désigne le réseau de M. Gülen.
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Mais le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a tempéré les déclarations turques soulignant qu'il ne fallait pas "tirer de conclusions hâtives" mais "attendre les résultats du travail du groupe d'enquête".
Fait inédit, la Turquie a accepté la participation aux investigations de 18 enquêteurs, agents des services secrets et diplomates russes, dépêchés par Moscou.
Selon les médias turcs, les enquêteurs ont trouvé des livres sur l'organisation guléniste lors de la perquisition du domicile de Mevlüt Mert Altintas, et passeraient en revue les relations nouées par le policier.
Les autorités turques ont libéré jeudi, les membres de la famille du tueur: ses parents, sa soeur, deux oncles et une tante, placés en garde à vue après l'assassinat, selon l'agence progouvernementale Anadolu. Encore 120 personnes étaient recherchées dans le cadre de l'enquête, selon l'agence.
Outre le putsch avorté, dans lequel M. Gülen dément toute implication, le gouvernement turc présente souvent ce prédicateur comme la principale source des maux dont souffre le pays. Après l'assassinat de l'ambassadeur, M. Gülen, dont Ankara réclame en vain l'extradition des Etats-Unis, s'était dit "choqué et profondément attristé"