Les deux groupes se faisaient face sur l'autoroute Francisco Fajardo, voie d'accès à la capitale et théâtre des précédents heurts, usant de gaz lacrymogènes et jets d'eau d'un côté, de cocktails Molotov et d'autres projectiles de l'autre.
Plusieurs autres défilés de l'opposition en faveur d'élections anticipées avaient lieu à travers le pays.
Vêtus de blanc et portant des drapeaux rouge, jaune et bleu du Venezuela, les antichavistes (du nom du défunt président Hugo Chavez, 1999-2013) n'avaient qu'un objectif: atteindre le coeur de Caracas, considéré comme un bastion du pouvoir, pour manifester devant les locaux du Défenseur du peuple, l'autorité devant veiller au respect des droits de l'homme.
"Je veux mourir dans un Venezuela libéré de la dictature. Cela fait près d'un mois que je proteste et je vais continuer jusqu'à ce que nous en finissions", a déclaré à l'AFP Elizabeth Freites, 77 ans, qui se protège du soleil avec son parapluie et porte une bouteille de bicarbonate pour limiter les effets des gaz lacrymogènes.
En réponse, les partisans du gouvernement ont marché vers le palais présidentiel de Miraflores et s'étaient concentrés à proximité dans l'attente du chef de l'Etat Nicolas Maduro.
"Nous sommes mobilisés en faveur de la révolution, de notre président. Nous appelons l'opposition à cesser la violence", a déclaré le jeune Freddy Gutierrez.
Jusqu'à présent, les milliers d'opposants défilant contre le président socialiste ont toujours été empêchés d'atteindre le coeur de la capitale par les forces de l'ordre.
Presque toutes les marches ont dégénéré en heurts et pillages. A cela s'est ajoutée la violence exercée par les "colectivos", des groupes de civils armés par le gouvernement, selon l'opposition.
On compte déjà 27 morts, selon le dernier bilan du parquet - 29 selon le chef de l'Etat -, qui dénombre aussi 437 blessés et 1.289 personnes arrêtées pour divers troubles et saccages.
Le parquet a annoncé mercredi le décès d'un homme de 22 ans dans la nuit après avoir été blessé par balle lundi durant une manifestation à Valencia (nord).
Ce bilan est le plus lourd depuis la vague de manifestations de 2014 qui avait fait officiellement 43 morts.
Quatorze journalistes au total ont été arrêtés et 106 agressés en quatre semaines de protestations, a indiqué le Syndicat national des travailleurs de la presse, accusant la Garde nationale de "harceler" les journalistes couvrant les manifestations.
L'étincelle à l'origine de la vague de manifestations, quasi-quotidiennes depuis début avril, a été la décision de la Cour suprême de s'arroger les pouvoirs du Parlement, seule institution contrôlée par l'opposition depuis fin 2015.
L'opposition a dénoncé une tentative de "coup d'Etat" et l'indignation diplomatique a finalement forcé l'autorité judiciaire à faire marche arrière 48 heures plus tard.
Dans ce pays pétrolier dont l'économie s'est effondrée avec la chute des cours du brut, la majorité des aliments et médicaments sont introuvables. Sept Vénézuéliens sur dix souhaitent le départ de Nicolas Maduro, selon un sondage Venebarometro.
Ce dernier a invité l'opposition à reprendre le dialogue gelé depuis décembre, appelant le pape François à "accompagner" ces discussions. L'an dernier, une médiation sous l'égide du Saint-Siège avait échoué.
"L'unique dialogue que veulent les Vénézuéliens, ce sont des élections libres et démocratiques. Voter", a rétorqué M. Capriles.
La pression diplomatique reste forte: l'Organisation des Etats américains (OEA), dont le secrétaire général Luis Almagro a traité M. Maduro de "dictateur", se réunit mercredi à Washington et le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy, en déplacement mercredi en Uruguay, a exprimé sa "profonde préoccupation".
Onze pays latino-américains ainsi que les Etats-Unis plaident pour des élections.
"Il y a une pression très grande de la communauté internationale pour une négociation politique de l'opposition avec le gouvernement. Mais elle ne pourrait pas y imposer ses conditions. Je ne pense pas qu'il soit possible d'obtenir des élections générales" anticipées, commente à l'AFP l'analyste Carlos Raul Hernandez.
Mercredi, Amnesty international a demandé au gouvernement d'"arrêter" la "persécution" et les "détentions arbitraires" d'opposants. Reporters sans frontières a classé le Venezuela à la 137e place (sur 180) dans son classement mondial de la liberté de la presse dévoilé ce même jour.