Selon un décret publié samedi en vertu de l'état d'urgence imposé après la tentative de coup d'État de juillet, les 3.974 fonctionnaires révoqués comprennent un millier d'employés du ministère de la Justice et un millier d'autres dépendant de l'armée.
Le décret donne le nom de tous les fonctionnaires concernés, au nombre desquels figurent notamment une centaine de pilotes et près de 500 universitaires.
Le 26 avril, la Turquie avait déjà arrêté plus de 1.000 personnes et suspendu plus de 9.100 policiers dans le cadre d'une nouvelle purge contre ceux qui sont présentés comme des partisans du prédicateur réfugié aux États-Unis Fethullah Gulen, auquel Ankara fait porter la responsabilité du coup d'État avorté du 15 juillet.
Dans le cadre de l'état d'urgence, 47.000 personnes ont déjà été arrêtées. Fethullah Gulen a démenti être à l'origine du coup d'Etat avorté, mais les autorités affirment que les purges sont nécessaires pour éradiquer ce "virus" de la société turque.
Dans un deuxième décret, le gouvernement a interdit les émissions télévisées très populaires de rencontres, une décision auquel le gouvernement préparait l'opinion depuis plusieurs mois.
Le vice-Premier ministre Numan Kurtulmus avait critiqué en mars ces "programmes étranges qui mettent à la casse l'institution de la famille et lui retirent sa noblesse et sa sainteté". "Si Dieu le veut, dans un proche avenir, nous allons y remédier grâce à des décrets d'urgence", avait-il averti.
Les opposants du parti islamo-conservateur AKP (au pouvoir) expriment fréquemment la crainte que la Turquie penche vers un islam conservateur, mais l'AKP répond que ces émissions suscitent des milliers de plaintes chaque année et que l'interdiction est dans l'intérêt du public.
"L'accès à l'information, un droit humain fondamental"
Ces décrets s'inscrivent dans le durcissement ayant suivi la victoire du président Recep Tayyip Erdogan au référendum du 16 avril qui lui a permis de renforcer ses pouvoirs.
Les autorités turques ont en outre bloqué samedi l'accès à Wikipedia. Ce blocage serait lié à des articles de l'encyclopédie établissant un lien entre Ankara et des organisations extrémistes.
La fermeture de l'accès en toutes langues du site en Turquie a été détectée à 5H00 GMT, à la suite d'une mesure administrative des autorités, selon Turkey Blocks, un organisme de surveillance en ligne.
L'Autorité des technologies de communication et d'information (BTK) a ensuite confirmé qu'elle avait appliqué cette mesure, sans toutefois la motiver: "Après une analyse technique et une évaluation juridique basée sur la loi 5651, une mesure administrative a été prise pour le site internet wikipedia.org".
La loi 5651, approuvée en 2014 par le Parlement, confère des pouvoirs substantiels à la BTK en matière de régulation d'internet, mais elle est aussi critiquée par les défenseurs de la liberté d'expression qui voient en elle un instrument de musèlement.
Réagissant au blocage de Wikipedia, son fondateur Jimmy Wales a souligné sur Twitter que "l'accès à l'information est un droit humain fondamental. Peuple turc, je serai toujours à vos côtés pour défendre ce droit".
D'après l'agence de presse progouvernementale Anadolu, citant le ministère des Transports et des Télécommunications, les autorités ont pris la décision de bloquer le site après que Wikipedia a refusé de retirer des articles dans lesquels la Turquie serait "mise sur le même plan" que des groupes extrémistes et accusée de "collaborer" avec eux.
De même source, le blocage pourrait être levé dès que ces articles auront été retirés.
Les autorités ne précisent pas de quelles organisations il s'agit, mais la Turquie réagit toujours très vivement à ce qu'elle assimile à de la "propagande terroriste" en faveur du PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan, engagé dans une sanglante lutte armée contre Ankara depuis 1984.
Certains critiques, dont des militants kurdes, accusent Ankara de parfois collaborer avec les jihadistes en Syrie, une allégation fermement rejetée par les autorités turques.
Ces dernières années, les autorités turques ont bloqué temporairement à plusieurs reprises les accès à Facebook et Twitter, à l'occasion de grandes manifestations contre le pouvoir ou d'attentats.