En pleine discorde sur ce projet de mur, promesse emblématique du magnat de l'immobilier durant sa campagne, et sur la renégociation de l'accord de libre-échange Aléna, le président mexicain Enrique Peña Nieto a annulé sa visite à Washington, prévue dans moins d'une semaine.
Le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, a évoqué jeudi après-midi à bord de l'avion présidentiel Air Force One, la mise en place d'une taxe de 20%. "En faisant cela, nous pouvons récolter 10 milliards de dollars par an et facilement payer pour le mur grâce à ce seul mécanisme", a-t-il déclaré.
Quelques heures plus tard, il a partiellement fait machine arrière sur ses propos, affirmant qu'il s'agissait seulement d'une proposition parmi d'autres, destinée à illustrer les multiples modes possibles de financement, alors que Donald Trump a promis que Mexico finirait par payer pour le mur, d'une manière ou d'une autre.
Payer pour le mur "n'est pas négociable", a répliqué jeudi le ministre mexicain des Affaires étrangères, Luis Videgaray, lors d'une conférence de presse à Washington.
Donald Trump a signé mercredi un décret donnant le coup d'envoi, largement symbolique à ce stade, au projet de construction d'un mur renforcé le long de l'immense frontière avec le Mexique.Commentant l'annulation de la rencontre avec son homologue mexicain, il a estimé qu'elle aurait été "stérile". La veille, M. Peña Nieto avait condamné l'initiative américaine qui, "au lieu de nous unir, nous divise".
"Nous allons maintenir les lignes de communication ouvertes", a tempéré le porte-parole de la Maison Blanche.
L'idée d'une taxe sur les importations a provoqué la consternation des élus attachés au libre-échange, une sensibilité très représentée chez les républicains.
"Les tarifs (douaniers) sont une taxe sur les familles américaines", a estimé le sénateur républicain Ben Sasse.
Mais dans les couloirs du séminaire annuel des républicains du Congrès, à Philadelphie, on expliquait que l'annonce fracassante correspondait en réalité au grand projet de réforme fiscale qui doit voir le jour en 2017, censé remettre à plat la façon dont les entreprises sont taxées selon qu'elles produisent aux Etats-Unis ou ailleurs.
Sur l'immigration illégale, véritable cheval de bataille de la nouvelle administration, Donald Trump a signé un autre décret mercredi pour appliquer plus sévèrement la législation.
Il prévoit de réduire les financements fédéraux de Washington pour les quelque 200 "villes sanctuaires" aux Etats-Unis qui accueillent depuis des décennies des immigrés clandestins.
Le président s'est attiré les foudres des maires démocrates de Los Angeles, New York ou Chicago. Le maire de Miami a en revanche décidé de sortir de la liste des villes "sanctuaires".
Le président septuagénaire pourrait aussi décider, dans les jours à venir, de bloquer pendant un mois l'arrivée en Amérique de ressortissants de sept pays musulmans: Irak, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen.
Ce projet de décret présidentiel, que le quotidien Washington Post a publié mercredi, est intitulé "Protéger la nation d'attaques terroristes par des étrangers" et prévoit également l'arrêt complet pendant quatre mois du programme américain d'admission de réfugiés de pays en guerre.
Les Syriens, qui ont fui par millions le conflit dans leur pays, et dont seulement 10.000 ont été acceptés aux Etats-Unis en 2016, seraient, eux, définitivement interdits d'entrer.
L'administration Trump entend accepter 50.000 réfugiés cette année, toutes nationalités confondues, contre plus de 100.000 prévus par l'équipe Obama.
Elu sur des slogans de campagne isolationnistes et de lutte contre le "terrorisme islamique radical", le nouvel occupant de la Maison Blanche a affirmé mercredi soir sur la chaîne ABC qu'il fallait agir dans "un monde en colère".
"Ce n'est pas une interdiction contre les musulmans mais cela concerne des pays qui ont beaucoup de terrorisme", a-t-il affirmé, provoquant la colère des groupes de défense des droits de l'Homme.
"Tourner le dos à des réfugiés vulnérables ne va pas protéger les Etats-Unis", a condamné l'ancien patron du centre national du contre-terrorisme, Michael Olsen, aujourd'hui membre de l'association Human Rights First. Au contraire, "cela va nourrir le récit mensonger de (l'organisation jihadiste) Etat islamique pour qui nous sommes en guerre contre les musulmans et non contre les groupes terroristes".