Le gouvernement qatari n'a publié aucun chiffre, mais la Commission nationale des droits de l'Homme du Qatar, liée au pouvoir, a estimé que seulement "60 à 70" pèlerins du petit émirat avaient réussi à se rendre en Arabie saoudite la semaine dernière.
Les estimations sont plus élevées côté saoudien, certains médias parlant de 1.200 pèlerins venus du Qatar.
Mais, quel que soit le chiffre retenu, le nombre de pèlerins qataris est en chute libre, bien loin des 12.000 qui avaient fait le voyage l'année dernière, selon l'agence de presse officielle du Qatar, QNA.
Au cours des dernières semaines, le grand pèlerinage musulman (hajj) de La Mecque s'est retrouvé au cœur du différend qui oppose l'Arabie saoudite et trois de ses alliés au Qatar.
Riyad, les Emirats arabes unis, Bahreïn et l'Egypte ont rompu leurs relations diplomatiques avec l'émirat le 5 juin en l'accusant d'avoir des liens avec des groupes extrémistes et de se rapprocher de l'Iran, le grand rival de l'Arabie saoudite dans la région.
Parmi les sanctions prises contre le Qatar, qui nie soutenir des groupes extrémistes, figurait la fermeture par l'Arabie saoudite de toutes ses frontières -terrestre, maritime et aérienne- avec l'émirat et le rappel de ses citoyens vivant au Qatar.
Mais, le 17 août, à l'approche du hajj, l'Arabie a fait un geste en direction du Qatar en assouplissant les conditions d'entrée des pèlerins de ce pays, notamment via le poste-frontière terrestre de Salwa, par où sont aussitôt passés plusieurs dizaines de fidèles.
En revanche, le transport de pèlerins qataris à bord d'avions saoudiens promis par Riyad n'a pas eu lieu. "Les autorités qataries n'ont pas autorisé les avions à atterrir" en prétextant qu'ils n'avaient pas "les bons documents", a affirmé l'agence saoudienne SPA, ce qu'a nié le Qatar.
Depuis le début de la crise du Golfe, les avions de Qatar Airways n'ont plus le droit de survoler l'espace aérien saoudien, ce qui attise la colère de Doha.
Les échanges acides entre les deux pays ont été ponctués par des accusations qataries de "politisation" du hajj.
Même l'assouplissement annoncé par Riyad a donné lieu à une polémique autour de la "médiation" entreprise à l'occasion du hajj par un membre de la famille royale du Qatar, cheikh Abdallah ben Ali Al-Thani, présenté par certains médias du Golfe comme un rival potentiel de l'actuel émir à Doha.
Le Qatar n'a pas encouragé ses citoyens à se rendre massivement à La Mecque et a ouvertement exprimé son inquiétude devant les risques de "harcèlement" dont pourraient être victimes ses pèlerins, en particulier ceux qui voyagent seuls.
Quelque 2.400 Qataris devaient également se rendre à La Mecque en voyage organisé grâce à des agences spécialisées ayant des accords avec les autorités saoudiennes, alors qu'au départ, 24.000 s'étaient portés candidats pour le voyage du hajj, selon la Commission nationale des droits de l'Homme du Qatar.
Toujours d'après elle, huit agences qui devaient transporter des pèlerins cette année ont enregistré un manque à gagner de 30 millions de riyals (6,8 millions d'euros) en raison des "restrictions" imposées par l'Arabie saoudite.
Ces affaires pourraient être portées devant des tribunaux.
Dès le début de la crise du Golfe, le Qatar a averti qu'il pourrait saisir la justice pour réclamer des milliards d'euros de compensations du fait du "blocus" que lui imposent l'Arabie saoudite et d'autres pays voisins.