"Je vous implore d'envisager d'agir de sorte qu'on puisse enfin refermer cette affaire, par pitié pour moi et ma famille", a déclaré Samantha Geimer, accompagnée de son mari lors d'une audience au tribunal supérieur de Los Angeles.
Lisant rapidement sa déclaration, cette femme de 54 ans, qui vit à Hawaï avec son époux, a expliqué être récemment devenue grand-mère. "Je ne veux pas avoir à expliquer à ma petite-fille pourquoi elle ne peut pas sortir ou répondre au téléphone, ou pourquoi il y a des caméras devant la maison et au final, ce qui est arrivé à sa mamie en 1977", a-t-elle poursuivi.
Samantha Geimer a déjà dit par le passé avoir pardonné Roman Polanski et vouloir mettre fin à cette affaire mais c'était la première fois qu'elle faisait cette demande en personne, devant un tribunal. Elle a suggéré au juge Scott Gordon d'explorer plusieurs voies pour tourner enfin la page, soit en décidant de classer l'affaire, soit en condamnant Roman Polanski à une peine qu'il a déjà purgée ou en annulant le mandat d'arrêt international visant le réalisateur de 83 ans.
"Vos paroles ont du poids pour ce tribunal", a commenté le juge Gordon. Le magistrat a précisé qu'il prendrait en compte cette déposition dans sa décision de rendre publics ou non les documents qui prouvent, selon Roman Polanski, l'existence en 1977 d'un accord amiable par lequel il devait passer en tout et pour tout 48 jours en détention pour ce viol. Il n'a pas précisé quand il en déciderait.
Procureurs carriéristes
Après l'audience, Samantha Geimer a affirmé avoir une certaine empathie pour Roman Polanski, qui fait face, a-t-elle dit, aux mêmes abus qu'elle a endurés après le viol. "Quand c'est arrivé, ma mère et moi avons (été traitées) comme des menteuses en quête de profits qui s'attaquaient au pauvre Roman. L'histoire était très différente", a-t-elle dit aux journalistes. "Maintenant tout le monde le traite de pédophile et dit des choses terribles et fausses sur lui".
Célèbre pour "Rosemary's Baby" (1968), "Tess" (1979) ou plus récemment "Le Pianiste", qui lui a valu la Palme d'Or à Cannes en 2002, Roman Polanski est accusé d'avoir drogué Samantha Geimer quand elle avait 13 ans avant de la violer dans la villa de Jack Nicholson, à Los Angeles. Roman Polanski avait reconnu avoir eu des relations sexuelles illégales avec une mineure et, en échange, le juge de l'époque avait accepté de ne pas retenir d'autres chefs d'inculpation. Il avait passé 42 jours en détention pour subir un examen psychologique. Mais en 1978, redoutant une annulation de cet accord amiable, il avait fui vers la France.
M. Polanski, marié avec l'actrice Emmanuelle Seigner, avec qui il a deux enfants, a depuis toujours refusé de retourner aux Etats-Unis sans assurance qu'il ne sera plus emprisonné. Son avocat, Harland Braun, a demandé vendredi que l'affaire soit classée, argumentant que son client avait déjà purgé sa peine. Le procureur s'est opposé à cette demande.
Samantha Geimer avait écrit à la cour plus tôt cette année, accusant les procureurs de vouloir faire avancer leur carrière plutôt que de résoudre ce dossier.
A cause de cette affaire et des mandats d'arrêt qui pèsent sur lui, Roman Polanski n'est pas revenu aux Etats-Unis depuis des décennies et ses déplacements ailleurs à l'étranger sont limités. Ainsi, il n'était pas allé à Los Angeles recevoir un Oscar pour son film "Le Pianiste" et a par ailleurs renoncé à présider la cérémonie française des Césars en février, face au tollé.
On lui prête l'intention de vouloir revenir aux Etats-Unis pour se recueillir sur la tombe de son ex-femme l'actrice Sharon Tate, assassinée en 1969 par les membres de la bande du tueur Charles Manson, alors qu'elle était enceinte de huit mois.