Une France à l’arrêt, «c’est évidemment mauvais pour nos concitoyens», et «les premiers pénalisés, quand on a des grèves, ce sont les Français les plus modestes», a critiqué lundi soir la Première ministre Elisabeth Borne, défendant sur la chaîne de télévision France 5 une réforme qui assurera la pérennité «d’un des piliers de notre modèle social».
Le secrétaire général du syndicat CFDT, Laurent Berger, a prédit lundi une «journée de mobilisation extrêmement puissante» et appelé le président Emmanuel Macron à ne pas «rester sourd».
Le 31 janvier, les syndicats avaient déjà revendiqué plus de 2,5 millions de manifestants dans tout le pays (1,27 million selon les autorités). Selon une source policière, entre 1,1 et 1,4 million de personnes devraient descendre dans la rue mardi. Le syndicat CGT prévoit au total 265 rassemblements.
Le syndicat Solidaires espère un «tsunami social» qui amènera le gouvernement à reculer sur la mesure emblématique de la réforme, le report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans.
Sondage après sondage, les Français restent très majoritairement opposés à cette mesure, même s’ils pensent qu’elle sera mise en œuvre in fine.
Semaine noire
Cette sixième journée d’actions depuis le lancement de la contestation marquera le lancement ou la poursuite de grèves reconductibles dans plusieurs secteurs, des transports aux raffineries en passant par l’énergie, le commerce ou les déchets.
La compagnie ferroviaire SNCF et les transports parisiens prévoient un trafic très perturbé mardi mais aussi mercredi. Dans les airs, la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) a demandé aux compagnies de réduire de 20 à 30% leurs programmes de vols mardi et mercredi.
Les transporteurs routiers ont rejoint le mouvement, certains dès dimanche soir. Dans l’éducation, le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, prévoit «plus de 60%» d’enseignants grévistes dans le premier degré et «plusieurs milliers d’écoles» fermées mardi. Une vingtaine de blocages sont prévus dans les universités.
Le secrétaire général de la CGT Energie, Sébastien Ménesplier, a prévu une «semaine noire» dans le secteur, avec des baisses de production principalement dans le nucléaire.
Trois des quatre terminaux méthaniers qui permettent d’importer du gaz naturel liquéfié (GNL) en France ont été mis à l’arrêt pour «sept jours», a indiqué lundi soir le syndicat CGT Elengy.
Les syndicats s’attendent en outre à des initiatives plus inhabituelles: rideaux de magasins fermés, péages ouverts, ronds-points occupés -ces derniers modes d’action rappelant ceux des «gilets jaunes» en 2018-2019-, ou spectacles annulés.
Plusieurs manifestants ont commencé à bloquer dans la nuit de lundi à mardi un important axe routier de Rennes, dans l’ouest de la France, a constaté un vidéaste de l’AFP. Une cinquantaine de policiers sont présents sur les lieux, ainsi que des pompiers, et de nombreux foyers d’incendie sont visibles dans la zone.
La semaine sera émaillée d’autres mobilisations, en parallèle des débats au Sénat, qui s’achèveront quoi qu’il arrive vendredi: «grèves féministes» le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, mobilisation de la jeunesse jeudi, grève nationale pour le climat vendredi, une problématique que certains syndicats lient à celle des retraites.
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«Validation démocratique»
«Demain ça va être réussi, ça va être salé», prévoit une source au sein du syndicat Renaissance.
Une source gouvernementale dit s’attendre «à une mobilisation similaire à la première journée d’action», celle du 19 janvier, qui avait réuni 1,12 million de personnes selon les autorités.
Le gouvernement compte sur l’adoption au Sénat de la réforme d’ici dimanche, et envisage «un vote le 16 mars» dans les deux chambres du Parlement.
«Si la réforme est adoptée, il est peu probable que la mobilisation se maintienne à ce niveau», dit cette source, qui table sur un désengagement des syndicats les plus modérés.
Interrogé lundi soir sur la radio RTL, Laurent Escure, du syndicat Unsa, a prévenu que la mobilisation ne s’achèverait pas nécessairement avec le vote du projet de loi. «Une loi adoptée, elle peut être abrogée», a-t-il pointé.
«Je pense que c’est important, le Parlement, et que quand les lois sont votées c’est une validation démocratique importante», a répondu Mme Borne.