"Le discours plus policé des représentants de la droite, du centre et de la gauche, a souvent fait pâle figure", souligne le quotidien Libération mercredi.
Les "petits", le candidat d'extrême gauche Philippe Poutou en tête, "ont crevé l'écran", avec une parole "intempestive, dérangeante, sincère souvent", ajoute encore Libération.
Le Figaro évoque encore "un brouhaha où la raison se perd", en écho au Parisien/Aujourd'hui en France qui se demande si ce débat était "vraiment utile".
Pour leur part, les deux favoris des sondages pour le premier tour, le 23 avril, crédités d'environ 26% chacun, Marine Le Pen, la dirigeante d'extrême droite, et Emmanuel Macron, ancien ministre du président socialiste François Hollande repositionné au centre, se sont affrontés sur la sortie de l'euro.
L'ancien banquier d'affaires a qualifié de "guerre économique", qui se traduira par "une baisse du pouvoir d'achat des Français", la volonté de Mme Le Pen de mettre en place un "protectionnisme intelligent" et un référendum sur la sortie de l'euro.
Il s'est posé comme le candidat de "l'alternance véritable, profonde", prêt à "prendre des mesures fortes" et affichant sa "confiance" dans la France.
Marine Le Pen s'est, elle, présentée comme celle qui veut "rendre la parole au peuple" d'un pays "livré à l'insécurité galopante", confronté à la "mondialisation sauvage", au "totalitarisme islamiste", à "la contestation de ses valeurs fondamentales et même de son identité nationale".
Le candidat de la droite, François Fillon, s'est montré plutôt effacé et sur la défensive, notamment lorsque la question de la moralisation de la vie politique a été évoquée.
"François Fillon, plus on fouille, plus on sent la corruption, la triche, ce sont des bonhommes qui nous expliquent qu'il faut la rigueur, l'austérité alors qu'ils piquent dans les caisses", a violemment attaqué le candidat d'extrême gauche Philippe Poutou.
M. Fillon est tombé en troisième position dans les intentions de vote (17%) après un scandale sur des emplois fictifs présumés impliquant sa famille, qui lui vaut une inculpation notamment pour détournement de fonds publics, une première pour un candidat majeur.
Il a cependant pris des accents guerriers pour parler de "vaincre le totalitarisme islamique", "sauver l'Europe", "libérer" l'économie pour "restaurer la fierté nationale et se tenir aux côtés des Français qui réclament de l'ordre et de la sécurité".
Quatrième des sondages, le représentant de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon s'en est lui pris à "la finance", qui "doit rendre l'argent" et "payer le retour au plein emploi", en se disant "prêt à gouverner". Le vent en poupe, M. Mélenchon, qui progresse dans les sondages, est aujourd'hui crédité de 15% des intentions de vote.
L'Europe a été le déclencheur de débats plus animés qui ont fait apparaître les lignes de fracture entre les tenants du renforcement de la construction européenne (Emmanuel Macron), ceux plaidant pour la renégociation des traités (Jean-Luc Mélenchon) et ceux demandant un "Frexit" et/ou la sortie immédiate de l'euro (Marine Le Pen).
Ce débat, exercice inédit avant un premier tour d'élection présidentielle, était une occasion pour les candidats les moins connus de faire entendre leur voix dans cette campagne marquée par les affaires, riche en coups de théâtre et scrutée à l'étranger, alors que l'extrême droite est donnée qualifiée pour le second tour, programmé le 7 mai.
Durant 4 heures, avec des candidats visiblement fatigués en arrivant aux conclusions, ce débat rythmé n'a pas échappé à des moments de confusion mais a permis aux postulants crédités au mieux de quelques points dans les sondages de marquer d'emblée leurs différences en dénonçant "politiciens corrompus", "grand patronat" ou "système usé".
La voix rocailleuse du centriste Jean Lassalle rappelant qu'il était "fils de berger, frère de berger", qu'il avait été berger lui-même, lui a aussi donné de la couleur.
Mais avec un peu plus d'un quart d'heure au total de temps de parole chacun, les onze prétendants ne pouvaient que brosser à grands traits leurs projets pour la France, l'Europe, en matière sociale et d'emploi ou de lutte contre le terrorisme.
A 19 jours du scrutin, il devient pour tous crucial de convaincre, notamment les abstentionnistes alors que seulement deux tiers des électeurs se disent certains d'aller voter.