"Face à ce bloc qui représente les intérêts de l'oligarchie, nous sommes la seule force de résistance", a-t-elle lancé dimanche soir, combative. Alors que le parti présidentiel a raflé la majorité absolue dimanche soir, au moins huit députés d'extrême droite ont été élus. Sévèrement défaite par le centriste Emmanuel Macron à la présidentielle en mai, cette avocate de formation de 48 ans était donnée favorite dans son fief d'Hénin-Beaumont, ancien bastion socialiste frappé par la désindustrialisation et un fort chômage.
Avec son programme anti-immigration et anti-Europe, elle avait obtenu une large majorité à la présidentielle dans cette ancienne ville minière de 27.000 habitants où s'alignent de modestes maisons en briques.
Se décrivant comme une "candidate du peuple" alors que ses détracteurs la ramènent au statut d'"héritière" de son père Jean-Marie Le Pen, riche cofondateur du Front national, elle avait obtenu un score historique de 33,9% au second tour de la présidentielle, dans un contexte de poussée nationaliste en Europe.
Mais, si elle rêvait de voir le Front national devenir "le premier parti d'opposition", les législatives n'ont pas permis de transformer l'essai. Au premier tour, marqué par une forte abstention y compris dans les régions favorables à l'extrême droite, son parti n'a obtenu que 13,2%. Un résultat "décevant" pour Marine Le Pen.
Succédant à son père, avec lequel elle est désormais brouillée, Marine Le Pen avait pris la tête du FN en 2011, sans changer ses fondamentaux idéologiques.
Cette grande blonde gouailleuse à la voix tonitruante mène depuis plusieurs années une stratégie de "dédiabolisation". Elle a écarté les cadres à l'image la plus sulfureuse: militants antisémites, nostalgiques de l'Algérie française voire de la collaboration avec l'Allemagne nazie, ou catholiques intégristes. Cette stratégie a payé, le Front National progressant constamment à chaque élection.
Visant l'Elysée, cette battante qui se décrit comme une "femme de caractère parfois abrupt" s'est efforcée d'adoucir son image, à coups d'anecdotes personnelles, d'affiches sur "La France apaisée" ou de photos avec ses chats. La benjamine des trois filles Le Pen -deux fois divorcée, mère de trois enfants et aujourd'hui en couple avec l'une des figures du parti, Louis Aliot, lui aussi élu député dimanche- a insisté ces dernier mois sur l'économie, avec une forte dose de protectionnisme et la sortie de l'euro pour séduire les "perdants" de la mondialisation.
Elle avait fait campagne pour la présidentielle contre "le mondialisme jihadiste et le mondialisme économique", se présentant comme la "candidate des patriotes" face au "candidat de la finance" Emmanuel Macron. Avec son affaiblissement, les divisions internes du Front national se creusent: sa très populaire nièce Marion Maréchal-Le-Pen prend ses distances, un débat sur l'euro divise les responsables de son parti, les électeurs boudent les urnes dans les régions qui avaient massivement voté pour l'extrême droite pendant la présidentielle.
Elle a été très absente pendant la campagne des législatives, après avoir sillonné le terrain sans relâche pendant la présidentielle, avec des réunions publiques, où ses partisans de tous âges et de tous milieux sociaux scandaient à pleine voix: "On est chez nous!". Un "cri de xénophobie" selon ses adversaires, "un cri d'amour" pour la France, selon elle.
Citée dans une affaire d'emplois présumés fictifs au Parlement européen - où elle siège depuis 2004- elle a refusé de répondre à une convocation des juges, dénonçant une "cabale politique". Son élection au Parlement français l'assure d'une nouvelle immunité diplomatique.