Des milliers de Palestiniens fuient le nord de Gaza, sous l’emprise de l’armée israélienne

Les troupes israéliennes sont photographiées lors d'opérations dans le nord de Gaza le 8 novembre 2023.. AFP or licensors

L’armée israélienne renforce son emprise sur le nord de Gaza, que des milliers de Palestiniens fuient vers le sud dans l’espoir de trouver un abri, après plus d’un mois de bombardements et d’un siège qui les prive de nourriture et d’eau.

Le 09/11/2023 à 06h35

«Ils partent parce qu’ils comprennent que le Hamas a perdu le contrôle du nord et que la situation est plus sécurisée dans le sud», a affirmé mercredi soir le porte-parole de l’armée israélienne Daniel Hagari, ajoutant que le «couloir d’évacuation» ouvert pour quelques heures chaque jour depuis le 5 novembre vers le sud de Gaza serait de nouveau opérationnel jeudi.

Mercredi, près de 50.000 habitants ont quitté la ville de Gaza, selon l’armée israélienne, portant à 72.000 personnes le nombre de personnes parties depuis cette date, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’Onu (Ocha).

Cependant, des centaines de milliers d’autres habitants se trouvent toujours au nord du Wadi Gaza, le cours d’eau qui traverse le territoire d’est en ouest, «dans une situation humanitaire désastreuse», souligne l’agence onusienne.

«Ils luttent pour obtenir les quantités minimales d’eau et de nourriture nécessaires à leur survie», ajoute cette source.

La France accueille jeudi une «conférence humanitaire» pour tenter de débloquer l’aide, rendue quasi impossible dans ce secteur par les bombardements ininterrompus israéliens.

Le gouvernement israélien ne sera pas représenté à cette conférence organisée à l’Elysée, et les pays arabes n’y enverront pas de représentant du plus haut niveau.

Tout le monde a «intérêt à ce que la situation humanitaire s’améliore à Gaza, y compris Israël», a estimé mercredi la présidence française.

«Jusqu’à la fin»

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a de nouveau exclu mercredi tout cessez-le-feu sans la libération des otages enlevés par le Hamas le 7 octobre, lors de son attaque sur le sol israélien qui a déclenché la guerre.

Une source proche du Hamas à Gaza a indiqué à l’AFP que des négociations menées par le Qatar étaient en cours pour la libération de douze otages, dont six Américains, en échange d’une trêve humanitaire de trois jours dans le territoire soumis aux bombardements et à un siège total depuis plus d’un mois.

Selon un nouveau bilan des autorités israéliennes mercredi, 239 personnes sont retenues à Gaza.

Israël a juré d’«anéantir le Hamas» en représailles à l’attaque d’une violence et d’une ampleur sans précédent depuis sa création en 1948, menée par les commandos du mouvement islamiste, au pouvoir dans le territoire palestinien.

Au moins 1.400 personnes sont mortes en Israël depuis le début de la guerre déclenchée par cette attaque, en majorité des civils tués le 7 octobre, selon les autorités israéliennes.

Les bombardements d’Israël dans la bande de Gaza ont fait 10.569 morts, en majorité des civils, dont 4.324 enfants, selon le ministère de la Santé du Hamas.

L’armée israélienne a assuré mercredi qu’elle était entrée «profondément» à l’intérieur de la ville de Gaza où les combats au sol font rage. Trente-six militaires israéliens y sont morts depuis le lancement de l’offensive terrestre le 27 octobre.

Selon Israël, la ville abrite le «centre» du Hamas, retranché dans un réseau de tunnels de plusieurs centaines de kilomètres.

L’AFP a pu s’approcher mercredi de l’épicentre des combats dans le nord de Gaza lors d’une visite organisée par l’armée israélienne. Palmiers brûlés, lampadaires tordus, panneaux de signalisation déformés témoignaient de l’intensité de l’offensive le long de la route côtière en ruine.

«Nous avons perdu quelques soldats, nous avons subi quelques pertes, mais nous allons de l’avant», a assuré le commandant Ido qui menait la visite. «Nous sommes ici jusqu’à la fin.»

Surpopulation

Arrivée au sud, où s’entassent des centaines de milliers de réfugiés dans des conditions déplorables, la Palestinienne Ola el-Ghul a décrit un périple «effrayant». «Nous étions tellement nombreux. Nous tenions des drapeaux blancs. C’est vrai que nous avions peur, mais finalement nous avons réussi à passer», a-t-elle raconté à l’AFP.

Selon un pointage réalisé par l’ONU le week-end dernier, quelque 1,5 million de personnes sur les 2,4 millions d’habitants de Gaza, ont été déplacés par la guerre.

La surpopulation dans les abris de l’ONU, avec pour corollaire la dégradation des conditions sanitaires, «reste une préoccupation majeure», selon l’Ocha, qui souligne que «les produits alimentaires essentiels tels que le riz, les légumineuses et l’huile végétale sont presque épuisés».

Le territoire est privé d’eau, d’électricité, de nourriture et de médicaments par le siège total imposé par Israël depuis le 9 octobre, et l’aide internationale arrive au compte-gouttes. L’Ocha a dénombré 756 camions depuis le 21 octobre et la réouverture partiel du passage de Rafah avec l’Egypte.

Gaza, miné par la pauvreté, était déjà soumis à un blocus israélien terrestre, aérien et maritime depuis que le Hamas y a pris le pouvoir en 2007.

Par ailleurs, l’évacuation vers l’Egypte des blessés palestiniens et des binationaux a été à nouveau interrompue mercredi, selon un responsable palestinien.

«Pas de réoccupation», dit Blinken

Le gouvernement israélien a jugé mercredi «très prématuré» d’évoquer des «scénarios» futurs pour Gaza, où il veut rendre impossible tout retour du Hamas, classé organisation terroriste par les Etats-Unis et l’Union européenne.

Israël devra alors «avoir une responsabilité générale de sécurité pour une période indéfinie», a déclaré Ron Dermer, ministre israélien des Affaires stratégiques. Mais «il ne s’agira pas d’une occupation» du territoire d’où Israël s’est retiré en 2005, a-t-il assuré.

Les Etats-Unis ne veulent «pas de réoccupation de Gaza après la fin du conflit. Pas de blocus ou de siège de Gaza. Pas de réduction de territoire», a affirmé mercredi soir le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken à l’issue d’une réunion du G7 à Tokyo.

L’administration américaine ne veut «aucun déplacement contraint des Palestiniens de Gaza. Pas maintenant et pas après la guerre», a assuré M. Blinken, dont le pays est le plus proche allié d’Israël.

La communauté internationale craint une extension du conflit, notamment à la frontière israélo-libanaise, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l’armée israélienne et le Hezbollah, soutenu par l’Iran. Selon un décompte de l’AFP, les violences ont fait 83 morts côté libanais, dont 11 civils.

L’aviation israélienne a également visé mercredi soir des positions du Hezbollah en Syrie, tuant trois combattants pro-iraniens, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

Les Etats-Unis ont eux frappé mercredi une «installation de stockage d’armes» en Syrie liée selon eux à l’Iran, en réponse à des attaques contre des personnels américains qui se sont multipliées depuis le début de la guerre à Gaza. Selon l’OSDH, cette frappe a fait neuf morts.

Par Le360 (avec AFP)
Le 09/11/2023 à 06h35