Selon cette organisation, qui s’appuie sur un vaste réseau de sources à travers la Syrie, Israël a entre autres bombardé des aéroports, des radars, des dépôts d’armes et de munitions et des centres de recherche militaires dans plusieurs régions, dont celle de Damas, et a endommagé des navires de la marine syrienne en attaquant une unité de défense aérienne près du grand port de Lattaquié, dans le nord-ouest du pays.
Des journalistes de l’AFP ont entendu de fortes explosions mardi à l’aube, et des images en direct de l’AFPTV ont montré d’épaisses colonnes de fumée au-dessus du centre-ville.
Ces raids visent «la destruction des armes restantes dans les entrepôts et les unités militaires qui étaient contrôlés par les forces de l’ancien régime», allié de l’Iran et du Hezbollah libanais, a estimé l’OSDH dans un communiqué.
L’armée israélienne n’a pas fait de commentaire dans l’immédiat. Lundi, Israël avait confirmé avoir détruit au cours des derniers jours des «armes chimiques» en Syrie pour éviter qu’elles ne tombent aux mains des rebelles. L’armée israélienne effectue en outre depuis plusieurs jours une incursion dans la zone tampon à la lisière de la partie du plateau du Golan occupée et annexée.
Dans la nuit de lundi à mardi, la défense civile syrienne a dit avoir éteint l’incendie qui s’est déclaré dans un centre de recherches près de Damas après un bombardement, affirmant n’avoir observé aucune «fumée toxique inhabituelle» et aucun cas de suffocation, contrairement à des rumeurs qui se sont propagées sur les réseaux sociaux.
Armes chimiques
Les nouveaux maîtres de la Syrie sont animés par «une idéologie extrême de l’islam radical», et «c’est pourquoi nous avons attaqué des systèmes d’armes stratégiques comme par exemple des restes d’armes chimiques ou des missiles et roquettes à longue portée, afin qu’elles ne tombent pas aux mains d’extrémistes», a déclaré lundi le chef de la diplomatie israélienne, Gideon Saar.
À Damas, alors que des milliers de personnes attendent des nouvelles de leurs proches devant la sinistre prison de Saydnaya, conquise dimanche par les rebelles, et que des insurgés ont affirmé avoir trouvé des dizaines de cadavres portant des traces de tortures, le chef de la rébellion a promis de publier bientôt une liste noire de tortionnaires et de les châtier.
«Nous allons annoncer une liste numéro un qui comprend les noms des plus hauts responsables impliqués dans les tortures contre le peuple syrien», a écrit sur Telegram le commandant des rebelles Abou Mohammad al-Jolani, qui depuis quelques jours se fait également appeler par son vrai nom, Ahmed al-Chareh.
«Nous poursuivrons les criminels de guerre et demanderons qu’ils soient remis par les pays où ils se sont enfuis afin qu’ils puissent recevoir leur juste châtiment», a-t-il affirmé, alors que des médias libanais indiquent que plusieurs anciens dignitaires du gouvernement Assad se sont réfugiés à Beyrouth sous la protection du Hezbollah.
Amnistie
M. al-Jolani a promis des récompenses à quiconque permettra la capture d’anciens responsables «impliqués dans des crimes de guerre». Il a précisé avoir «accordé l’amnistie» au personnel subalterne de l’armée et des forces de sécurité «dont les mains ne sont pas tachées du sang du peuple syrien».
Depuis le début du soulèvement en 2011, plus de 100.000 personnes ont péri dans l’immense complexe pénitentiaire syrien, notamment sous la torture, estimait en 2022 l’OSDH.
Des images sur les réseaux sociaux ont montré des dizaines d’hommes, visages émaciés, certains portés par des camarades car trop faibles pour avancer seuls, sortir de la prison de Saydnaya après sa libération dimanche. Ces ex-prisonniers ont déferlé par vagues dans les rues de Damas, certains totalement désorientés.
Les familles des détenus restent convaincues qu’un grand nombre sont encore enfermés dans des cachots secrets dans les sous-sols de cette prison, symbole des pires exactions des forces de sécurité d’Assad et qualifiée d’ «abattoir humain» par Amnesty International.
Des rebelles ont déclaré à l’AFP avoir trouvé lundi une quarantaine de corps portant des traces de torture dans la morgue d’un hôpital près de Damas, entassés dans des sacs mortuaires.
«Tortures effroyables»
«J’ai ouvert la porte de la morgue de mes propres mains, c’était un spectacle horrible: une quarantaine de corps étaient empilés, montrant des signes de tortures effroyables», a décrit auprès de l’AFP Mohammed al-Hajj, un combattant des factions rebelles du sud du pays.
L’AFP a pu voir des dizaines de photographies et de séquences vidéo que M. Hajj dit avoir prises lui-même, et qui montrent des cadavres présentant des signes évidents de torture: yeux et dents arrachés, éclaboussures de sang, ecchymoses.
Emporté dimanche après 13 ans de guerre civile par une offensive spectaculaire de groupes rebelles dirigés par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS) de M. Jolani, le président Assad a fui le pays avec sa famille pour Moscou, selon les agences de presse russes.
Au lendemain de son entrée à Damas, M. al-Jolani a discuté lundi avec l’ex-Premier ministre Mohammed al-Jalali pour «coordonner la transition du pouvoir», après que le Parlement et le parti Baas de M. Assad ont apporté leur soutien à la transition, selon un communiqué des rebelles.
Dans un communiqué séparé diffusé par la télévision d’Etat, dont le logo sur Telegram arbore désormais le drapeau des rebelles, un responsable de HTS, Mohammed Abdel Rahmane, a déclaré que «les forces de sécurité œuvrent à sécuriser les bâtiments gouvernementaux et les installations publiques et privées, et mènent des patrouilles pour assurer la sécurité à Damas».
HTS, ex-branche syrienne d’Al-Qaïda, affirme avoir rompu avec le jihadisme, sans réellement convaincre les pays occidentaux, dont les Etats-Unis, qui le classent terroriste.
Au moins 910 personnes, dont 138 civils, ont été tuées durant l’offensive rebelle éclair lancée le 27 novembre, selon l’OSDH.