«La mort, la destruction, le déplacement, la faim, la perte et le chagrin massifs de ces cent derniers jours entachent notre humanité commune», a estimé le patron de l’agence d’aide aux réfugiés palestiniens de l’ONU (UNRWA), Philippe Lazzarini, en visite dans le territoire côtier.
Il a par ailleurs souligné qu’une génération entière d’enfants de Gaza était «traumatisée», que les maladies continuaient à se propager et que la «famine» était en vue.
La guerre a été déclenchée le 7 octobre par l’attaque du Hamas depuis la bande de Gaza qui a fait environ 1.140 morts sur le sol israélien, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP à partir du bilan israélien.
Quelque 250 personnes ont été également prises en otages. Parmi elles, 132 manquent à l’appel, dont 25 sont mortes sans que leurs corps n’aient été restitués, selon les autorités israéliennes.
En représailles, Israël a juré d’anéantir le mouvement islamiste palestinien au pouvoir à Gaza depuis 2007, classé groupe terroriste notamment par Israël, les États-Unis et l’Union européenne.
Les bombardements et les échanges de tirs incessants sur l’étroite langue de terre ont tué au moins 23.843 personnes, principalement des femmes, des adolescents et des enfants, selon le dernier bilan du ministère local de la Santé.
Le blocus israélien, renforcé avec la guerre, provoque de graves pénuries de vivres et de carburant dans toute la bande de Gaza où le système de santé s’effondre chaque jour davantage.
«Personne ne nous arrêtera»
Les craintes d’un embrasement régional grandissent après de nouvelles frappes contre les Houthis, des rebelles yéménites soutenus par l’Iran qui multiplient les attaques en mer Rouge contre des navires marchands qui seraient liés à Israël, en solidarité avec les Palestiniens.
Les États-Unis ont déclaré que leur forces avaient atteint un «site radar au Yémen» après que des sites de ces rebelles yéménites eurent été touchés par des frappes américaines et britanniques.
A la frontière avec le Liban, dans le nord d’Israël, l’armée israélienne a déclaré dimanche avoir tiré sur des «terroristes» ayant pénétré sur son territoire, et tué quatre de ces combattants.
Les échanges de tirs entre le mouvement chiite du Hezbollah au Liban, soutien du Hamas, et les forces israéliennes sont quasi-quotidiens depuis plus de trois mois. Des dizaines de milliers d’habitants ont été évacués des abords de part et d’autre de cette frontière au début du conflit.
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«Personne ne nous arrêtera, ni La Haye, ni “l’Axe du Mal”, ni personne d’autre», a martelé Benjamin Netanyahu lors d’une conférence de presse à Tel-Aviv, en référence notamment à la requête de l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de justice accusant Israël d’acte génocidaire à Gaza.
Le chef d’état-major de l’armée israélienne Herzi Halevi a, lui, assuré dans la foulée que son pays mène une guerre «juste» pour défendre «son droit à vivre ici en sécurité».
Crier
Samedi encore, l’armée israélienne a pilonné la bande de Gaza, où au moins 60 personnes ont été tuées, selon le ministère de la Santé du Hamas.
«Nous nous sommes mis à crier, je ne pouvais plus bouger, c’est quelqu’un qui m’a sortie des décombres et mise sur une charrette», raconte Nimma al-Akhras, une Palestinienne de 80 ans dont la maison a été détruite par les bombardements.
L’armée israélienne a déclaré avoir frappé des dizaines de positions du Hamas, y compris des lance-roquettes «prêts à être utilisés» ainsi qu’un «poste de commandement» du Hamas dans le centre de la bande de Gaza.
Au moins quatre «terroristes» ont été tués lors de frappes aériennes sur Khan Younès, la principale ville du sud de ce territoire, où se concentrent les combats.
Devant l’hôpital al-Najjar de Rafah, à la frontière avec l’Egypte, des dizaines de personnes prient autour de dépouilles de proches.
Bassam Arafa, qui a fui le camp de réfugiés de Bureij, dans le centre de la bande côtière, brandit la photo d’une fillette sur son téléphone: «Cette petite fille, qu’est-ce qu’elle leur a fait? Elle est morte affamée, avec un morceau de pain dans la main. Voici la résistance qu’ils visent à Gaza, ce sont juste des enfants.»
Répercussions «dévastatrices»
Un journaliste de l’AFP à Rafah a constaté samedi que les télécommunications avaient été partiellement rétablies au lendemain d’un communiqué de Paltel, principal opérateur palestinien, signalant une panne.
Paltel n’a pas confirmé la reprise du service mais a déclaré qu’une frappe israélienne avait tué deux de ses employés à Khan Younès alors qu’ils réparaient le réseau.
La pluie et le froid, qui se sont abattus sur la région, rendent encore plus difficile la survie au quotidien des familles, qui campent dans la cour du complexe médical al-Nasser. «Mais où pouvons-nous aller?», se lamente la quadragénaire Nabila Abu Zayed.
L’ONU estime que 1,9 million de personnes, soit près de 85% de la population, ont dû quitter leur logement.
Nombreux sont ceux qui cherchent un refuge à Rafah ou dans d’autres localités du sud de ce petit territoire alors que le ministère de la Santé local répète qu’il n’y a pas d’infrastructures pour les accueillir.
Son porte-parole accuse Israël de «cibler délibérément les hôpitaux (...) pour les mettre hors service» et met en garde contre des «répercussions dévastatrices».
Les hôpitaux, pourtant protégés par le droit international humanitaire, ont été frappés dans le territoire à plusieurs reprises par l’armée israélienne.
Israël accuse le Hamas de se servir d’hôpitaux comme bases et d’utiliser les civils comme des boucliers humains, ce que le mouvement palestinien dément.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), moins de la moitié des hôpitaux de la bande de Gaza fonctionnent, et ce, partiellement.
En Israël, les familles et les proches d’otages restent aussi très mobilisés pour le retour de leur proche, tentant de faire pression sur le gouvernement par des actions parfois spectaculaires et toujours symboliques.
Des milliers de personnes se sont rassemblées samedi à Tel-Aviv pour réclamer la libération des otages.
Un DJ du festival Nova, où 364 participants ont été tués le 7 octobre, s’est mis aux platines devant la foule. «Nous continuerons à venir ici semaine après semaine, jusqu’à ce que tout le monde soit libéré», a promis Edan Begerano, un manifestant de 47 ans interrogé par l’AFP.
Non loin, une centaine de personnes manifestaient elles aussi, mais pour appeler à la fin de la guerre, brandissant des pancartes «non à l’occupation» et «la vengeance n’est pas une victoire».