Le Maroc fait pression pour que l’Espagne agisse contre Brahim Ghali, selon El Pais

Brahim Ghali, chef du Polisario. 

Brahim Ghali, chef du Polisario.  . DR

La crise diplomatique entre Madrid et Rabat, déclenchée après la décision de l'Espagne d'accueillir le chef du Front Polisario, Brahim Ghali, a «brisé la confiance entre les deux pays et est loin de s'apaiser», écrit, ce dimanche 23 mai 2021, le journal El Pais, ajoutant que le Maroc a fermé les canaux de communication avec Madrid.

Le 23/05/2021 à 16h30

«Après avoir mis fin à ce qui devait être une démonstration de force à Sebta, le Maroc a changé de tactique et son objectif est désormais de conditionner l'avenir de Ghali, convoqué le 1er juin par le juge de l'Audience nationale, Santiago Pedraz, pour témoigner en tant qu'accusé de détention illégale, torture ou génocide contre des dissidents sahraouis», souligne le quotidien espagnol dans un article de son correspondant à Rabat, Francisco Peregil, qui passe en revue les différentes étapes de cette crise.

Depuis le début de la crise, il n'y a pas eu de communication de haut niveau entre l'Espagne et le Maroc, reconnaissent des sources diplomatiques, au-delà de l'entretien que Arancha Gonzalez Laya a eu mardi dernier avec l'ambassadrice Karima Benyaich avant que celle-ci ne quitte l'Espagne, rappelle la publication, précisant que la diplomate marocaine a fait une déclaration depuis Rabat sans préciser si ce que Rabat veut est seulement que Ghali aille témoigner ou que le juge prenne des mesures contre lui.

«Nous ne voulons pas penser que Rabat conditionne la normalisation des relations à quelque chose qui n'est pas entre les mains du gouvernement», indiquent des sources diplomatiques, citées par El Pais, qui rappellent qu' «en Espagne il y a une séparation des pouvoirs».

«Nous sommes respectueux dans nos relations avec tous les pays, mais nous leur demandons aussi d'être respectueux avec nous», a souligné la cheffe de la diplomatie espagnole, Arancha Gonzalez Laya dans une série de déclarations à El Pais, insistant que son pays «n'a jamais cherché cette crise, ni ne l'a alimentée. Ce que nous voulons, c'est la laisser derrière nous le plus rapidement possible». «Nous sommes respectueux et nous voulons qu'ils soient respectueux avec nous», a martelé Arancha Gonzalez Laya au journal espagnol.

Toutefois, analyse le quotidien, l’Espagne est consciente que la crise est loin d'être terminée, même si Madrid a décidé de ne pas répondre aux gestes hostiles venant de l'autre côté du détroit et ne va pas rappeler son ambassadeur à Rabat pour des consultations, comme le Maroc l'a fait avec sa représentante à Madrid.

Dans ce sens, El Pais indique, citant des sources du gouvernement, que la ministre espagnole des Affaires étrangères avait l’intention d’informer le Maroc de l’accueil de Ghali, «mais ce fait a été retardé parce que l'Espagne se battait alors pour que l'UE n'inclue pas le Maroc dans sa liste grise des paradis fiscaux, en transposant la récente décision du Groupe d'action financière (GAFI) sur les pays présentant des déficiences dans la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme -ce qui impliquait des obstacles dans l'accès aux organismes de crédit- et ne voulait pas mélanger les deux questions».

Toutefois, pour le correspondant d’El Pais au Maroc, «le roi Mohammed VI n'a jamais renoncé à l'annexion des deux villes espagnoles de l’Afrique du Nord, mais il considère que cette tâche n'incombe pas à sa génération, mais à celle de son fils».

«Le roi Mohammed VI est déterminé à achever l'œuvre de son père, Hassan II, qui a gagné la guerre au Sahara occidental et occupé la majeure partie du territoire, mais n'a pas réussi à obtenir la reconnaissance internationale de sa conquête. Tel est l'héritage avec lequel le Roi entend entrer dans l'histoire», indique le journal.

Par Rahim Sefrioui
Le 23/05/2021 à 16h30