Le code de la presse 2015 crée aussi bien l'enthousiasme que l'iinquiétude. Cette loi en cours d'élaboration suscite encore, en effet, des vagues, les professionnels réclamant plus de garanties de l'Etat pour éviter que le code pénal ne prenne le dessus en envoyant les journalistes en prison ou en fermant des organes de presse.
D'emblée, le ministre de la Communication, Mustapha Al Khalfi, rassure en affirmant que le projet -qui se décline en trois parties: presse et édition, statut du journaliste professionnel et Conseil national de la presse)- pourrait subir des modifications et des amendements lors de son passage début 2015 au Parlement. "Le futur Code de la presse sera moderne et offrira des garanties nécessaires pour le libre exercice de la profession", a-t-il assuré auprès de LE360.Parmi les avancées, a-t-il ajouté, le ministère de l'Intérieur a été écarté puisque c'est désormais la justice qui sera la seule autorité compétente en matière de délits de presse.En effet, ce qui fait jaser les journalistes, c'est que le nouveau projet de loi de la presse n'écarte pas textuellement le code pénal qui peut intervenir à tout moment dans les délits de presse pour envoyer les journalistes en prison.Pour Younes Moujahid, véritable patron du SNPM, le projet en soi est "positif car il élimine les peines privatives; mais il n'offre pas assez de garanties pour que les journalistes soient libres dans l'exercice de leurs fonctions. A tout moment, le code pénal peut intervenir pour détourner ce code de son esprit et de ses fondements". "C'est, a-t-il estimé, un véritable problème, auquel il faudra trouver une solution lors du passage de ce projet de code devant le Parlement.Selon Moujahid, ce projet de code "reste en outre imprécis sur les lignes rouges et ne protège pas suffisamment les journalistes en matière de sources".Pour le journaliste Khalid Jamai, "il faut une indépendance de la justice pour pouvoir assurer une presse libre"."Tant qu'une justice n'est pas indépendante, il n'y aura pas de liberté de la presse", a affirmé à LE360 l'ancien chroniqueur du journal istiqlalien L'Opinion.La FEJM et Reporter sans frontière (RSF, organisation française de défense de la presse), reconnaissent eux aussi les avancées positives apportées par ce code de la presse tout en espérant son enrichissement. "L’abandon des peines de prison constitue la principale avancée du projet du code de la presse. Cependant, des modifications sont encore nécessaires", a commenté RSF dans un récent communiqué. "Les dispositions concernant le secret des sources ou les procès en diffamation représentent un progrès majeur mais ne pourront constituer des garanties effectives qu’après avoir été précisées et renforcées", selon RSF.D'après cette dernière, d'autres dispositions doivent encore être amendées "en profondeur, notamment les lignes rouges" (monarchie, islam et patrie). Sur ce dernier point, des partis politiques et des ONG marocains, interrogés par LE360, ont rejeté la position de l'ONG française.De son côté Amina Bouayach, vice-président de la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH), s'est demandé "si le projet du code de la presse reflète les dispositions constitutionnelles des droits de l'homme et les garanties des libertés publiques".Partageant certaines revendications, elle a appelé à l'annulation des mesures relatives aux délits de presse dans le code pénal (actuellement en cours d'amendement), à la régulation interne de la profession par le biais du Conseil déontologique et à la mise en place de mécanismes de médiation. "A mon avis, la question qui devrait être soulevée, lors de débat au parlement, est de savoir si le projet de la presse est un code démocratique et s'il garantit l'exercice de la profession maintenant et dans l'avenir", a-t-elle souligné.Pour El Khalfi, le Code de la presse et de l'édition placera le Maroc parmi les 21 pays au monde qui disposent d'un code de la presse dépourvu de sanctions privatives de liberté."Ce texte permettra au Royaume de se doter d'un Code moderne de la presse et de l'édition qui consacre les dispositions de la nouvelle Constitution, notamment celles relatives à l'instauration de garanties de la liberté et de la pratique journalistique".Le Maroc, selon les observateurs, est au rendez-vous avec son histoire. Le nouveau code de la presse doit réussir pour consolider l'Etat de droit et la démocratie.