Dans son dernier rapport, publié hier mardi, la Cour des comptes a passé au peigne fin les mécanismes de soutien mis en place, ces deux dernières décennies, pour accompagner le développement du secteur touristique afin d’évaluer leur pertinence. Il s’agit notamment du Contrat programme national (CPN) 2010-2020 et du Contrat programme 2020-2022 relatif au soutien et à la relance du secteur post-Covid-19.
Parmi les insuffisances du CPN, la Cour des comptes relève notamment la non-mise en place des instances prévues, à savoir le Conseil national du tourisme et les agences du développement touristique, dans les 8 territoires touristiques, en remplacement des conseils régionaux du tourisme et des conseils provinciaux du tourisme existants.
L’Observatoire du tourisme non opérationnel depuis 2016
Le rapport relève également que «le dispositif de veille en place ne répond pas suffisamment au besoin des différents acteurs du secteur à moyen et à long terme et ce, du fait que l’observatoire du tourisme en tant qu’outil de veille, d’analyse, et d’aide à la prise de décision n’est pas opérationnel depuis 2016».
Lire aussi : Pépinières d’entreprises: le fiasco du programme épinglé par la Cour des comptes
De même, la Cour des comptes a constaté que les investissements touristiques sont toujours concentrés sur l’augmentation des capacités hôtelières au détriment de l’offre d’animation. Il est également question d’absence d’une stratégie intégrée de développement du tourisme interne tenant compte de la dimension territoriale et portant à la fois sur le produit, la communication et la distribution.
Persistance de l’informel
Concernant les mesures prises en réponse à la crise sanitaire, la Cour des comptes a observé que seulement 82.631 salariés des secteurs de l’hébergement et de la restauration ont bénéficié de l’indemnité forfaitaire octroyée, sur un total de 126.311 salariés déclarés à la CNSS à fin février 2020, soit un taux d’indemnisation de 65%.
«La crise sanitaire a permis de confirmer la prévalence de l’emploi informel dans le secteur touristique, en l’absence de toute évaluation de son poids dans l’économie du tourisme et sur la vie sociale des travailleurs. C’est le cas de certaines catégories exerçant dans les activités connexes du tourisme, notamment les entreprises de location du matériel et de voitures et les travailleurs des établissements d’hébergement non classés», explique l’institution dirigée par Zineb El Adaoui.
Chèques-vacances: une promesse qui n’a jamais vu le jour
En ce qui concerne la promotion et le renforcement de la demande touristique, la Cour des comptes a souligné que le mécanisme de soutien de la demande domestique, qui consiste en l’émission de «chèques-vacances», tarde à se concrétiser, et ce, malgré l’adoption de cette mesure dans le cadre de la Loi des finances rectificative 2020.
Lire aussi : Radars fixes: les cinq dysfonctionnements relevés par la Cour des comptes
Ces chèques devaient être délivrés par les employeurs à leurs salariés pour leur permettre de s’acquitter de toutes ou une partie des dépenses relatives aux prestations touristiques afin d’encourager le tourisme interne.
Risque d’insolvabilité de certaines entreprises
S’agissant du soutien économique et financier, les parties prenantes du CP se sont engagées à prolonger le délai de remboursement des crédits «Damane Oxygène» jusqu’au 31 décembre 2021 au lieu du 30 juin 2020.
Toutefois, avec l’allongement de la période de crise et le ralentissement significatif de l’activité touristique, le remboursement des échéances de la dette à moyen et long terme s’avère «difficile pour les entreprises du secteur du fait que l’Excédent Brut d’Exploitation devient généralement insuffisant pour absorber les charges financières et les amortissements, ce qui entraîne un risque réel d’insolvabilité pour ces entreprises», précise le rapport.
En matière de fiscalité, l’Etat s’est engagé, à travers le contrat programme, à œuvrer pour mettre en place un accord global pour le traitement des passifs fiscaux des opérateurs touristiques. Or, il a été constaté que cet accord n’a pas été mis en place, alors qu’il devrait entrer en vigueur depuis la fin de l’année 2021.