Le système financier marocain amorce une normalisation progressive

A fin octobre, l'encours du crédit bancaire affiche une progression annuelle de 6%. DR

Revue de presse Les dernières statistiques de Bank Al-Maghrib à fin octobre révèlent une reprise graduelle du crédit et un rééquilibrage des flux financiers. Si les liquidités circulent activement dans le système, leur transmission vers l’économie réelle reste mesurée, avec des signes encourageants pour l’investissement des entreprises et la consommation des ménages. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien L’Economiste.

Le 18/12/2025 à 20h20

À la lecture des statistiques publiées par Bank Al-Maghrib à fin octobre, un constat s’impose: le système financier marocain semble être entré dans une phase de normalisation progressive. Cette évolution se caractérise moins par des ruptures marquées que par une série de rééquilibrages, traduisant une sortie graduelle des tensions observées ces dernières années.

«L’encours du crédit bancaire affiche une progression annuelle de 6% à fin octobre, un chiffre qui peut, de prime abord, être interprété comme un signal positif», indique le quotidien L’Economiste dans son édition du vendredi 19 décembre. Cette hausse masque toutefois des dynamiques contrastées. Elle est principalement tirée par les crédits accordés aux agents financiers, qui enregistrent une augmentation de 18,7%, tandis que ceux destinés aux agents non financiers progressent à un rythme bien plus modéré, de 3,6%. Cet écart met en lumière un système bancaire encore fortement mobilisé sur des opérations de refinancement et de gestion de liquidité internes, alors que la diffusion du crédit vers l’économie réelle demeure plus graduelle. Les liquidités circulent abondamment au sein du secteur financier, mais leur acheminement vers l’investissement productif et la consommation reste progressif.

S’agissant des entreprises non financières privées, la croissance du crédit demeure limitée à 1,4%. Ce rythme relativement faible pourrait être perçu comme un signe de frilosité, mais il s’accompagne d’une évolution qualitative notable. Les crédits à l’équipement enregistrent une forte progression de 17%, traduisant un regain d’investissement et une volonté de modernisation des capacités de production. Cette dynamique suggère que les entreprises commencent à se projeter de nouveau à moyen terme. Les prêts destinés à la promotion immobilière augmentent également de 4,1%, signalant un début de redressement dans un secteur longtemps confronté à des difficultés. À l’inverse, les facilités de trésorerie reculent de 9%, une évolution qui reflète à la fois la prudence persistante des banques sur le financement du court terme et, possiblement, une amélioration de la gestion de liquidité de certaines entreprises.

«Du côté des ménages, la trajectoire apparaît plus stable», relève L’Economiste. Les crédits progressent de 3,1%, un rythme proche de celui observé précédemment, soutenu par les prêts à l’habitat, en hausse de 3,3%, et par les crédits à la consommation, qui augmentent de 4,5%. Cette évolution traduit une confiance mesurée des ménages, dans un contexte marqué par une désinflation progressive et des conditions de financement légèrement plus favorables. Le financement participatif destiné à l’habitat poursuit par ailleurs son développement. Les encours de Mourabaha immobilière atteignent 28,7 milliards de dirhams, contre 24,1 milliards un an auparavant, reflétant à la fois une demande sociale soutenue et une diversification accrue de l’offre bancaire.

Sur le plan des conditions de financement, le taux débiteur moyen appliqué aux nouveaux crédits s’établit à 5,71% au troisième trimestre 2025, en légère baisse. Le recul est plus marqué pour les prêts à l’habitat, tandis que les crédits à la consommation restent globalement stables. Cette détente demeure toutefois partielle. Comme l’a souligné le Wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, lors de la conférence de presse tenue à l’issue du Conseil de la banque centrale, la transmission de la politique monétaire prend du temps, notamment en raison de l’importance des contrats à taux fixe dans les encours existants. Dans cette perspective, une réunion avec le Groupement professionnel des banques du Maroc est prévue début janvier afin d’examiner les pratiques de taux et la question des dépassements de lignes de crédit, avec pour objectif de renforcer l’impact de l’assouplissement monétaire sur l’économie réelle.

«Dans ce contexte de reprise graduelle du crédit, l’évolution des créances en souffrance constitue un indicateur relativement rassurant», précise L’Economiste. Leur progression annuelle se limite à 3,7% et leur ratio demeure stable à 8,6% de l’encours global. Les niveaux restent élevés chez les entreprises non financières privées, avec un ratio de 13,2%, et chez les ménages, à 10,6%, mais l’absence de détérioration suggère que la croissance du crédit ne s’accompagne pas d’un relâchement excessif des critères de risque.

La masse monétaire M3 atteint, pour sa part, 1.982 milliards de dirhams, en hausse de 7,4% sur un an. Ce rythme, légèrement inférieur à celui observé le mois précédent, reflète des évolutions contrastées. Les créances nettes sur l’Administration centrale ralentissent nettement, tandis que le crédit au secteur non financier accélère et que les avoirs officiels de réserve enregistrent une forte progression de 19,6%. Plus significatif encore, la composition de la liquidité évolue. Les placements en OPCVM monétaires marquent un net ralentissement, alors que la monnaie fiduciaire accélère fortement, avec une hausse de 11,7%, traduisant de nouveaux arbitrages dans la détention de liquidités.

Par Le360
Le 18/12/2025 à 20h20