Economie: l’industrie et les services compensent la vulnérabilité de l’agriculture

Le nouveau cycle de croissance de l’économie marocaine est porté notamment par l’industrie d’extraction, l’hébergement et restauration, les industries de transformation, le BTP, le commerce.

Revue de presseLa croissance économique du Maroc dépend de moins en moins des aléas climatiques. Selon le professeur Driss Effina, l’essor de l’industrie, des services et du tourisme compense la vulnérabilité de l’agriculture, tandis que la formation professionnelle et la diversification demeurent les clés d’une croissance durable et inclusive. Cet article est une revue de presse tirée de Finances News Hebdo.

Le 10/11/2025 à 20h14

L’économie marocaine semble progressivement se détacher de la dépendance à la pluviométrie. Le constat est dressé par l’économiste Driss Effina. Dans un entretien accordé à Finances News Hebdo, il explique que cette mutation n’est ni passagère ni fortuite. «Durant les vingt-cinq dernières années, la croissance du Maroc s’est distinguée par son instabilité. Une année favorable était souvent suivie d’un net ralentissement, en raison de la dépendance à la pluie. Autrement dit, la performance économique du pays suivait les caprices du ciel», explique Effina.

Cette corrélation étroite avec l’agriculture rendait la croissance nationale vulnérable et limitait le développement du monde rural. «Or, depuis environ quatre ans, un changement structurel s’opère. La croissance marocaine paraît de moins en moins tributaire des aléas climatiques. Même en période de sécheresse, l’activité continue de progresser», note l’économiste.

Effina attribue cette évolution à la montée en puissance de l’industrie et des services, écrit Finances News. «Industrie, services, tourisme, banques, commerce… autant d’activités désormais dynamiques, rentables et insensibles aux sécheresses récurrentes. Le tourisme, par exemple, a fortement progressé ces dernières années. L’industrie, quant à elle, s’est imposée grâce à des filières performantes comme l’automobile ou l’aéronautique», souligne-t-il. Ce redéploiement industriel a permis de compenser les contre-performances agricoles et de stabiliser la croissance nationale.

Pour Effina, cette tendance est durable: «le Maroc entre dans une phase où la rareté des pluies devient une donnée structurelle. Les acteurs économiques l’ont compris: la durabilité passe par la diversification. Les grands investisseurs agricoles savent que les projets viables reposent sur des systèmes d’irrigation sécurisés». Il met en avant les efforts du ministère de l’Agriculture qui déploie de vastes programmes dans les régions comme Souss-Massa, adossés à des stations de dessalement. Bientôt, une autre station à Sidi Rahal permettra d’irriguer près de 100.000 hectares. Effina rappelle aussi que la montée du secteur minier, portée par l’OCP et d’autres acteurs de l’extraction et de la transformation, apporte une forte valeur ajoutée à l’économie nationale.

Malgré ces avancées, le taux de chômage reste élevé. Pour Effina, ce n’est pas inquiétant. «Ce phénomène, loin d’être alarmant, s’observe dans tous les pays ayant connu une mutation économique profonde. Au Maroc, le HCP mesure le chômage par enquête et non par inscription administrative, ce qui gonfle mécaniquement les chiffres sans refléter toujours la réalité», estime l’économiste. Il évoque aussi l’impact de la migration interne: «les flux ruraux-urbains accentuent le chômage à Casablanca ou Tanger. Beaucoup de migrants peu qualifiés arrivent sur des marchés déjà saturés. Pourtant, ces villes créent continuellement des emplois. Sans ces arrivées massives, leur taux de chômage serait proche de zéro».

Effina estime que «la solution passe par la formation de courte durée. Les autorités doivent créer des centres dans les zones périurbaines et rurales proches des grandes villes pour préparer les travailleurs aux métiers en demande, notamment dans le BTP».

Il rappelle que la croissance du secteur sera soutenue par les grands projets comme la CAN 2025 et la Coupe du Monde 2030, et insiste sur l’importance de l’anticipation. «Ne pas préparer ces besoins serait rater une occasion historique. Plutôt que de multiplier les crédits aux jeunes sans expérience, il faut privilégier la formation et le soutien aux entreprises existantes, capables d’embaucher et de transmettre un savoir-faire», souligne-t-il.

Cela dit, l’économiste souligne que le manque d’expérience reste le principal frein à l’entrepreneuriat. Il conclut que la réussite économique repose avant tout sur la formation et le savoir-faire. «La leçon est claire: la réussite économique dépend moins de l’argent que de la compétence et de la préparation. C’est cette approche que le Maroc devra adopter pour transformer durablement sa croissance et la rendre réellement inclusive», note l’économiste.

Par La Rédaction
Le 10/11/2025 à 20h14