«Mangez Lhandia les yeux fermés», tel est le message de l’ONSSA diffusé sur son site web: www.onssa.gov.ma. La cochenille n’est pas un virus. C’est un insecte qui ne présente aucun danger pour la santé humaine et animale.
Fort présente aujourd’hui à Sidi Bennour, Rhamna et Youssoufia, la cochenille risque de proliférer, si rien n’est fait, et finira par tuer le figuier de barbarie. «C’est un insecte ravageur qui peut venir à bout d’une jeune plantation en moins de deux mois. Il peut aussi décimer une vieille plantation sur plusieurs hectares en un ou deux ans», confie à Le360 Dr Bouharroud du Centre de l'INRA d'Agadir.
Les autorités tentent de rassurer les agriculteurs et les consommateurs: une intervention d’urgence a déjà été menée consistant en l’arrachage et l’incinération de toutes les plantations de cactus sur plus de 400 ha au niveau de Sidi Bennour, dans le Doukkala.
L’INRA (Institut national de recherche agronomique), sous la supervision du département de l’Agriculture, a entamé des recherches sur des variétés de cactus résistantes à la cochenille ainsi que des insecticides biologiques de lutte contre ce parasite. Cela risque de prendre du temps, d’autant que ce programme de recherche est piloté par l’INRA avec ses propres moyens humains et financiers. Il n’était pas possible d’avoir une précision sur le budget affecté à ce programme de recherche.
Certes, l’INRA bénéficie de l’expertise en matière d’amélioration génétique du figuier de barbarie. Il dispose, selon le Dr. Bouharroud de quelque 400 éco-types de cactus, grâce aux travaux du Pr. Boujrar, qui a publié deux ouvrages sur la question.
Cela étant, Il est utile de rappeler que le Maroc compte entre 120.000 et 150.000 ha réservés à la culture du figuier de barbarie, dont près de la moitié est développée dans le Souss. Dans cette région, on l’appelle «Acnaray», en lien avec «Canaries». Selon une légende, cette plante est arrivée par les eaux de l’océan atlantique, poussée par les vents depuis les Iles Canaries.
D’après les écrits glanés ici et là, le figuier de barbarie est introduit au Maroc vers le 17e siècle. On ne connait pas les détails de cette histoire. Ce cactus de la variété «Opuntia» est cultivé principalement en Amérique latine (Pérou, Mexique…). Il existe aussi en Australie, Afrique du sud, USA, Espagne...
Au Maroc, cette culture s’est bien développée ces dix dernières années, à la faveur du plan Maroc vert. Autrefois nourriture du pauvre, ce fruit est de plus en plus apprécié, à la fois, pour ses qualité nutritives et ses vertus «exceptionnelles et miraculeuses» en matière cosmétique et médicinale.
Vers une meilleure valorisation
Il y a trois ans, une unité de valorisation de ce fruit a vu le jour à Sidi Ifni pour un investissement de 85 millions DH. Au lancement de ce projet en 2013, il était question d’organiser la filière du «Sebbar» dans la région Ait Baâmrane, connue pourr sa variété unique de son fruit, plus gros, plus sucrée et plus juteux, appelé «Moussa», à l’inverse de «Dellahia» dans le Doukkala.
Ce GIE (Groupement d’intérêt économique) devait permettre à plus de 1.200 agriculteurs de cette contrée d’améliorer leurs revenus, en développant cette culture dont le rendement devrait passer de 8 à 10t/ha.
Au-delà du simple conditionnement, les professionnels s’intéressent à une forte valorisation de ce fruit, en exploitant ses dérivés sous forme de produits à haute valeur ajoutée. A l’instar de l’Argan, on a commencé l’extraction de l’huile (véritable élixir de beauté, ce qui explique son prix élevé aux environs de 10.000 DH/L). On en fait aussi de la confiture ou marmelade. Il est possible d’en tirer du vinaigre, jus et boissons et autres produits cosmétiques (crème, savon champoing...
Mais au-delà de la valorisation industrielle, le cactus contribue aussi à la mise en valeur des sols pauvres et leur protection contre l’érosion et à l’alimentation du bétail. D’où l’intérêt de veiller au bon développement de cette culture qui permet d’assurer des revenus aux femmes rurales, de créer des emplois sur toute la chaine, depuis la production jusqu’à la commercialisation en passant par le conditionnement et la transformation.
C’est dire que la cochenille représente un réel défi pour la filière. Cet insecte, qui n’est pas connu au Maroc, a déjà fait son apparition il y a tout juste un an, jour pour jour, à Sidi Bennour dans la commune de Saniet Berguig. Cet insecte suceur de sève de cactus existe en Espagne et ailleurs (Amérique latine, Australie, Afrique du sud…).
L’ONSSA précisait, dans un communiqué publié il y a un an déjà, lors de l’infestation des cultures à Sidi Bennour, que la cochenille «se couvre de filaments cireux et duveteux blancs ; les femelles, peu mobiles, se fixent sur la surface de la plante, se nourrissent et se reproduisent sur les raquettes. Les mâles, eux, sont très mobiles en masse et s’envolent. En cas de forte infestation et en l’absence de mesures de lutte, la cochenille peut provoquer un dépérissement de la plante».